L’association “Bouge ton coq” lance un appel à candidatures pour ouvrir de nouvelles épiceries participatives dans les villages d’Occitanie, dénués de commerces, comme ce fut le cas à Mazères-sur-Salat, en Haute-Garonne.
L’association “Bouge ton coq” lance un appel à candidatures avec l’ambition d’ouvrir cette année une centaine de nouvelles épiceries au bénéfice des villages ruraux d’Occitanie, comme du reste de la France. Depuis 2021, “Bouge ton coq”, en partenariat avec la structure de l’Économie sociale et solidaire (ESS) spécialisée dans la création d’épiceries participatives Mon Épi, a permis l’ouverture de 400 boutiques, dont 12 dans la région.
À l’image de l’épicerie de Mazères-sur-Salat, en Haute-Garonne. Dans ce village de 650 habitants, les commerces dits “traditionnels” n’arrivaient jusqu’alors pas à tenir le coup économiquement. Et la grande surface la plus proche se situait à plus de cinq kilomètres. « Nous avons donc eu l’idée de créer une épicerie participative. Et pour cela, nous avons fait appel à “Bouge ton coq” », raconte Nicolas Froissart, membre de l’association gestionnaire de la boutique à Mazères-sur-Salat.
« L’installation de l’épicerie s’est faite très rapidement », se souvient Nicolas Froissart. Après avoir passé un accord avec la mairie pour le prêt d’un local, l’association a bénéficié d’une aide de 1 100 euros de la part de “Bouge ton coq” pour l’achat de meubles, d’ordinateurs, d’un terminal de paiement, d’une balance et d’un réfrigérateur. Les subventions annuelles de la Région, du Département de la Haute-Garonne et du Fonds d’aide à la vie associative ont également permis aux bénévoles de créer un stock de denrées, et de constituer un “budget parachute” en cas de panne d’équipement, par exemple.
L’épicerie fonctionne maintenant depuis près de deux ans grâce au travail de plus d’une trentaine de bénévoles, qui se relaient chaque semaine pour tenir la boutique le mercredi, le vendredi soir et le samedi matin. Pour faciliter sa gestion, et régler les potentielles situations de conflits, l’association se divise en “commissions”, chargées, par exemple, des achats auprès des fournisseurs, de la comptabilité, de la communication… Et le concept fonctionne tellement bien, que Au Court Circuit a récemment déménagé dans un local plus grand, de 100 mètres carrés, toujours prêté par la mairie.
Pas de salaire, pas de loyer. Donc, pas besoin de retirer des bénéfices. Les denrées et autres produits proposés au sein du réseau d’épiceries “Bouge ton coq” sont vendus aux prix fixés par les producteurs. « Si un horticulteur nous vend un kilo de pommes à 50 centimes, l’habitant le paiera 50 centimes et le professionnel récupèrera 50 centimes. Ce n’est pas plus compliqué que cela », sourit Nicolas Froissart.
Sur les étals de Au Court Circuit, se trouvent d’abord des produits “secs”, tels que la farine, les pâtes, le pain, les biscuits… dont les dates de péremption sont éloignées. Les produits frais, comme les viandes, les poissons, les fruits et les légumes, sont eux vendus sur commande. « Étant donné que les épiceries ne dégagent pas de marge, elles ne peuvent pas se permettre de subir des pertes. Car elles restent dans l’obligation de rémunérer les producteurs », soutient Aymard de la Guillonnière, responsable des créations d’épiceries du réseau “Bouge ton coq”. L’année dernière, par exemple, Au Court Circuit a subi l’équivalent de 80 euros de pertes. Une petite somme rapidement épongée par les subventions.
Pour adhérer au projet, les bénévoles s’engagent à consacrer minimum deux heures de leur temps chaque mois à la tenue de l’épicerie, « soit la durée d’un film, ce qui ne demande pas de gros sacrifices », estime Aymard de la Guillonnière. En échange, ils sont les seuls à avoir accès aux produits de la boutique. « L’objectif est que personne ne soit tenté de profiter du service sans se sentir concerné par sa gestion », poursuit le responsable de “Bouge ton coq”. Mais il peut y avoir des exceptions. À Mazères-sur-Salat par exemple, les bénévoles n’hésitent pas à ouvrir les portes de l’épicerie pour dépanner leurs voisins dans le besoin.
Selon Nicolas Froissart, le bénéfice d’un tel engagement est double pour les bénévoles. D’une part, ils permettent de refaire vivre le cœur du village. D’autre part, ils paient leurs courses, composées de denrées produites dans un rayon de moins de 70 kilomètres, à prix producteurs. Ainsi, les produits sont environ 25% moins chers que dans les grandes surfaces. En outre, à Mazères-sur-Salat, les produits introuvables au niveau local, comme le café, sont commandés auprès des fournisseurs du Biocoop installé dans un des villages alentour.
« Aujourd’hui, en France, dans deux communes sur trois, les habitants sont obligés de faire en moyenne 12 kilomètres pour faire leurs courses, et donc, de prendre leur voiture. Ce qui ne facilite pas les interactions qu’il peut y avoir lorsqu’on part acheter sa farine à pied et qu’on croise ses voisins. Donc, en plus d’offrir un nouveau service commercial, notre objectif est de rétablir du lien social dans ces villages, en favorisant les échanges entre ceux qui y habitent », expose Aymard de la Guillonnière.
À Mazères-sur-Salat, Au Court Circuit est effectivement devenu un lieu de partage. Certains bénévoles viennent travailler avec leurs enfants, par exemple. « L’épicerie a vocation à devenir un véritable tiers-lieu, dans lequel seront dispensés des formations, organisés des événements… », se projette Nicolas Froissart.
L’organisation des épiceries du réseau “Bouge ton coq” est propre à chaque boutique. En effet, les règles sont définies en interne. Mais les bénévoles bénéficient d’un accès gratuit à la plateforme imaginée par Mon Épi, afin de les aider à gérer leurs stocks, à définir les plannings ou encore à répartir les tâches. Le site permet également de régler les montants des adhésions, qui s’élèvent en moyenne à vingt euros par an pour chaque bénévole.
Mon Épi répertorie par ailleurs les factures de l’épicerie. Les charges fixes, telles que l’eau et l’électricité sont, soit prises en charge par la mairie de la commune, soit réglées grâce aux cotisations des bénévoles de l’association.
Le seul critère pour candidater auprès du réseau “Bouge ton coq” est d’habiter dans une commune de moins de 3 500 habitants qui ne bénéficie pas de commerces dits “généralistes”, c’est-à-dire d’une enseigne qui vend toutes sortes de denrées alimentaires, de boissons, comme de produits secs, d’hygiène ou ménagers. « Ceci concerne plus de 25 500 communes en France », souligne Aymard de la Guillonnière.
La première étape consiste à s’inscrire, directement sur le site de “Bouge ton coq”, à l’une des réunions d’information organisées plusieurs fois par semaine en visioconférence. Une fois le contact établi avec les membres de “Bouge ton coq”, la machine se met en route. Ces derniers aident les habitants des villages à monter leur association, à chercher des fournisseurs, puis à trouver des bénévoles. Selon le responsable du réseau d’épiceries, « avoir une dizaine d’adhérents permet d’ouvrir l’épicerie une à deux fois par semaine. Au-delà d’une quarantaine de personnes, l’enseigne peut ouvrir chaque jour ». Alors, pourquoi pas dans votre commune ?
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