Au début de l’année 1974, une poignée d’anarchistes et révolutionnaires de Toulouse et d’ailleurs s’organisent pour lutter contre la répression franquiste. Une page méconnue de l’histoire de la ville qui lui doit en partie sa tradition militante.
L’histoire débute en septembre 1973, de l’autre côté des Pyrénées. Lors d’une fusillade dans les rues de Barcelone, plusieurs militants du Mouvement ibérique de libération (Mil) sont arrêtés, dont Salvador Puig Antich, qui sera exécuté le 2 mai 1974 par strangulation. Parvenant à s’enfuir, un certain Jean-Marc Rouillan et sa compagne rentrent chez eux, à Toulouse, et se dirigent vers l’Imprimerie 34, rue des Blanchers, pour organiser un mouvement de solidarité. « Les Gari sont issus de la rencontre entre des militants du Mil, de groupes autonomes et de révolutionnaires espagnols proches des organisations anarchistes », raconte Nicolas Réglat, fils du fondateur de l’Imprimerie 34 et auteur du film ‘’¡ G.A.R.I !’’, sorti en 2013. La coordination fixe ses objectifs : s’attaquer aux intérêts espagnols, faire pression sur l’État français et l’opinion publique, ne pas faire de victimes.
Le coup d’éclat initial survient en février 1974 avec le mitraillage de la voiture, vide, du chancelier d’Espagne à Toulouse. Suivi de multiples opérations comme le braquage de la banque Courtois à Montesquieu-Volvestre. Au lendemain de l’exécution de Puig Antich, la tension monte d’un cran et le directeur de la Banque de Bilbao, Angel Baltasar Suarez, est enlevé à Paris. Une véritable lutte armée à laquelle le récit de Nicolas Réglat, à travers les témoignages des protagonistes de l’époque, confère un caractère décalé et profondément humain. L’aventure des Gari est en effet parsemée d’anecdotes savoureuses : un kidnappé choyé par ses geôliers à qui l’on cuisine du lapin, du champagne déposé dans une caserne de pompier après que trois soldats du feu ont été blessés dans l’attentat contre le consulat d’Espagne à Toulouse…
Malgré différentes vagues d’arrestations, le combat porte ses fruits. « Jamais un pouvoir ne reconnaît avoir cédé, mais si l’on considère la chronologie des faits, on peut voir un rapport de cause à effet entre l’enlèvement du banquier et la non-condamnation à mort des camarades de Puig Antich, puis la libération de plusieurs prisonniers après les attentats de l’été 1974 », souligne Nicolas Réglat. D’autant que le contexte est favorable aux Gari. « Leur cause était très populaire, car Franco était le dernier dictateur fasciste et que, dans l’après-mai 1968, les idées révolutionnaires étaient très présentes », poursuit le réalisateur. Malgré l’autodissolution des Gari en août 1974, les actions de solidarité ont continué pour faire relâcher les derniers détenus, finalement acquittés en 1981. Différents chemins s’offrirent alors aux compagnons de lutte. Jean-Marc Rouillan, notamment, prendra celui d’Action Directe.
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