L’archevêque de Toulouse, Monseigneur Guy de Kerimel, va consacrer la ville en l’église du Sacré-Cœur de Jésus, ce mercredi 16 octobre. Un acte rituel visant à la protéger… mais de quoi ?
C’est une messe pas comme les autres qui va se tenir à l’église du Sacré-Cœur, ce mercredi 16 octobre. Lors de celle-ci, l’archevêque de Toulouse, Monseigneur Guy de Kerimel, va en effet consacrer la ville. Pour ceux qui ne seraient pas familiers des termes religieux, la consécration consiste, selon le site de l’Église catholique en France, à « consacrer une personne, un objet, ou un bien, en les vouant au service de Dieu ». Ici, en l’occurrence, c’est la ville de Toulouse qui va être consacrée au Sacré-Cœur de Jésus. Un acte rituel qui n’a rien d’anodin. Alors, sur le site internet du diocèse, Monseigneur Guy de Kerimel justifie sa décision.
« Des nuages sombres s’accumulent sur notre monde. L’actualité nous renvoie beaucoup de réalités négatives qui suscitent des inquiétudes légitimes, et favorisent cette atmosphère de désespérance qui règne dans notre société, et se manifeste dans une certaine culture, de plus en plus fascinée par l’obscur, le ténébreux. Après avoir échangé avec le Conseil épiscopal et un certain nombre de chrétiens du diocèse, il m’a semblé important de poser un acte spirituel qui protège notre ville de Toulouse et notre diocèse de ces menaces ténébreuses et de la désespérance », déclare-t-il.
Mais quelle est cette actualité évoquée par Monseigneur Guy de Kerimel ? Interrogé par le Journal Toulousain, le diocèse de Toulouse explique : « En ce moment tout est triste et toxique, que ce soit sur le plan politique, humain ou social. Les gens ne communiquent plus. De nombreux pays sont en guerre ». L’archevêque de Toulouse veut donc « remettre les chrétiens dans le beau et l’espérance ». Et ce, quelques jours avant la tenue du second opus de l’opéra urbain de la Cie La Machine dans le centre de la Ville rose, intitulé “La Porte des Ténèbres”.
Un événement qui a conforté Monseigneur Guy de Kerimel, comme on peut le deviner en lisant sa déclaration, dans sa volonté de consacrer Toulouse. « Ce spectacle est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase », souligne le diocèse. Pour rappel, celui-ci se tiendra les vendredi 25, samedi 26 et dimanche 27 prochains. Il mettra en scène trois géants de bois et d’acier : Astérion le Minotaure, Ariane la Grande Araignée et Lilith la Gardienne des Ténèbres. Cette dernière investira les rues de Toulouse dans le but de « récupérer des âmes damnées et de créer une immense porte des ténèbres pour agrandir l’armée d’Hadès », indiquait François Delarozière, directeur artistique de la compagnie La Machine, lors d’une conférence de presse.
Si le diocèse assure « ne rien avoir contre l’aspect artistique de cette grande fête », il dénonce toutefois l’atmosphère du spectacle, et surtout l’affiche du spectacle. Sur celle-ci, l’on peut notamment voir des monuments emblématiques de Toulouse, comme le Dôme de la Grave ou la cathédrale Saint-Étienne, qui semblent léchés par les flammes. Face à ce choix iconographique, chacun y va de son interprétation. « Cette affiche représente des églises de la ville qui prennent feu, alors que certaines ont récemment brûlé en France », estime le diocèse qui fait notamment référence à l‘église de Saint-Omer, dans le Pas-de-Calais. Le curé de l’ensemble paroissial de Saint-Étienne, l’abbé Simon d’Artigue est du même avis et déplore « une iconographie diabolique » dans une publication sur X (anciennement Twitter).
Mais pour François Delarozière, il n’en est rien. « Ce ne sont pas les églises qui brûlent, mais la ville qui est en feu et la foule. Nous avons sur cette affiche des symboles moyenâgeux qui racontent une histoire. C’est intéressant d’ailleurs de voir qu’une iconographie moyenâgeuse lance un débat qui l’est presque tout autant », souligne le directeur artistique de la compagnie La Machine qui tient à affirmer qu’il n’a « en aucun cas, voulu stigmatiser une communauté, notamment la communauté catholique » avec ce nouveau spectacle. Cette interprétation du diocèse a également « étonné » le maire de Toulouse. « Quand on regarde bien l’affiche, on voit du feu mais il est dans la ville, devant les églises et celles-ci sont intactes. C’est-à-dire que l’affiche dit bien que les églises résistent au feu », appuie Jean-Luc Moudenc.
Et s’il « ne perçoit pas ce spectacle comme une promotion des valeurs du mal ou des références sataniques », le maire de la Ville rose indique qu’il « respecte la position de Monseigneur Guy de Kerimel, sa sensibilité et son interprétation ». Pour lui, d’ailleurs, « le propre d’une œuvre artistique est qu’elle provoque de l’émotion, qu’elle soit négative ou positive ». « Elle génère toujours une multiplicité d’interprétations contraires et contradictoires. Qu’il y ait donc un débat et que toutes les sensibilités s’expriment, je trouve ça parfaitement normal », juge l’édile.
De son côté, le diocèse de Toulouse demande à ce que « les spectacles glauques qui mettent en scène des monstres et du feu » cessent. « Encore une fois, Monseigneur Guy de Kerimel n’a rien contre l’artiste, mais en tant qu’archevêque, il nous dit de prêter attention à ce que l’on fait et veut nous remettre dans la lumière par le biais de cette consécration », rapporte le diocèse.
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