ROBINET. D’ici 2020, les contrats de gestion de l’eau des 37 communes de la Métropole vont prendre fin. La succession est ouverte. Qui de la régie publique ou d’un acteur privé l’emportera ? Quelles seront les conséquences sur le prix et sur la qualité de notre boisson ? Le JT fait le point sur cette guerre de l’or bleu.
Maylis Jean-Préau
© Guillaume Coqueblin
Le dossier continue de faire couler de l’encre. D’autant plus que la donne a changé. La gestion de l’eau potable et de l’assainissement ont été transférés à Toulouse Métropole. En février 2020, lorsque les contrats de toutes les communes seront arrivés à leur terme, ils seront donc remplacés par un seul mode de gestion. Les élus du conseil de la métropole ont déjà planché sur le sujet. Ils ont acté le principe d’un tarif unique pour les 37 municipalités, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Par contre, l’épineuse question de la gestion de l’eau reste en suspens. Le président de la métropole, Jean-Luc Moudenc, a souhaité mettre en place une consultation afin de comparer les avantages et inconvénients des deux modes de gestion. « Nous avons lancé d’un côté une étude pour une régie publique, et de l’autre, des procédures de délégation de service », précise Pierre Trautmann, conseiller métropolitain. « Parmi les propositions des entreprises, nous sélectionnerons le meilleur candidat pour l’eau et le meilleur pour l’assainissement. Nous les comparerons à la régie et prendrons une décision avant fin 2018. Notre choix se portera sur la meilleure solution tant en termes de prix que de qualité. »
Au conseil métropolitain, la réouverture de ce dossier est source de débats houleux. Jean-Luc Moudenc dit « ne pas avoir de religion sur le sujet. » Mais du côté de l’opposition, les élus de gauche et les écologistes pensent que les jeux sont faits. Antoine Maurice, président du groupe Toulouse Vert Demain, critique « une délibération biaisée, qui oriente de fait la Métropole vers un choix dogmatique de reconduction en 2020 de la délégation de service public accordée au groupe Véolia. » Les Verts réclamaient la tenue « d’un grand débat public » sur ce « bien commun de l’humanité ». Pour l’association Eau secours 31, ces appels d’offres représentent « beaucoup de temps et d’argent » qui auraient pu être consacrés à un retour en régie publique.
Si le match entre le privé et le public a un caractère très politique, son issue peut aussi avoir des répercussions sur le budget des Toulousains. Depuis la signature du contrat de concession avec Véolia en 1990, la facture d’eau a grimpé en flèche. La Mairie précise toutefois que « cette évolution est encadrée par une formule d’indexation représentative de l’évolution des coûts de production. » Selon une étude de 60 millions de consommateurs, rien qu’entre 2011 et 2015, le prix a progressé de 13%, soit une hausse de 0.45€. « Trois facteurs expliquent cette hausse : une évolution de la formule d’indexation (+ 1.5% par an), le passage de la TVA pour l’assainissement de 5.5% à 10% et une augmentation des taxes décidées par l’Agence de l’eau », rajoute Pierre Trautmann.
À l’inverse, sur les cinq communes de l’Ouest toulousain déjà en régie directe (Brax, Colomiers, Cornebarrieu, Pibrac, Tournefeuille), elle est la moins chère note l’Observatoire national des services d’eau et d’assainissement. L’élu toulousain s’explique: « Les prix de l’eau des 36 communes autres que Toulouse ne reflète pas du tout la réalité économique. En effet, dans ces communes, le service présente un endettement qui, en 2020, est estimé à 3,4 fois le chiffre d’affaire annuel. Cela devrait conduire à une explosion des tarifs. Au contraire, pour la ville de Toulouse, le délégataire rendra en 2020 un service quasiment sans dette, ce qui permettrait de baisser très fortement le prix de l’eau sur Toulouse. »
Pourtant, la présidente de l’association Eau Secours 31, Anne Bouzinac, assure que la régie publique, « si elle est bien gérée, est le mode le plus intéressant pour l’usager ». Le prix de l’eau étant en général « inférieur de 20% ». En une décennie, plus de 300 communes de France ont ainsi fait le choix d’un retour à la régie directe. Toulouse va-t-elle à son tour se jeter à l’eau ?
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