Il est des professions plus difficiles à assumer que d’autres. Fossoyeur, huissier, thanatopracteur, égoutier… Certaines sont socialement mal acceptées, d’autres simplement inenvisageables pour la plupart d’entre nous. Laurence Falgua, elle, est inspectrice des finances publiques à Toulouse. Une profession où le plus embêté n’est pas toujours celui qu’on croit. Portrait.
Retrouver un gérant d’entreprise fantôme, des comptes bancaires cachés ou déceler un montage irrégulier permettant d’échapper à la TVA… Le métier de Laurence Falgua, inspectrice des finances publiques au sein d’une brigade de vérification à Toulouse, tient autant du comptable et du juriste que du détective privé. Chargés de mener à bien des contrôles fiscaux dans des entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à un million d’euros, Laurence Falgua et ses collègues de la Direction régionale des finances publiques Occitanie provoquent, à la simple évocation de leur visite, des sueurs froides à bon nombre de patrons et entrepreneurs. Une réputation qui, vu de l’intérieur, est loin d’être justifiée. Il semblerait d’ailleurs que l’inspecteur lui-même puisse être parfois sujet à des épisodes anxieux à la veille de certains contrôles.
« C’est un métier difficile car assez solitaire », prévient Laurence Falgua. En effet, une bonne partie de son travail consiste à éplucher des dossiers dans son bureau et préparer ce qu’elle appelle une « vérification ». Un exercice fastidieux auquel s’ajoute régulièrement la complexité technique de certains dossiers ou, plus éprouvant encore, la pression de devoir gérer des situations humaines potentiellement conflictuelles. « Nous devons vérifier des personnes signalées qui peuvent être agressives et pas toujours recommandables », ajoute l’inspectrice qui reconnaît que certaines dossiers peuvent être anxiogènes. « Heureusement, et je touche du bois, je n’ai jamais eu de problèmes sérieux avec une personne vérifiée », assure-t-elle.
« Un contrôle est une procédure très intrusive »
Afin de garantir que le contrôle se déroule de la manière la plus apaisée qui soit, Laurence Falgua compte sur son expérience et, surtout, sur un précieux cocktail d’empathie, de transparence et de pédagogie. « Il est important de se mettre à la place de la personne contrôlée et de ne pas incarner une administration sourde et toute puissante. Car un contrôle est une procédure très intrusive qui peut avoir de lourdes conséquences sur la vie professionnelle et personnelle », précise-t-elle. « J’explique tout ce que je fais, quel est le but et pourquoi nous vérifions ces éléments. Un contrôle qui se passe mal devient rapidement difficile et désagréable car il faut malgré tout aller au but. C’est un travail où les relations humaines sont importantes », insiste-t-elle. Une vision du travail très loin du cliché de l’agent sadique et au zèle pointilleux.
Mais cette approche bienveillante n’est pas toujours suffisante pour faire passer l’amertume et désamorcer les humeurs de mauvais cotisants. « Il arrive qu’on nous fasse des reproches. Certains expriment notamment un sentiment d’injustice par rapport à l’impunité de certaines personnes publiques. D’autres se justifient en expliquant qu’ils sont bien obligés de tricher. Mais on apprend à ne pas prendre cela de manière personnelle. Il faut se protéger sinon on ne dort plus », rapporte Laurence Falgua qui se souvient d’un récidiviste qui fraudait pour payer son précédent redressement. Des situations qui, malgré tout, restent relativement exceptionnelles. « Le but n’est pas de les couler ni de les mettre plus mal qu’ils ne le sont », rappelle l’agent de l’administration fiscale. Mais les clichés ont la vie dure.
Alors forcément, quand Laurence Falgua dévoile son métier à de nouvelles connaissances, les réactions sont rarement enthousiastes. « La réponse la plus courante c’est : ”Il en faut bien”. Mais une fois quelqu’un m’a dit : ”Ça ne m’étonne pas que tu fasses ça”. Je n’ai pas trop su comment le prendre », témoigne l’inspectrice qui admet rester parfois vague sur son activité. Surtout quand elle à l’intuition que « ça ne va pas passer » ou que sa profession risque de déclencher un débat stérile.
« Je ne suis pas là pour me faire bousculer »
En effet, face à un agent du fisc, certains s’empressent de faire le procès de l’État ou de déplorer des taux d’imposition excessifs. Quand d’autres, la confondant avec un conseiller en patrimoine bénévole, sautent sur l’occasion pour lui demander un tuyau en matière d’optimisation fiscale. Des situations qu’elle s’épargne de temps en temps en se contentant de dire qu’elle travaille à la direction des impôts. « C’est vaste et ça reste flou. Après tout, je ne suis pas là pour me faire bousculer », revendique-t-elle.
Mais finalement, cette mauvaise image de l’inspecteur des finances publiques, n’empêche pas Laurence Falgua d’apprécier son métier. « Évidemment, ce n’était pas un rêve d’enfant. Comme beaucoup de petites filles, je voulais être maîtresse ou coiffeuse. D’ailleurs, si l’on m’avait dit que j’exercerais ce métier plus tard, je n’aurais même pas su de quoi il s’agissait », précise-t-elle. C’est bien plus tard, lors de ses études de droit qu’elle suit en partie à Toulouse, qu’elle s’oriente vers le droit public des affaires et, plus précisément, le droit fiscal. « C’était un aspect qui me plaisait et qui me plaît toujours. Le contrôle fiscal est un choix assumé», avance-t-elle. Un métier qui lui laisse le temps de s’occuper de sa famille et dans lequel, même s’il suscite peu de vocation, elle s’épanouit professionnellement.
Commentaires
régis lagrifoul le 13/11/2024 à 13:17
Cette dame m'a l'air d'être une belle personne. La DGFIP a beaucoup de chance...