Depuis le 7 juillet dernier, Jacques Oberti, ancien maire d’Ayguesvives et ancien président du Sicoval, est devenu le député socialiste de la 10e circonscription de Haute-Garonne. Un premier mandat national dont il nous livre les premières impressions. Début à l’Assemblée nationale, nouvelle organisation de travail, premiers dossiers sur la table ; Jacques Oberti revient sur ses premiers pas dans l’hémicycle, dans un climat politique tendu.
Jacques Oberti, vous êtes le député de la 10e circonscription de Haute-Garonne, et vous avez pris vos fonctions à l’Assemblée nationale il y a maintenant presque trois mois. Quelles sont vos premières impressions ?
Le résultat des élections législatives a été prononcé le dimanche 7 juillet au soir. La validation administrative par les services préfectoraux est tombée le lundi, et le mardi 9 juillet au matin, j’étais déjà à l’Assemblée nationale pour prendre mes fonctions, avec très peu de sommeil, je dois l’avouer ! Et c’est impressionnant ! J’étais monté à Paris, j’avais déjà été reçu à l’Assemblée nationale dans le cadre de mes fonctions, mais là, je me retrouve de l’autre côté. Pour autant, ce sentiment-là ne doit pas effacer celui qui consiste à apporter ma pierre à l’édifice en prenant en compte les spécificités du territoire de la 10e circonscription, qui comprend 108 communes et dans lesquelles s’est exprimée une grande diversité de votes.
Et puis, tout a été fait pour que notre accueil soit d’une excellente qualité. Les huissiers et tout le personnel sont d’une humanité, d’une gentillesse, mais aussi d’un professionnalisme et d’une compétence hors du commun. Ils ont tout fait pour que mon arrivée soit facilitée et que je puisse vraiment exercer mon mandat de député au plus vite : découverte des lieux, des fonctions, des différentes parties de l’Assemblée nationale, la question aussi de l’hébergement, celle des procédures… D’autant que je suis le petit nouveau de la bande si l’on peut dire, et même si j’ai beaucoup fréquenté les structures administratives, l’Assemblée nationale a ses propres codes, qu’il convient de connaître.
Depuis votre élection, quels ont alors été vos missions, vos travaux, dans ce contexte si particulier d’un gouvernement démissionnaire ?
Je n’ai pas chômé ! Celles et ceux qui me connaissent, savent que je trouve toujours du travail à abattre. Et, très rapidement, nous avons procédé au vote des responsables de l’Assemblée nationale. Nous avons aussi travaillé, dans les 15 jours qui ont suivi, à constituer les commissions. J’ai eu l’opportunité magnifique de pouvoir être membre de celle des finances. Ensuite, dès la troisième semaine de juillet, dans le cadre de la commission des finances, nous avons été amenés à choisir nos sujets d’investigation, ce que l’on appelle les rapports spéciaux. J’ai obtenu deux sujets en lien avec mon parcours : celui des aides aux entreprises pour en évaluer leur bien-fondé, leur efficience et leur pertinence, et celui de la France très haut débit. Donc, depuis la fin juillet, j’ai récupéré un certain nombre de documents pour travailler sur ces sujets-là, de façon à être opérationnel, dès que le Projet de loi de finances 2025 sortira.
Mon travail a également consisté à mettre en place mon équipe, à recruter mes attachés parlementaires et mes collaborateurs. Tout cela ressemble à une vraie gestion d’entreprise, avec des salariés, des locaux… J’ai aussi pris contact avec toutes les communes de ma circonscription, car j’ai choisi d’aller au contact de nos concitoyens en réalisant des permanences itinérantes pour lesquelles j’ai déjà établi un planning jusqu’au mois de novembre.
Quel regard portez-vous sur le nouveau gouvernement Barnier ? Et quelle attitude aurez-vous face à lui dans l’hémicycle ?
Le gouvernement qui a été choisi par Emmanuel Macron aujourd’hui ne correspond pas aux résultats des Législatives ni au projet que j’ai pu soutenir sur ma circonscription. Pour autant, même si les socialistes vont marquer leur désapprobation par rapport à ce gouvernement, moi, ce que je souhaite, c’est être le plus constructif possible : texte par texte, budget par budget, enveloppe par enveloppe, faire valoir ma parole pour défendre le territoire. Je vais jouer pleinement mon rôle de député : disposer d’une envergure nationale pour servir au mieux mes concitoyens. Je vais m’imprégner des attentes et des préoccupations de ma circonscription pour les porter au niveau national.
Les débats à l’Assemblée nationale vont commencer à la déclaration de politique générale, mardi 1er octobre à 15h, par rapport à laquelle le groupe socialiste travaillera à sa position. Pour ma part, je ne vais pas oublier le front républicain qui s’est manifesté au second tour des Législatives ni les résultats des élections européennes. Dans ma circonscription, il y a eu quand même une très forte adhésion à une ligne de gauche, une gauche républicaine ! Je veux donc promouvoir un socialisme républicain très marqué.
Un socialisme qui prendra ses distances avec La France Insoumise ?
A l’Assemblée nationale, plusieurs groupes constituent une dynamique, avec un programme porté par le Nouveau Front Populaire. Pour ma part, je travaille dans le collectif du groupe socialiste, qui est extrêmement démocratique : ce n’est pas le groupe qui impose, ce sont les députés qui construisent les décisions. Ainsi, si l’on parvient à construire ensemble, entre tous les groupes de gauche, des démarches collectives, nous les respecterons. Nous nous sommes engagés sur un programme et la parole, pour moi, a beaucoup d’importance. Nous défendrons, pied à pied, jour après jour, les orientations de ce programme.
En revanche, ce n’est pas parce que La France Insoumise prend des initiatives que nous sommes d’accord. Concernant la motion de destitution d’Emmanuel Macron, par exemple, lancée par le seul groupe LFI. De notre côté, nous avons estimé qu’il fallait en débattre devant l’Assemblée ; nous n’avons donc pas signé cette motion, mais nos représentants au bureau de l’Assemblée nationale ont voté en faveur de sa recevabilité. Voilà une position qui montre que le groupe socialiste est indépendant. Autre exemple, le cas du Smic à 1 600 euros. Compte tenu des finances, et du fait que nous sommes des personnes responsables, nous savons que nous ne pourrons pas l’obtenir du jour au lendemain sans créer d’énormes difficultés dans le pays. Mais nous souhaitons nous battre pour une revalorisation du pouvoir d’achat de l’ensemble des salariés pour atteindre ces 1 600 euros le plus tôt possible. Il n’y aura pas de grand soir où tout va changer subitement. Le monde est beaucoup plus complexe que cela.
Au-delà du fond, passons à la forme. Vous partagez maintenant votre temps entre Paris et votre circonscription. Comment vous organisez-vous ?
Il y aura très certainement des variations assez importantes d’une semaine à l’autre, en fonction des sujets qui seront abordés à l’Assemblée. Pour ma part, je tiendrai ma place dans l’hémicycle le plus souvent possible. Je serai un député assidu. J’aurai également à auditionner de nombreuses personnalités dans le cadre de la commission des finances. Le reste du temps, je serai dans ma circonscription. Rencontrer les élus locaux fait partie de mes missions, car dans une période où nous risquons un plan d’austérité, les territoires seront inévitablement touchés. Or, le message qui a été renvoyé par nos concitoyens, c’est justement de ne pas réduire la présence des pouvoirs publics, la présence de l’État dans les territoires en matière d’éducation, de santé, d’accès aux services publics locaux, et de sécurité. Concitoyens que je ferai en sorte d’accompagner le mieux possible, dans la limite des moyens et compétences d’un député.
Où avez-vous installée votre permanence ?
Située à Labège, il s’agit en réalité d’une permanence administrative, qui servira pour les auditions dans le cadre de mes travaux parlementaires. Je souhaite être sur le territoire, au contact des gens. Donc, mes permanences se tiendront dans les mairies des villes de ma circonscription, et seront ouvertes aux élus et aux citoyens. J’ai diffusé un programme aux élus locaux à cet effet, qu’ils relaieront à leurs administrés. Une adresse électronique est également ouverte sur laquelle les gens peuvent prendre rendez-vous (jacques.oberti@assemblee-nationale.fr), ainsi qu’un numéro de téléphone (05.61.57.72.67).
Un territoire que vous connaissez bien, pour avoir notamment été maire d’Ayguesvives pendant 10 ans, et président de la communauté d’agglomérations du Sicoval pendant neuf ans. La loi sur le non-cumul des mandats vous a imposé d’abandonner ces fonctions. Le regrettez-vous ?
J’ai entendu beaucoup de députés, et particulièrement des jeunes, issus d’appareils un peu opportunistes, dire que finalement, le cumul des mandats, ce n’était pas si mal que cela. Cela permettait de garder un ancrage territorial. D’autres se sont finalement éloignés de leur territoire, pour devenir uniquement des législateurs à l’Assemblée Nationale. Pour ma part, en restant conseiller municipal à Ayguesvives et conseiller communautaire du Sicoval, je reste très impliqué. Certes, à la place qui est celle d’un élu local, qui participe aux décisions, et non plus d’un maire ou d’un président qui est dans l’exécutif, mais je reste, justement, très impliqué dans la vie locale. Être présents dans ces assemblées délibérantes, me rend également très accessible, parce que tout ne se fait pas avec des rendez-vous par téléphone ou sur Internet.
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