Les syndicats ont appelé les enseignants à la grève et à manifester, notamment à Toulouse, contre deux mesures de la réforme du choc des savoirs ce mardi 10 septembre. Ils demandent également davantage de moyens pour l’éducation.
Une semaine après la rentrée scolaire, l’intersyndicale composée de la FSU-SNUipp, CGT Educ’action et de Sud Education appelle déjà les enseignants à faire grève et à descendre dans la rue ce mardi 10 septembre. Une manifestation était d’ailleurs organisée par les syndicats locaux à Toulouse à 12h30. Si les enseignants se mobilisent, c’est principalement contre une mesure de la réforme du choc des savoirs : la généralisation des évaluations nationales standardisées à tous les niveaux du CP à la seconde, mise en place dès cette semaine. « On appelle les collègues à les boycotter », déclare Jennifer Pelissier, co-secrétaire départementale pour la FSU-SNUipp 31 et enseignante dans le premier degré.
Mises en place, tout d’abord, en 2018 par l’ex-ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer en classes de CP, CE1, 6e et 2nde, ces évaluations permettent de déterminer les compétences des élèves en français et en mathématiques. Mais elles sont loin de faire consensus au sein du corps enseignant. « Leur mise en place est difficile puisqu’on nous impose des évaluations communes, mais nous n’avons pas le temps de discuter entre collègues de la progression des élèves. Et puis, pendant que nous faisons ces évaluations, qui peuvent être source de stress pour les élèves, nous n’enseignons pas », rapporte Sabrina Roche, co-secrétaire départementale pour la CGT Educ’action 31 et enseignante dans le 2nd degré.
Une autre mesure de la réforme du choc des savoirs, tout autant décriée, est également entrée en vigueur en cette rentrée : les groupes de niveau en français et en mathématiques pour les élèves de 6e et 5e. « Cela engendre un tri social et de la violence pour les élèves qui sont directement catalogués en entrant au collège ou en cinquième », dénonce Sabrina Roche qui dénonce également « la casse du groupe classe ». En effet, les collégiens, en français et en mathématiques, sont répartis dans différents groupes selon leur niveau et se retrouvent avec d’autres élèves qui ne sont pas de leur classe. « Casser le groupe classe a un effet délétère sur l’état psychologique des élèves, leur construction sociale et d’eux-mêmes », révèle-t-elle.
Avec ces groupes de niveau, les enseignants se retrouvent, de leur côté, dans « des situations ubuesques ». « Certains de nos collègues sont désignés professeur principal d’élèves qu’ils n’auront pas en classe. Pourtant, un professeur principal est censé être un enseignant référent qui va accompagner les jeunes. Ce qu’il ne peut pas faire s’il ne les connait pas », juge la co-secrétaire départementale pour la CGT Educ’action 31. Au-delà de ça, Jennifer Pelissier fait état d’une « souffrance au travail » chez les enseignants depuis la mise en place de ces groupes de niveau. « L’année dernière, nous avons eu des remontées dans le registre santé-sécurité au travail de collègues de mathématiques et de français qui expliquaient que cette réforme a été très violente pour eux. En tout, nous avons eu plus de 1000 signalements, soit 2,5 fois plus que l’année précédente. Et que fait l’employeur face à cette souffrance professionnelle : rien », s’insurge l’enseignante.
L’avenir ne s’annonce pas plus rose pour les enseignants. « La nomination de Michel Barnier en tant que Premier ministre ne laisse pas présager d’heureux auspices pour l’Education nationale », prévoit Jennifer Pelissier qui fait état d’une rentrée 2024 « sous le signe de l’absence de moyens » en Haute-Garonne. « Un enseignant n’a jamais été nommé dans une SEGPA à Auterive, un n’a pas été remplacé pendant déjà plus de trois jours dans une maternelle à Toulouse, il manque deux accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) à Montréjeau, quatre à Fenouillet… Et malheureusement cette liste n’est pas exhaustive puisque les difficultés touchent l’ensemble du département », note l’enseignante. Dans le second degré, notamment, « peu d’établissements ont fait la rentrée avec tous les enseignants nécessaires », informe Sabrina Roche.
Et, selon Jennifer Pelissier, « la situation ne va pas aller en s’arrangeant ». « Dès ce début d’année, la très grande majorité des titulaires remplaçants ont été affectés à l’année ou sur du remplacement long. Autrement dit, plus personne n’est disponible pour assurer les remplacements de courte durée », constate Jennifer Pelissier. Ce qui lui fait dire « qu’il n’y aura certainement eu un enseignant devant chaque classe que le jour de la rentrée ». Et ce, alors que « le rectorat refuse de débloquer le recrutement de la liste complémentaire du concours de recrutement de professeurs des écoles (CRPE) ». « Nous avons 46 collègues présents sur celle-ci qui attendent d’être recrutés », note l’enseignante qui espère aussi l’embauche de contractuels.
Au-delà de ces mesures, les syndicats locaux veulent « un plan d’urgence pour l’école en Haute-Garonne ». « Nous avons chiffré les besoins à 3000 postes d’enseignants, 1700 pour le premier degré et 1300 pour le second. Il nous faudrait également 500 postes d’AESH, 300 postes d’assistants d’éducation (AED), des personnels médico-sociaux, administratifs et territoriaux en nombre suffisant », liste Jennifer Pelissier. Un besoin conséquent alors que l’Education nationale doit faire face à « un nombre conséquent de démissions ». « On note déjà quatre démissions de professeurs stagiaires dans l’académie de Toulouse », recense la co-secrétaire départementale pour la FSU-SNUipp 31. Et les cours viennent tout juste de reprendre…
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