Jean-Luc Moudenc a proposé, lors de la Cop Occitanie, que la métropole de Toulouse soit la première à adopter la tarification saisonnière de l’eau. Une idée qui suscite l’étonnement de l’opposition qui reproche au président de la collectivité de s’être un peu trop avancé et ne pas en avoir d’abord débattu avec les élus communautaires. Car certains évoquent d’autres pistes pour la préservation de l’eau sur le territoire.
« Une eau plus chère en été pour inciter à l’économiser. » Telle est, en résumé, la proposition de Jean-Luc Moudenc, président de Toulouse Métropole. Une idée de tarification saisonnière de l’eau, qu’il a exposée lors de la Cop Occitanie, la version régionale du sommet pour le climat qui avait lieu le 30 novembre dernier. Selon lui, cette méthode permettra d’aider les usagers à prendre conscience de la nécessité d’une consommation de l’eau raisonnée alors que les périodes de sècheresse sont de plus en plus fortes et longues, et à modifier leur comportement à cet égard. Sans toutefois qu’ils ressentent une différence sur leur facture annuelle.
Robert Médina (groupe des Indépendants), vice-président de Toulouse Métropole, en charge de l’eau et de l’assainissement, explique plus en détail le contenu de cette proposition lors du conseil communautaire qui a lieu ce jeudi 7 décembre. D’abord, il en rappelle le contexte : « Cette mesure est évoquée alors que nous constatons un manque d’eau entre le 1er juin et le 31 octobre. C’est durant cette période qu’une sobriété de consommation est nécessaire. » Pour l’encourager, la majorité métropolitaine suggère donc d’augmenter le prix de l’eau en été et de le diminuer en hiver, afin que les usagers n’en ressentent pas les effets au moment de payer leur facture annuelle. Quant au pourcentage de fluctuation des prix, même s’il n’est pas encore fixé, l’élu évoque « une hausse de 40% l’été et une baisse de 30% l’hiver ». « Des modalités dont nous discuterons en commission et lors de la réunion métropolitaine de l’eau », précise le vice-président.
Une dernière information que sont ravis d’apprendre les membres de l’opposition, quelque peu agacés d’avoir appris l’existence de cette proposition dans la presse. « Nous aurions aimé pouvoir échanger sur le sujet avant votre prise de parole médiatique qui engage la Métropole », lance Karine Traval-Michelet, présidente du groupe Métropole Solidaire Écologique et Démocratique (MSED). D’autant que l’opposition est, et a toujours été, favorable à une gestion de l’eau en régie publique contrairement à la volonté de la majorité qui a choisi de faire appel à un délégataire (délégation de service public), en l’occurrence Véolia. « Avec l’intermédiaire d’un prestataire en DSP, comment pouvez-vous garantir que la facture des usagers ne bougera pas si votre mesure est mise en place ? Quelles seront les modalités de cette tarification saisonnière de l’eau ? » questionne l’élue.
Pire, Thomas Karmann, du groupe Métropole Écologiste, Solidaire et Citoyenne (MESC) accuse Jean-Luc Moudenc de ne vouloir satisfaire que les intérêts de Véolia. « Ça ressemble à un coup marketing pour permettre au délégataire d’équilibrer ses comptes, lui qui misait sur une augmentation de la consommation, qui n’a pas eu lieu », peste l’élu d’opposition. Pourtant, au-delà de valider ou pas la tarification saisonnière de l’eau, ce dernier estime que bien des modalités doivent être envisagées et débattues. « Par exemple, la dimension de justice sociale », argue Thomas Karmann, qui rappelle qu’un mètre cube d’eau ne représente pas les mêmes enjeux en fonction de l’usage qui en est fait et du citoyen qui le consomme : « Il convient de différencier 1 m3 d’eau utilisé pour boire ou se laver, de celui qui est utilisé pour laver une voiture ou remplir une piscine », donne-t-il en exemple. Il propose ainsi la gratuité des premiers mètres cubes et un tarif élevé pour les consommations superflues.
« Je suis étonné de votre étonnement », commente Jean-Luc Moudenc. Car s’il reconnaît, à demi-mot, ne pas avoir ouvert le débat sur cette tarification saisonnière de l’eau lors d’instances démocratiques, il précise que cette mesure n’est qu’une proposition et en aucun cas une décision du président de Toulouse Métropole. « Étant à la tête de l’exécutif, je me dois de donner des idées, sur lesquelles nous débattons ensuite, pour finalement faire un choix. Et c’est ce que j’ai fait ! » explique Jean-Luc Moudenc. Idée qu’il formule suite aux recommandations du Conseil économique, social et environnemental (CESE) « qui préconise une tarification saisonnière plutôt qu’une tarification progressive. Mesure qui est donc plébiscitée par les syndicats et les associations environnementales qui composent le CESE ». Elle sera mise en débat en “commission eau” et lors d’un prochain conseil de Toulouse Métropole, et un travail de concertation et de débat sera mené, sous l’autorité de Robert Médina.
Discussions durant lesquelles il sera question des modalités de mise en place de ce dispositif, et d’une potentielle gratuité, même si la majorité n’y est pas favorable. « Car la gratuité n’a jamais été un vecteur d’économie de l’eau », constate Sacha Briand, vice-président de la Métropole, en charge de la modernisation de la collectivité et des finances. Sans parler de la difficulté à la mettre en place en milieu urbain où le nombre d’habitats collectifs est important : « Ceux à qui s’adresserait ce tarif solidaire ne disposent généralement pas de compteurs individuels et ne pourraient donc pas en bénéficier. » Selon lui, il s’agit-là donc là « d’une mesure, certes généreuse, mais totalement inefficace ». D’autant que, d’après la statistique communiquée par Robert Médina, « l’eau ne représente que 1% du budget des ménages ».
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