Avec son dernier roman graphique “Mémoires de Gris”, l’auteur et illustrateur toulousain Sylvain Ferret a voulu s’attaquer au personnage de Robin des Bois. Un récit ponctué de magie et de noirceur qui va vous transporter dans un monde médiéval où tout n’est pas noir ou blanc.
Et si on ajoutait un côté sombre à Robin des Bois ? C’est ce qu’a fait le Toulousain Sylvain Ferret dans son roman graphique : “Mémoires de Gris”, paru le 23 octobre dernier aux éditions Delcourt. « Je voyais de plus en plus d’histoires sur Robin des Bois sortir et à chaque fois, c’était de plus en plus lisse. On a peur de toucher à ce personnage auréolé du mythe du héros. Il y a presque un côté religieux. Et j’avais envie d’abîmer ce Robin des Bois qui a été transformé, notamment par Disney », raconte l’auteur et illustrateur qui « mûrit cette idée » depuis la bande dessinée “Peter Pan” de Régis Loisel, série sortie dans les années 1990 jusqu’à début 2000. Ce qu’il a réussi à faire dans “Mémoires de Gris”. Ne vous attendez toutefois pas à une adaptation fidèle du récit de Robin des Bois, mais plutôt « très lointaine », indique Sylvain Ferret.
En effet, son roman graphique raconte l’histoire du chevalier Pierre de Brume, ramené à la vie par la guérisseuse Marion. Anciens amants, ces deux personnages sont en proie à des tourments intérieurs, luttant pour se détacher de la violence de leurs pères et pour leur liberté. Mais c’était sans compter sur les épreuves qui vont être mises sur leur chemin : la région de Gris, gagnée par la pauvreté, et ses habitants ne vont en effet pas leur faire de cadeaux. Et si, comme son nom l’entend, tout n’est pas noir ou blanc au sein de cette région, la noirceur est effectivement partout, se reflétant dans la palette de couleurs du roman graphique. Il faut dire que l’auteur et illustrateur a une appétence pour celle-ci.
« J’ai envie de raconter des choses qui me touchent et les histoires tragiques en font partie », confie le Toulousain qui avait déjà pu le démontrer avec son précédent projet en solo “Talion”, une trilogie de science-fiction au style “cyberpunk gothique” dans laquelle le monde vit son dernier effondrement écologique. Cette fois, avec “Mémoires de Gris”, Sylvain Ferret explore le passé, précisément l’époque médiévale, et y ajoute un soupçon de magie. « L’histoire se déroule au Moyen Âge, au temps des croisades dans une sorte de XIIe siècle, et dans une région qui ressemble un peu à la France. Mais tout est fictif », souligne Sylvain Ferret qui apprécie d’avoir de « la liberté » dans le dessin. Le château que l’on peut voir dans “Mémoires de Gris”, n’existe donc pas dans la réalité et ne s’inspire, d’ailleurs, d’aucun autre.
« Inventer un château, c’est quand même plus fun que d’en recopier un », estime le Toulousain qui a, tout de même, voulu rester proche du réel dans ses dessins. « Je ne voulais pas que ça ressemble à du Tolkien (auteur notamment du “Seigneur des Anneaux”, NDLR). J’avais envie qu’il y ait un ancrage historique », déclare-t-il. Et, pour l’histoire en elle-même, le Toulousain s’est inspiré, outre le personnage de Robin des Bois, de « plein de récits », comme le mythe de la sorcière, mais également de séries médiévalistes à l’instar de “Game of Thrones” ou encore du jeu vidéo “Dark Souls”. Ce qui devrait être particulièrement parlant pour les lecteurs de la génération de Sylvain Ferret, né en 1989.
Côté personnages, l’auteur les a voulus très travaillés. Et il n’a pas fait l’impasse sur les personnages féminins. « Tout d’abord, mes histoires doivent passer le test de Bechdel (celui-ci repose sur trois critères : il doit y avoir au moins deux femmes nommées dans une œuvre, qui parlent ensemble et de quelque chose qui est sans rapport avec un homme, NDLR). Et puis, surtout, je n’avais pas envie que Marion, le personnage central de l’histoire, soit juste une femme au milieu d’hommes et que toutes ses problématiques soient liées à eux », révèle-t-il. Il en est d’ailleurs de même pour les autres personnages féminins qui sont loin des stéréotypes de genre.
Il faut dire qu’avec ce roman graphique, Sylvain Ferret souhaitait « toucher un public davantage féminin », comparé à “Talion”, même si cet ouvrage « parle aussi d’oppression patriarcale ». Mission réussie, selon lui. « Au festival “Quai des Bulles” à Saint-Malo, je me suis retrouvé avec au moins 50% de lectorat féminin. Et ça m’a amené une forme de libération », sourit le Toulousain qui travaille sur une toute autre histoire actuellement. D’ailleurs, il n’a pas prévu de suite à “Mémoires de Gris”. Il faudra donc apprécier ce seul numéro. D’autant que, pour son prochain ouvrage, Sylvain Ferret fait un retour dans le futur puisque ce sera de nouveau de la science-fiction.
Dans la région de Gris, épuisée par les taxes liées à une guerre lointaine, le chevalier Pierre de Brume est ramené à la vie par la guérisseuse Marion, son ancienne amante qu’il a abandonnée des années auparavant. Malheureusement, ils sont rattrapés par leur passé et la violence qu’ils ont toujours fuie.
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