À Lannemezan, la zone industrielle de Peyrehitte se développe, et avec elle, les inquiétudes des riverains qui s’interrogent quant aux émissions polluantes des entreprises qui s’y installent. Devant ces préoccupations, la préfecture et les acteurs locaux ont missionné Atmo Occitanie, l’agence régionale de la surveillance de la qualité de l’air, pour déployer un dispositif inédit de mesures et en observer les résultats. Plus de détails.
En pleine expansion depuis plusieurs années, la zone industrielle de Peyrehitte, située sur le plateau de Lannemezan (Hautes-Pyrénées), qui accueille pour l’instant une quarantaine d’entreprises, poursuit son essor. L’arrivée de nouvelles activités de production et de combustion a ravivé les inquiétudes des habitants quant à l’impact environnemental et sanitaire de ces installations. Face à ces préoccupations, d’autant plus légitimes que le département est celui qui enregistre le plus d’épisodes de pollution en Occitanie, les autorités et les acteurs locaux ont décidé de mettre en place un suivi renforcé de la qualité de l’air, confié à Atmo Occitanie, organisme indépendant spécialisé dans ce domaine.
C’est en juillet 2025, à l’initiative du préfet, qu’une commission de suivi dédiée au site de Peyrehitte a été créée. Dès sa première réunion, elle a validé la création d’un observatoire spécifique de la qualité de l’air sur le plateau de Lannemezan. L’objectif est clair : offrir une vision transparente et indépendante de l’état de l’air respiré par les habitants et accompagner le développement industriel dans un cadre maîtrisé.
Un partenariat tripartite a ainsi été signé pour trois ans. Il associe les entreprises implantées sur le site, les collectivités locales et les services de l’État, avec l’appui scientifique et technique d’Atmo Occitanie. Ce protocole doit permettre de dresser un état initial, puis de suivre l’évolution de la situation au fur et à mesure que de nouvelles activités verront le jour.
Le dispositif mis en place se distingue par sa combinaison d’outils. Un site principal équipé de capteurs en continu fournira, heure par heure, en temps réel, des données sur les polluants réglementés (oxydes d’azote, particules fines PM10 et PM2.5). Dès 2026, les mesures s’élargiront aux particules ultrafines, encore peu suivies, mais de plus en plus considérées comme préoccupantes pour la santé.
En parallèle, des prélèvements sur filtres seront effectués en cinq sites différents, sur les communes de Lannemezan et La Barthe-de-Neste, afin de compléter l’analyse par des campagnes saisonnières. Ces stations mesureront le dioxyde de soufre, l’acide chlorhydrique, le benzène, ainsi que la présence de métaux lourds, dioxines et furanes dans l’air et les retombées atmosphériques. Ces informations permettront d’identifier plus précisément l’origine des émissions et leur évolution dans le temps.
Enfin, le programme prévoit la réalisation, en 2027, de cartographies de la pollution atmosphérique (dioxyde d’azote et particules). Ces cartes permettront de repérer les zones les plus exposées et d’évaluer combien d’habitants pourraient être concernés par des dépassements des seuils sanitaires fixés par la réglementation.
Le plateau de Lannemezan présente une configuration particulière, où plusieurs sources de polluants cohabitent. Sur le plan industriel, on retrouve notamment Arkema, producteur d’hydrazine, Knauf Insulation, spécialisé dans les isolants, Dalkia avec une chaufferie alimentée en CSR (combustibles solides de récupération), ou encore PSi Environnement, fournisseur de CSR. Ces activités rejettent des oxydes d’azote, du dioxyde de soufre, des particules, du benzène, des acides et divers métaux lourds.
À ces rejets s’ajoutent les émissions issues de la vie quotidienne : le chauffage résidentiel, en particulier au bois, reste la première source de particules fines ; le trafic routier, très présent dans la zone, constitue la principale origine des oxydes d’azote ; enfin, le brûlage des végétaux, contribue aussi à la dispersion de particules et de composés toxiques.
Cette superposition d’activités rend l’évaluation d’autant plus nécessaire. Les autorités reconnaissent d’ailleurs que les connaissances actuelles sur l’exposition réelle des habitants, notamment aux particules fines et ultrafines, demeurent limitées.
La transparence est au cœur du dispositif. Atmo Occitanie publiera progressivement les données collectées sur son site Internet. Les premières informations en temps réel sur les polluants réglementés seront disponibles dès novembre 2025, suivies en janvier 2026 par celles sur les particules très fines et ultrafines.
Un premier rapport d’étape est attendu à la fin de l’année 2025, tandis que le rapport annuel complet sera rendu public au deuxième trimestre 2026. Par ailleurs, des réunions régulières sont prévues pour partager les résultats avec les habitants, les élus et les associations locales.
Les habitants pourront ainsi suivre l’évolution de la situation au fil des ans, jusqu’en 2028, date à laquelle l’ensemble du programme livrera ses conclusions finales.
Ce suivi renforcé illustre la volonté d’associer tous les acteurs concernés (collectivités, industriels, services de l’État et citoyens) autour d’un objectif commun : comprendre et maîtriser l’impact des activités humaines sur l’air du plateau de Lannemezan.
Comme le souligne Atmo Occitanie, le programme vise à « évaluer si les concentrations de polluants suivis dépassent localement les valeurs limites pour la protection de la santé ou de l’environnement » mais aussi à « mieux identifier la contribution des différentes sources de polluants : industriels, moyens de transport, dispositifs de chauffage ».
L’enjeu dépasse le seul cadre réglementaire : il s’agit d’apporter aux riverains une information fiable et régulière, et d’aider les décideurs à orienter leurs choix d’aménagement du territoire.
Commentaires