Placé en liquidation judiciaire en 2024, le Stade Toulousain Tennis, ou plus précisément son ancien président, est épinglé par la Chambre régionale des comptes. Le rapport dénonce des subventions publiques détournées, une dépendance financière à ses filiales commerciales et une gouvernance concentrée entre les mains d’un seul dirigeant.
La liquidation judiciaire du Stade Toulousain Tennis (STT), prononcée en mai 2024, trouve désormais une explication plus précise. Dans un rapport rendu public, la Chambre régionale des comptes (CRC) Occitanie détaille des dérives de gestion et des pratiques financières contestées, qui ont précipité la chute de ce club phare du tennis régional.
Installé aux Sept-Deniers depuis 1981, le STT s’était imposé comme un acteur majeur en Occitanie, fort de ses 1 000 adhérents et de tournois prestigieux, comme un ATP Challenger organisé en 2022. Mais derrière ce succès sportif, la CRC révèle un système opaque mêlant subventions détournées, conflit d’intérêts avec ses filiales commerciales et gouvernance verrouillée par un seul dirigeant.
Entre 2019 et 2024, l’association a bénéficié de près de 946 000 euros de financements publics et 580 000 euros de dons et mécénat. Pourtant, une partie de ces fonds a servi à alimenter la filiale commerciale STATEN, qui gère les activités commerciales lucratives (l’exploitation d’un restaurant bar café, la vente d’articles de sport, la location de salles et l’organisation de séminaires, la réalisation de prestations de publicités…), en contradiction avec les textes et conventions en vigueur.
La CRC souligne notamment que des subventions d’investissement versées par la Région, le Département et la Mairie de Toulouse, destinées à l’association, ont été rétrocédées à l’entreprise STATEN. Des agissements par lesquels la Ville rose estime avoir été « trompée » et contre lesquels elle aurait décidé de porter plainte, comme le rapporte la Chambre. Ces pratiques brouillent les frontières entre gestion associative et activité commerciale, et mettent en cause l’utilisation d’argent public.
Une situation que la CRC illustre encore par un marché public de visibilité conclu par la Mairie pour apparaître comme le partenaire majeur de l’Open de Tennis de Toulouse 2022, réglé directement sur le compte de cette société. « Ce marché, d’un montant de 39 900 € HT, n’a pas bénéficié à l’association STT. Il a été payé par la Mairie de Toulouse sur le compte de la SARL STATEN alors que la facture a bien été émise par l’association STT (sans mention de TVA). Ce paiement constitue une irrégularité puisque le marché est conclu avec l’association et non avec la société commerciale », précise la Chambre. « Une erreur d’aiguillage », répond la Mairie.
Le rapport indique aussi que la dépendance financière du club à l’égard de STATEN était telle que les transferts de trésorerie, refacturations impayées et annulations de dettes ont mené à une créance de 716 000 euros en mai 2024, cause immédiate de la cessation de paiements.
La juridiction financière dénonce également une gouvernance verrouillée. Le conseil de gestion, prévu par les statuts, n’a jamais été convoqué, et les assemblées générales ont été privées d’informations essentielles. Dans ce contexte, la CRC relève que « les organes statutaires ont été neutralisés et le pouvoir s’est concentré entre les mains d’un seul dirigeant », l’ancien président du club Marc Tiersonnier, également ex-gérant de STATEN et d’une autre filiale.
Autre anomalie : la non-publication des comptes, pourtant obligatoire, et l’absence de procédures de contrôle sur les conventions réglementées. Ces manquements ont favorisé des décisions prises hors cadre : « Les avantages [à Marc Tiersonnier] ajoutés à ses salaires constituent une charge de 614 000 € sur la période allant de 2020-2021 à 2023-2024 », précise la CRC. Sans compter des conventions de trésorerie irrégulières.
Si l’association a été relancée en août 2024 par une nouvelle équipe bénévole, le rapport de la CRC vient rappeler l’ampleur des dérives financières et organisationnelles qui ont conduit à la faillite d’un club autrefois emblématique du tennis toulousain.
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