La chambre régionale des comptes Occitanie a publié un audit sur le dispositif des billets de TER à un euro mis en place par la Région Occitanie. Si l’offre booste la fréquentation, son coût repose surtout sur le contribuable et son impact environnemental est nuancé.
La chambre régionale des comptes (CRC) Occitanie a rendu public ce jeudi 4 septembre un audit flash sur les offres de billets de train à un euro, mises en place par la Région Occitanie. Cet examen, mené sur la période 2019-2024, est le premier à évaluer en détail ce dispositif emblématique de la politique ferroviaire régionale.
« L’origine de cette offre remonte à l’ancien président du Languedoc-Roussillon, Christian Bourquin, qui avait lancé le dispositif sur des lignes de bus des Pyrénées-Orientales, avant de l’étendre à des trajets en TER peu fréquentés en 2011 », raconte Sébastien Clos, vérificateur à la CRC Occitanie. La mesure a ensuite été développée dans toute l’Occitanie, sous la présidence de Carole Delga.
La collectivité a fait le choix d’une offre unique en France par son ampleur, avec plus de 2,7 millions de billets écoulés en 2023. Elle est déclinée de cinq façons : premiers week-ends du mois, offre estivale pour les moins de 27 ans, billets en cas de pic de pollution, lignes historiques (avec billets accessibles à tous) et des billets contingentés (proposés sur des trains et horaires les moins fréquentés). Certaines ont été intégrées progressivement, parfois avant d’être officialisées. Ainsi, l’offre jeunes, par exemple, ne figure toujours pas dans la convention ferroviaire en vigueur.
Sur la période étudiée, la fréquentation du réseau régional a progressé de 68%, un record national. Selon l’audit, les offres à un euro ont contribué à un quart de cette hausse.
Le dispositif du premier week-end du mois est le plus efficace : il a généré 47% de voyages supplémentaires par rapport aux week-ends ordinaires au premier semestre 2024. L’offre à destination des jeunes, valable en été, affiche également de bons résultats. En revanche, les lignes dites “historiques” sont peu fréquentées, à l’exception de la liaison vers le Grau-du-Roi.
Pour autant, le train reste peu utilisé en Occitanie. Le ratio voyageurs-kilomètres par habitant, qui indique à la moyenne de kilomètres parcourus en train par chaque habitant sur une année, s’élève à 248. Ce qui place la région en avant-dernière position, devant la Nouvelle-Aquitaine.
En revanche, le taux d’occupation des trains atteint 39%, le meilleur du pays, traduisant un paradoxe : moins d’usagers, mais des rames bien remplies.
L’audit confirme le choix politique d’une prise en charge majoritaire par le contribuable. En 2023, les dépenses de fonctionnement liées au ferroviaire ont atteint 466 millions d’euros, soit près d’un quart du budget régional. Les recettes commerciales ne couvrent que 23,4% des coûts, le ratio le plus faible de France.
Le coût spécifique des billets à un euro est évalué à 9,1 millions d’euros par an, essentiellement en pertes de recettes, car les trains circulent avec ou sans ces offres. Cela représente environ 10% des recettes commerciales du TER et 2% du coût global d’exploitation. Le prix moyen d’un billet en promotion s’élève ainsi à 3,40 euros en 2023.
« La Région n’a pas calculé le coût des dispositifs avant leur mise en œuvre. Elle a procédé par expérimentations successives », a révélé Valérie Renet, présidente de la CRC.
Le rapport souligne que les billets à un euro ont un effet limité sur le report modal, c’est-à-dire l’abandon de la voiture au profit du train. Une enquête menée en 2022 montre que seulement 12% des voyageurs auraient utilisé leur véhicule si l’offre promotionnelle n’avait pas existé.
La Région Occitanie vise 100 000 voyageurs quotidiens dans ses trains d’ici à 2032, contre 80 000 actuellement. Les billets à un euro ont contribué à renforcer l’attractivité du réseau, mais ils ne suffisent pas à eux seuls à changer les habitudes de mobilité.
« Le tarif n’est pas le principal frein à l’usage du train. La qualité du service prime », souligne Valérie Renet. Or, le service ferroviaire en Occitanie reste en dessous de la moyenne nationale en matière de ponctualité et de fiabilité, avec des taux autour de 80 à 85%.
Sur l’impact environnemental, le bilan est aussi contrasté. Les offres jeunes et week-ends permettent de remplir des trains déjà en circulation, sans émissions supplémentaires. En revanche, les lignes historiques à traction thermique affichent des émissions de CO₂ comparables à celles de la voiture, car elles sont peu fréquentées, limitant l’intérêt écologique du dispositif.
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