Alors que la délégation française a déjà décroché dix médailles aux Jeux paralympiques de Tokyo, Bernard Darrées, le président du Comité régional handisport Occitanie fait le point sur l’accessibilité dans la région. Manque d’équipements, pratique féminine et haut niveau…
Comment vivez-vous cette XVI édition des jeux paralympiques de Tokyo ?
Bernard Darrées. Excellemment. La France démarre très bien ces jeux et a déjà ramassé pas mal de médailles. Je suis notamment enchanté de la performance de l’équipe de rugby fauteuil qui, en s’inclinant de seulement deux points contre le champion en titre, obtient un résultat au-delà de nos espérances. L’équipe est prête et c’est la preuve que le travail de la fédération et des comités régionaux a été efficace. Il faut encore confirmer cette bonne entrée en matière.
Qu’attendez-vous de ces jeux ?
B.D. J’espère que nous ferons aussi bien, voire mieux, que lors de l’édition de Rio où l’équipe de France avait glané 28 médailles dont 9 en or. Si nous pouvions ramener un titre olympique en Occitanie, alors ce serait parfait. Mais l’objectif est essentiellement de démontrer ce que peut apporter le sport au handicap. Comment le sport peut inciter à se dépasser pour approcher le niveau d’athlètes valides.
Sur les 138 athlètes de la délégation française, seulement neuf sont originaire d’Occitanie. Est-ce suffisant ?
B.D. C’est un des points faibles de notre région. Pourtant, avec 3 000 pratiquants, nous sommes la troisième région en nombre de licenciés handisport. Le souci, c’est que nous avons du mal à transformer l’essai pour former des athlète de haut-niveau. Principalement parce que beaucoup restent dans une pratique de sport loisir ou se tournent vers des sports de pleine nature qui ne sont pas représentés aux Jeux Paralympiques. Aujourd’hui, les jeunes sont plus attirés par le Fauteuil de descente ou Fauteuil tout terrain (FTT), le handi-bike, la nage en eau libre ou le golf. Mais nous multiplions les événements pour déceler les jeunes à fort potentiel.
Sept des neuf athlètes occitans pratiquent dans la Haute-Garonne. Est-ce le reflet d’une inégalité territoriale d’accès au sport pour les personnes handicapées ?
B.D. Nous rencontrons effectivement des difficultés dans les territoires ruraux. Notamment en raison des distances et de l’éloignement des pratiquants avec les équipements adaptés. Il est facile de trouver un club handisport dans les métropoles ou les villes moyennes comme Tarbes, Rodez ou Perpignan. Mais dans le Gers, le Lot ou la Lozère, c’est plus compliqué. Les personnes handicapées sont là, avec le désir de pratique, mais nous avons du mal à leur offrir quelque chose. Pour remédier à cela, la Fédération française handisport est en train de revoir son modèle de reconnaissance des clubs. Désormais, les clubs pourront adhérer à la fédération avant de mettre en place une section dédiée. Ainsi, au lieu de se débrouiller seul dans ses premiers pas, le club demandeur recevra un accompagnement gratuit d’un an pour se professionnaliser dans l’accueil des jeunes en situation de handicap.
Comment expliquez-vous qu’il n’y ait aucune femme parmi les athlètes originaires d’Occitanie ?
B.D. C’est un phénomène assez curieux qui est spécifique aux régions situées au sud d’une ligne entre Lyon et Bordeaux. Les régions au nord ne connaissent pas une disparité aussi marquée. Pourtant, sur le terrain, nous avons beaucoup de femmes qui pratiquent le handisport. Mais elles ont moins la volonté de s’engager en compétition et beaucoup se contentent d’une pratique de loisir ou de santé. C’est aussi un problème qui touche particulièrement les sports olympiques. J’étais il y a quelques jours sur un événement de fauteuil de descente et il y avait pratiquement autant de femmes que d’hommes pour se lancer.
B.D. Quelles sont les pistes a explorer pour développer le handisport ?
Tout d’abord, il y a évidemment une question de visibilité. En Espagne ou en Italie, les jeux paralympiques bénéficient du même temps d’antenne que les jeux des valides. Or, on sait bien que la télé est un facilitateur. Par ailleurs il est impératif de travailler avec les municipalités pour accélérer et surveiller la mise en accessibilité des équipements car l’accueil est fondamental. Même si c’est difficile pour des petites communes. Par exemple, pour rendre accessible une piscine, il faut adapter les toilettes, mettre en place des rampes et installer un fauteuil de mise à l’eau. C’est un investissement pour, parfois, seulement deux ou trois personnes. Mais si on veut que les personnes handicapées puissent faire du sport, c’est la direction à prendre. Surtout, il faut garder à l’idée que c’est un investissement gagnant. En effet, le sport santé est fondamental pour le handicap. Il prémunit contre les escarres et d’autres problèmes de santé qui finissent par coûter cher à la sécurité sociale. Si l’on prend tout en compte, le bilan est positif.
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