Une fois par semaine, la halte-répit de Cornebarrieu, un lieu convivial d’accueil pour personnes âgées atteintes de maladies neurodégénératives, ouvre ses portes durant un l’après-midi. Ce dispositif permet de donner un peu de temps libre aux aidants. Trois heures de liberté inestimables.
Comme tous les lundis après-midi, Marie-Claire dépose sa mère Bernadette au Foyer de l’Aussonnelle, où celle-ci retrouve ses nouveaux amis de la halte-répit. Paulette, Daniel et Lucie sont tous, bien qu’en bonne forme physique, des personnes âgées atteintes d’une pathologie neurodégénérative. Accompagnés par des bénévoles et encadrés par deux professionnels de santé, ils s’apprêtent à passer une demi-journée à jouer aux jeux de société.
« C’est un dispositif expérimental lancé il y a deux ans par le Conseil départemental sur le principe d’une structure de jour non médicalisée. Il permet non seulement aux personnes accueillies, en début de maladie, de rompre avec l’isolement, mais également d’alléger le quotidien des aidants familiaux », présente Véronique Volto, vice-présidente du Conseil départemental en charge de l’aide sociale pour les seniors. « C’est très important pour les aidants qui bénéficient ainsi d’une après-midi pour s’occuper d’eux-mêmes, aller chez le coiffeur, ou retrouver leurs activités et leurs loisirs, sans s’angoisser. C’est une bulle d’air. Parfois, ce répit leur permet simplement de prendre un rendez-vous chez le médecin », souligne Marine Fabre, responsable de la halte-répit et ergothérapeute de formation.
Dès 14 heures, les premiers participants sont là. Certains sont venus avec un proche, mais la plupart profitent d’un service de transport adapté. « Le transport, c’est fondamental ! Il faut que cela soit le plus commode possible pour les aidants », précise Michelle Dubernat, la directrice adjointe d’Alliance Sages-Adages (ASA), une association de services, d’aide et de soins à la personne conventionnée par le Département pour gérer la halte-répit. En effet, tous les aidants n’ont pas forcément la disponibilité pour accompagner leur proche et, surtout, ce gain de temps leur permet de mettre à profit la moindre minute. Leur vie se résumant souvent à une inéluctable course contre la montre.
Aujourd’hui, comme lors des vacances scolaires, les enfants du centre de loisirs associé à l’école voisine sont invités à partager le goûter. « Le lien intergénérationnel est intéressant. Les enfants dynamisent les personnes âgées qui échangent davantage que lorsqu’elles restent entre elles. Les jeunes, eux, découvrent des histoires, des métiers ou des jeux qui n’existent plus. L’apprentissage est à double sens », constate Marine Fabre.
« Le dispositif permet de rompre avec l’isolement et d’alléger le quotidien des aidants familiaux »
Une demi-heure plus tard, enfants et personnes âgées se retrouvent par groupes autour d’un jeu de société. Paulette organise la partie de petits chevaux alors que Lucie et Bernadette défient deux jeunes garçons au Mikado. La partie s’avère rapidement inégale et le petit Rémi doit régulièrement rappeler les règles à ses aïeules. Toutefois, celui-ci prend les choses avec philosophie : « On les aide un peu à jouer. » Pour satisfaire les gourmands, Marine Fabre a préparé de grandes assiettes de crêpes qui font le bonheur de tous. « C’était rigolo de partager le goûter. Je leur ai aussi appris à jouer à poule-renard-vipère », témoigne Isayah qui envisage déjà de partager une partie de foot ou de basket.
Mais la fin d’après-midi approche et les enfants doivent reprendre la route du centre de loisirs. « Je les aime bien », se réjouit Daniel, qui vient régulièrement mais reconnaît avoir peu de souvenirs des activités. « Malgré le fait que ça tourne beaucoup, il y a une ambiance familiale. Remuante avec les enfants, mais somme toute assez sympathique. Aujourd’hui, nous avons joué avec eux, même si c’est un peu mélangé, tout ça », rajoute-t-il. Pour profiter de la dernière heure, les accompagnateurs proposent une séance de gymnastique adaptée et quelques exercices de ballons pour stimuler les réflexes.
« Cela m’apporte trois heures de liberté »
En fin de journée, venue récupérer sa mère, Marie-Claire est à l’heure. Le visage marqué par la fatigue, celle-ci témoigne de la difficulté de sa situation et de l’intérêt du dispositif : « Cela m’apporte trois heures de liberté. Pour moi, ce n’est pas assez long. S’ils pouvaient l’accueillir deux jours, ça serait bien. Le plus dur, c’est de toujours tout assumer et l’impossibilité de déconnecter de cette responsabilité. » Après seulement une année et demie consacrée à soutenir sa mère atteinte d’Alzheimer, Marie-Claire est épuisée. Elle répète plusieurs fois le mot avant de conclure la voix brisée : « À l’âge que j’ai, je voudrais être libre et faire d’autres choses. » L’émotion l’empêchera d’aller plus loin.
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