Un futur époux avait cru possible de demander à son notaire d’inclure dans son contrat de mariage qu’il ne souhaitait pas verser une quelconque prestation compensatoire à son épouse dans l’hypothèse d’un divorce. Précaution nulle et non avenue a déclaré la Cour d’appel, saisie du litige. Avait été également annulée la clause libertine d’infidélité réciproque comme contraire à l’article 212 du Code civil qui impose aux époux l’obligation de fidélité. Pour remonter dans le passé, les tribunaux avaient annulé de la même manière la clause du contrat de mariage exigée par Sacha Guitry qui imposait, en cas de divorce, la restitution de ses somptueux cadeaux de mariage. Ces exemples montrent à quel point le mariage génère un véritable statut auquel il est très difficile d’échapper par le biais de clauses particulières. Ces exemples prouvent qu’il y a lieu de réfléchir lorsqu’il s’agit de faire un choix entre l’union libre, le PACS ou le mariage. Seul le mariage fait peser sur votre tête, la prestation compensatoire.
Au terme de l’article 270 du Code civil, « le divorce met fin au devoir de secours entre époux ». Ainsi, l’époux condamné à verser une pension alimentaire pendant la procédure de divorce ne la doit plus dès que le divorce est définitif mais il sera assujetti à une prestation compensatoire. Cependant, pension alimentaire et prestation compensatoire ne se cumulent pas.
« La législation actuelle est heureusement plus ouverte »
La loi du 26 mai 2004 a voulu que la prestation compensatoire ne soit pas conditionnée par les griefs. Le Juge examine seulement « les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre ». L’article 271 du Code civil donne les critères les plus probants : la durée du mariage, l’âge et l’état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelle, le fait d’avoir favorisé la carrière professionnelle du conjoint, les perspectives en matière de retraite et les patrimoines estimés et prévisibles des époux. La Loi a encadré ce versement : « cette prestation a un caractère forfaitaire. Elle prend la forme d’un capital dont le montant est fixé par le Juge ». Ainsi, la prestation n’est plus une rente mensuelle sans limitation de durée mais un capital. L’article 275 du Code civil permet cependant au débiteur de demander de se libérer de ce capital sous forme de versement périodique indexé dans la limite de huit années.
Dans le cadre d’une requête conjointe sur la base de l’article 250 du Code civil, ce sont les parties elles-mêmes qui peuvent arbitrer le montant de la prestation compensatoire. Ils soumettent un montant précis au Juge qui homologue le montant proposé. Le Juge a cependant la possibilité de refuser l’homologation s’il estime qu’un des conjoints est lourdement lésé.
Sous l’emprise des lois précédentes, il était très difficile de supprimer ou de réduire les prestations compensatoires. La législation actuelle est heureusement plus ouverte : « Le débiteur peut demander la révision en cas de changement important de sa situation ». Il doit pour cela saisir le Juge aux affaires familiales du domicile de son ex-conjoint. Cette saisine est à risque très limité puisque le Juge ne peut que soit maintenir la prestation, soit la diminuer, soit la supprimer.
L’article 280 du Code civil stipule « A la mort de l’époux débiteur, le paiement de la prestation compensatoire est prélevé sur la succession ». Cet article a été vivement discuté et contesté lors du vote de la Loi. Les héritiers ont cependant toujours le droit soit de refuser la succession, soit de l’accepter sans faire procéder à un inventaire.
A l’heure actuelle le mariage est le premier pas vers le divorce. Attention cependant au deuxième pas vers cette liberté. Ce dernier peut s’appeler la prestation compensatoire, à moins bien entendu que vous n’optiez pour le PACS ou pour l’union libre…
CV :
Avocat au barreau de Toulouse, spécialiste du droit de la famille, du droit public, du droit civil et du droit des étrangers.
Conseiller délégué honoraire de la Ville de Toulouse.
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Cabinet Jean-Paul Escudier
10 rue des Potiers à Toulouse
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Commentaires
Rodon le 20/09/2024 à 04:10
Si j'avais connu les lois telles que je les connais (un peu mieux aujourd'hui), jamais je ne me serais marié. Même pas avec un pistolet pointé sur la tempe.
Mes qualifications professionnelles (donc mon salaire) étant largement supérieures à celles de mon épouse, cela suffisait à me faire vivre avec une épée de Damoclès sur la tête pour le restant de mes jours. Avec le mariage je devenais la victime d'un chantage institutionnalisé: " si tu bouges, si tu ne lui fais pas toutes les courbettes qu'elle désire, si tu ne dis pas amen à ses désirs, alors on t'exécute ". Elle par contre pouvait tout se permettre puisque gagnante dans tous les cas. Je ne le savais pas mais elle elle le savait dès le début ... Tout ce que je lui ai laissé par le biais de la communauté réduite aux acquêts: j'en ai mis 3 fois plus qu'elle au pot commun pour au final en récupérer moins qu'elle. La communauté réduite aux acquêts est vraiment un sacré piège malintentionné tendu par les pouvoirs publics à tous les hommes.
Au 21ème siècle je ne comprends même pas pourquoi les pouvoirs publics ne suppriment pas le mariage. C'est un système totalement immoral qui permet à l'un des conjoints (le moins qualifié) de s'enrichir sur le dos de l'autre, non seulement il profite de l'autre pendant le mariage mais il profite aussi des efforts et des sacrifices que l'autre a consenti pendant sa jeunesse pour passer concours et diplômes. Immoral et anti républicain car opposé au concept de méritocratie, le mariage devrait disparaître du code civil. A chacun selon ses mérites !