Au-delà de la question du Pass sanitaire, les contrôles d’identité qui accompagnent la vérification de la validité du document, notamment à Toulouse plages, ne passent pas auprès de certains usagers. Ces dernières dénoncent des contrôles abusifs et illégaux. Qu’en est-il ?
Afin de s’assurer de la concordance entre le Pass sanitaire et l’identité de son détenteur, de nombreux organisateurs d’événements opèrent des vérifications d’identité. C’est le cas, notamment, de Toulouse plages où les agents chargés de la sécurité demandent aux personnes souhaitant accéder aux animations déployées sur la Prairie des Filtres, de présenter un document justifiant de leur identité. Une démarche qui a choqué certains usagers. Ces derniers s’étonnent du zèle de ces employés et s’interrogent sur la légalité de cette pratique.
« Ce n’est pas un contrôle au sens pénal mais une simple vérification d’identité. Il n’y a aucune conséquence administrative et il n’est pas obligatoire de justifier de son identité avec une carte d’identité. N’importe quel document où figure le nom et la photo de la personne, comme une carte de métro ou d’étudiant, suffit », nuance la mairie de Toulouse qui rappelle que cette mesure fait partie des instructions données par le gouvernement dans le cadre de la mise en œuvre du Pass sanitaire.
« Toute preuve sanitaire doit être vérifiée avec un justificatif d’identité afin de s’assurer de la concordance entre la preuve sanitaire présentée et l’identité du participant. Il ne s’agit pas d’un contrôle de relevé ou de vérification au sens du code pénal », formule d’ailleurs le gouvernement dans une Foire aux questions à l’usage des professionnels.
Néanmoins, le Ministère de l’intérieur à nuancé cette directive dans une réponse adressée à nos confrère de Sud-Ouest en rappelant que « seuls les agents mentionnés à l’article L. 3136-1 du Code de la santé publique, tels que les officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire, les agents de police judiciaire adjoints, les polices municipales…, peuvent solliciter des personnes se trouvant dans un lieu contrôlé un justificatif d’identité, afin de s’assurer que le porteur du passe présenté en est bien le titulaire ». Deux instructions contradictoires émanant des autorités qui déroutent de nombreux organisateurs et sur lesquelles la préfecture de Toulouse, également contactée, n’a pas été en mesure d’apporter un éclairage précis.
« Le code pénal encadrer strictement le contrôle d’identité et, à l’exception de certaines situation où il peut y avoir une délégation de cette compétence, seuls les Officiers de police judiciaire (OPJ) et leurs adjoints sont habilités à opérer de tels contrôles », confirme Manuela Brillat, présidente de l’association Plaider les droits de l’Homme (Pldh). Une délégation qui peut concerner la police municipale mais en aucun cas des sociétés privées comme celles chargées de la sécurisation de Toulouse plages.
Sur la nuance entre contrôle et vérification, cette avocate spécialiste des libertés fondamentales rappelle que la loi définit précisément le caractère de la procédure. « Il y a trois niveaux. Le relevé d’identité, qui peut être opéré par la police municipale. Le nom de la personne est alors simplement noté, par exemple dans le cadre de la rédaction d’un procès-verbal. Le contrôle d’identité, qui doit effectivement être réalisé par un OPJ. Et, la vérification d’identité qui peut consister à retenir une personne dans un commissariat dans une limite de quatre heures pour s’assurer de la validité des documents présentés. C’est la procédure la plus lourde et elle doit être justifiée », détaille Manuela Brillat. Celle-ci rappelle également qu’un simple témoignage peut faire foi dans le cadre d’un contrôle d’identité.
Néanmoins, à l’image du contrôle de la sincérité d’un Pass sanitaire, certaines situation de la vie courante justifient déjà de présenter un document prouvant son identité. Même à des employés de sociétés privées. Par exemple pour prouver la majorité d’une personne achetant de l’alcool en magasin ou souhaitant entrer en discothèque. Une tolérance justifiée par la nécessité mais dont le caractère proportionné est une condition impérative. « La difficulté avec le Pass sanitaire, c’est que c’est une situation complètement inédite. Il faut attendre la décision du Conseil constitutionnel pour se prononcer. En définitive, la chose qui compte c’est ce que dit le texte de loi. Mais il ne faut pas oublier que, dans le cadre de l’État de droit, il existe une hiérarchie des lois. Le Code pénal prime sur les directives, avis ou autres arrêtés qui pourraient entrer en contradiction », conclut la juriste.
Une situation délicate qui force le législateur à se prononcer sur le cadre légal des contrôles d’identité et qui interroge sur l’opportunité d’intégrer directement une photo d’identité au Pass sanitaire. « D’autant que la Cnil encadre le déploiement du Pass sanitaire et que le Règlement général sur la protection des données (RGPD) permet l’usage de données personnelles quand c’est nécessaire et justifié. Cela aurait peut-être permis d’éviter des contrôles abusifs », concède Manuela Brillat.
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