PRUDENCE. Entre le mouvement de Robert Ménard ‘‘Oz ta droite’’, l’enquête sur la voiture de police incendiée par des manifestants à Paris et l’anniversaire de la loi ‘‘Mariage pour tous’’, nos deux invités ont eu du grain à moudre cette semaine. Compte-rendu des échanges entre Déborah Fort du MJS 31 et le chef d’entreprise Pascal Monfolet-Lefèvre.
Par Séverine Sarrat et Coralie Bombail
‘‘Oz ta droite’’, le mouvement ‘‘citoyen’’ du maire de Béziers Robert Ménard, ouvre ce petit déjeuner débat. Le congrès qui s’est tenu ce week-end dans l’objectif de proposer un programme aux candidats de droite aux élections présidentielles a été l’occasion d’un clash avec le FN (qui est dans la majorité de Robert Ménard à Béziers). Marion Maréchal Le Pen, venue assister aux débats, est partie en claquant la porte lorsque l’édite a déclaré ne pas vouloir servir de « marchepied au Front national ». « Sur les idées qui ont été annoncées ce week-end, les observateurs estiment que 20% d’entre elles sont plus extrêmes que les autres partis de droite. Il a notamment été proposé de supprimer les aides à la presse, pour l’ancien directeur de Reporter sans Frontières, c’est tout de même paradoxal », note Déborah Fort. Pour Pascal Monfolet-Lefèvre, cela ressemble « davantage à un coup de pub qu’à un programme, Robert Ménard crée le buzz pour faire parler de lui, c’est une stratégie marketing basique, mais cela ressemble bien au personnage ». Quant à une scission éventuelle avec le parti de Marine Le Pen, Déborah Fort rappelle « qu’il a fait campagne pour elle, et aujourd’hui il retourne sa veste… » Un calcul politique ? « Ce genre de mouvement fait souvent office de test pour se présenter plus tard à une élection, c’est dans l’air du temps. Macron et Montebourg sont dans la même démarche, même si mes idées sont différentes », soulève le directeur du Golf Estolosa. Ces initiatives se multiplient alors que les partis traditionnels n’ont plus vraiment la cote… Mais pour Pascal Monfolet-Lefèvre, « ce n’est pas tant les partis qui sont en cause que les hommes, car les citoyens ont l’impression que les carrières passent avant la volonté de faire avancer les choses ». Sur ce dernier point, impossible de ne pas aborder la loi Travail : « Qu’on soit d’accord ou pas, cette loi essaye de faire avancer les choses », selon lui. Deborah Fort saisit l’occasion pour rebondir : « Ce projet ne va pas dans le sens du progrès social, d’ailleurs le MJS a fait pression sur le gouvernement pour modifier le texte, ce qui prouve bien que les partis politiques ont encore leur rôle à jouer ».
« Robert Ménard crée le buzz pour faire parler de lui, c’est une stratégie marketing basique, mais cela ressemble bien au personnage »
Mais la gronde anti loi El-Khomri ne faiblit pas. Et la violence dans les manifestations non plus. Dernier fait polémique en date, l’incendie volontaire d’une voiture de police place de la Bastille à Paris. 5 personnes ont été placées en garde à vue depuis le début de l’enquête, mais 4 ont été remis en liberté. Les syndicats policiers attendent des sanctions exemplaires, mais pour le juge saisi de l’affaire estime que le dossier manque de preuves. « Le climat est très tendu, il faut laisser la justice faire son travail », réagit Déborah Fort. « On a trouvé des suspects, pas forcément les coupables. Les peines encourues sont très lourdes, il faut certes que les sanctions soient exemplaires, mais à condition de trouver les coupables », enchaine Pascal Monfolet-Lefèvre. Ce dernier regrette la tournure que prennent les manifestations : « Le droit de grève est devenu le droit de bloquer, le droit de tout casser, et certains syndicats appellent à casser du flic. » La Loi El Khomri, à l’origine du mouvement de contestation, est devenue « une histoire d’égo », selon ce chef d’entreprise : « Personne ne veut perdre la face, ni Manuel Valls, qui ne peut pas retirer la loi après avoir utilisé le 49-3, ni Philippe Martinez (CGT) qui ne peut pas abandonner le combat, donc le gouvernement va devoir lâcher du lest. » Sur le fond du débat, nos deux invités divergent. La jeune socialiste dénonce « des mesures inacceptables qui rendent le monde du travail plus incertain pour les salariés », quand son interlocuteur avance la nécessité de réformer du travail pour donner plus de « flexibilité » aux entreprises. « Il faut bien comprendre que si un chef d’entreprise peut licencier plus facilement, il peut embaucher plus facilement aussi. Aujourd’hui, embaucher est une vraie prise de risque et si on doit en arriver à licencier une personne, c’est des nuits blanches et des nuits blanches », explique Pascal Monfolet-Lefèvre, qui veut distinguer « les entreprises du CAC 40 de toutes les TPE-PME ». Il reconnait néanmoins un manque de pédagogie sur ce projet. Les négociations devraient reprendre entre le gouvernement et la CGT. À voir si cela peut apaiser les tensions…
« Ce projet ne va pas dans le sens du progrès social, d’ailleurs le MJS a fait pression sur le gouvernement pour modifier le texte »
Le dernier sujet à l’ordre du jour concerne également une loi qui a suscité une forte mobilisation à son encontre, en début de mandat : le mariage pour tous. Il y a 3 ans, on célébrait le premier mariage homosexuel en France. Près de 26 000 unions plus tard, cette loi est-elle considérée comme un véritable tournant pour la société française ? « Ce texte a conféré des droits nouveaux à des personnes qui en avaient peu ; il confère plus d’égalité donc ce ne peut être qu’une bonne chose », estime Déborah Fort. « C’est incontestablement une avancée, il y a 25 ans l’OMS considérait l’homosexualité comme une maladie », rappelle Pascal Monfolet-Lefèvre, « mais est-ce l’évolution des mentalités qui a permis l’adoption de cette loi ou cette loi qui a permis l’évolution des mentalités ? » s’interroge-t-il. La question reste ouverte. Si certaines voix se sont élevées pour demander l’abrogation de ce texte, aucun de nos deux invités n’imagine un retour en arrière aujourd’hui. Quel que soit le vainqueur des présidentielles en 2017.
Mini bios:
Deborah Fort : Secrétaire générale du MJS 31, Déborah Fort est par ailleurs en Master 2 de droit des collectivités territoriales à l’université Toulouse 1 Capitole. Adhérente des jeunes socialistes depuis un an, elle a été nommée secrétaire générale en janvier dernier.
Pascal Monfolet-Lefèvre : Gérant du Golf Estolosa, Pascal Monfolet-Lefèvre a repris le domaine en 2003 alors qu’il était fermé depuis 10 ans. Aujourd’hui, le Golf, qui est également un lieu de séminaire et de réception, vient d’ouvrir un centre de formation.
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