STREET ART- Le petit garçon rouge est arrivé sans crier gare le 15 juin, au petit matin. Depuis qu’elle est installée dans le trou béant d’un dégueuloir, cette statue aux grandes oreilles n’a de cesse d’intriguer les passants. Mais que fait-elle là ?
// Par Gabriel Haurillon
Sié / JTLes bus grondent, menacent, et tracent finalement leur route sur le plus vieux pont de Toulouse. Quelques mètres en dessous, une petite statue regarde la Garonne, imperturbable. À deux platanes de là, Rénata, étudiante, s’apitoie sur le sort du personnage : « On pourrait croire que quelqu’un l’a puni au milieu de l’eau sale ». « Pas du tout, c’est un petit démon. Regarde, il a des cornes de diablotin. Il est fier de lui et trône sur les ténèbres », la contredit Solène, moins compatissante.
Mais comment ce gamin insolent est-il arrivé là ? « Je crois que c’est un artiste toulousain qui met des lapins rouges partout dans Toulouse », explique Marie à ses collègues du Lycée professionnel Jasmin. « Moi, ça me fait plutôt penser au bonnet qu’on mettait aux enfants quand ils faisaient des bêtises. Il me fait de la peine », déclare Leïla, plus perspicace que son enseignante.
Pour comprendre, il faut se rendre dans un immeuble, à deux kilomètres de là, sur le boulevard de la gare. Dans la cour gît un canot pneumatique dégonflé. Une porte sur la gauche ouvre sur l’atelier de James Colomina, 42 ans. Ce prothésiste dentaire est l’artiste derrière le garçon du pont neuf.
« En fait, c’est un écolier qui porte le bonnet d’âne. Il est puni, mis à l’écart », confirme James Colomina. « Je l’ai mis là parce qu’il est comme beaucoup de personnes différentes, qui se sentent stigmatisées. » L’artiste a choisi le pont parce qu’il représente à ses yeux le lieu où s’abritent les marginaux, les laissés pour compte.
Le 15 juin à 3h du matin, le plasticien est allé au pied du pont neuf avec une échelle, sa sculpture et un matelas pneumatique de fortune. « J’étais un peu à l’étroit et je n’avais presque pas de place pour ramer. C’était laborieux ! ». James Colomina a ensuite hissé la statue de 40 kg dans le dégueuloir, avant de redescendre au bord de l’eau, grâce à une corde attachée au bateau : « l’opération a duré 40 minutes et c’était sportif. J’éteignais régulièrement la lampe frontale pour ne pas être repéré. »
Il y a quelques mois déjà, l’artiste a juché une statue à capuche sur le toit de son atelier. La résine époxy qui recouvre ces sculptures est résistante à l’eau et aux UV : « Du coup, elles devraient tenir longtemps. Je n’ai pas l’intention de les enlever. Au contraire, d’autres devraient apparaître bientôt. » Pas de précision sur le lieu ni la figure qui sera représentée. Seul indice : « Elle sera rouge.
La rédaction
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