Depuis plusieurs mois, des masses vertes apparaissent sur le fleuve. Devant la Prairie des filtres, en bas du pont Neuf, des tas de ce qui ressemble à des végétaux, stagnent. Est-ce un phénomène naturel où le symptôme d’une pollution? Voilà le pourquoi du comment.
« Je ne sais pas exactement ce que c’est. Des lentilles d’eau peut-être ? » s’interroge Dalil, en train de flâner sur les bords de Garonne. «Si ça se trouve, ça n’a rien à voir, c’est un truc dégueulasse comme de la pollution ou même du caca», répond Aude qui accompagne le jeune homme. «En tout cas, ces algues retiennent les saletés», réagit plus loin une retraitée en promenade. «Je ne sais pas ce qu’il s’est passé cette année mais ils n’ont pas réussi à maitriser le phénomène», assure un passant avant de reprendre son chemin. Certains Toulousains n’ont pas remarqué l’apparition de ces masses vertes, alors que d’autres s’inquiètent de l’état de la Garonne. Mais que sont ces végétaux que l’on aperçoit sur le fleuve depuis quelques mois ?
« Ce ne sont pas que des algues », explique Jean-Pierre Rebillard, responsable à l’Agence de l’eau Adour Garonne du service qui surveille les milieux aquatiques. Ce que les passants peuvent apercevoir depuis les berges, ce sont aussi des macrophytes, des plantes qui se développent sur ce que les personnes averties appellent « un herbier », une sorte de prairies aquatiques. « Tout ça est complètement naturel, cela participe à la biodiversité : les végétaux servent de niches de ponte ou d’abris pour les petites bébêtes », explique Jean-Pierre Rebillard. L’apparition de masses vertes n’a donc rien à voir avec une pollution excessive du fleuve. « Les macrophytes se déploient lors de températures excessives, en fonction de l’ensoleillement et du débit de l’eau », raconte le scientifique. Avant d’ajouter, « c’est surtout la crue de printemps qui détermine l’importance de leur développement. » Le mouvement de l’air influencerait aussi l’affaire. Cet été, il n’y a pas eu beaucoup de vent d’autan, résultat : ce qui flotte sur l’eau n’a pas pu s’écouler dans le sens du courant.
Pour éviter que le phénomène n’enlaidisse trop la Garonne, la mairie de Toulouse emploie depuis début juillet une entreprise de nettoyage. « Nous sommes là pour ramasser les algues qui se détachent », explique Frédéric Mercadier, dirigeant de la société ESEAC. Cela évite qu’elles pourrissent, dégagent une mauvaise odeur et attirent des bêtes indésirables. Quand l’équipe remarque que des tas stagnent, par exemple, en bas du pont neuf, elle sort en bateau sur le fleuve pour les enlever. « Nous prenons une fourche recourbée pour les ramasser, il n’y a aucune mécanisation pour être sûr de ne rien arracher et de prendre que ce qui est déjà détaché». La municipalité a aussi fait installer un barrage flottant en amont de la guinguette du quai de Tounis. « Il s’agit d’une bouée avec une bâche plastique qui descend à 35 cm de profondeur », explique Frédéric Mercadier.
Tous ces dispositifs payent. « En juillet, on a dû faire environ dix sorties pour nettoyer les déchets végétaux, puis sept en août et seulement une au mois de septembre ». Si les herbiers restent en place, au profit de la biodiversité, les algues disgracieuses disparaissent donc peu à peu. Pas de panique: nous sommes donc loin des marées vertes bretonnes.
Enfin, une réponse à la question qui empêchait les Toulousains de dormir. De quoi briller en société !
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