ÉCOUTES. Le 8 février dernier, Gérard Collomb dévoilait enfin les contours de la nouvelle police de sécurité du quotidien. Difficile de savoir si les moyens humains (une trentaine de policiers en plus affectés au Mirail pour le cas de Toulouse) et techniques (caméras piéton, tablettes numériques) suffiront à restaurer la confiance entre la police et la population, tant les rapports semblent tendus. Mais en promettant l’arrêt de la politique du chiffre, le ministre de l’intérieur a suscité de l’espoir chez tous les citoyens et membres des force de l’ordre qui agissent pour améliorer le dialogue. Le JT les a interrogé.
« Que vous inspire spontanément la police ? », seuls 47 % des Français répondent « de la confiance », selon un sondage Ifop daté de 2015. Pourtant, un an plus tard, 82 % en ont une image favorable. Un paradoxe que relève Jacques de Maillard, professeur de science politique à l’université de Versailles-Saint-Quentin : « Entre les forces de l’ordre et la population, C’est “Je t’aime, moi non plus” ! Mais pour résumer, on aime la police qui nous protège, pas celle qui contrôle ». Cette ambivalence s’est pleinement illustrée lors des manifestations de soutien aux forces de l’ordre suite aux attentats en janvier 2015 et à l’assassinat de policiers en 2016. Un état de grâce de courte durée car les violences entre forces de l’ordre et citoyens lors des mouvements contre la loi travail et dans le cadre l’affaire Théo en 2017 ont terni à nouveau l’image de la police, relevant le niveau de défiance des Français.
D’ailleurs, ils ne sont que 50 % à juger la police efficace. Le nombre, en chute, de plaintes déposées en est un indicateur pour Sébastien Roché, sociologue et auteur du livre “De la police en démocratie” (Éditions Grasset) : « Cette démarche révèle que la victime pense que les agents prendront en compte la demande et tenteront d’agir. » « Nous faisons notre travail et interpellons régulièrement des délinquants que nous livrons à la justice. Mais ils sont rapidement remis en liberté. Ce n’est pas aux forces de l’ordre qu’il faut s’en prendre mais au système judiciaire », rétorque Philippe Payri, secrétaire adjoint, du syndicat de police FPIP dans le Sud Ouest. Mais il convient de nuancer. « Seuls 20 à 25 % de la population affiche une réelle défiance envers les forces de l’ordre », affirme Jacques de Maillard. Une catégorie bien particulière comme l’identifie le rapport “Police et population : pour des relations de confiance” du think tank Terra Nova : « Un jeune homme issu de l’immigration vivant dans une zone urbaine sensible et d’origine populaire […] qui la considère au mieux comme violente et brutale, au pire comme raciste. » « C’est justement la population à qui nous avons le plus souvent à faire dans nos interventions », constate Philippe Payri. Un sentiment rendu général par les médias se faisant les observateurs des pratiques policières. « Ils ne relaient que les fautes commises en réalité à la marge. Comme dans toute profession, certains d’entre nous peuvent faire des erreurs, mais celles-ci sont systématiquement montées au pilori, laissant penser que tous les policiers sont irrespectueux de la population », note amèrement Philippe Payri.
« Cet amalgame est mal vécu par les policiers qui se voient pris pour cible », commente l’universitaire. « Depuis l’affaire Théo, nous sommes sur l’échafaud, nous devons attention à tout. Désormais, lorsqu’un policier se fait agresser, il préfère se rouler en boule et se laisser violenter plutôt que de se défendre, de peur que sa riposte ne se retourne contre lui », raconte David Portes secrétaire général fédéral de la FPIP. Une pression responsable d’un suicide par semaine en moyenne dans les rangs des forces de l’ordre. « Un malaise sur lequel les décideurs politiques ont également leurs responsabilités. À eux de travailler sur l’apaisement des tensions et l’amélioration de la qualité du service public », conclut Jacques de Maillard.
Source : IGPN, IGGN, Institut de sondage BVA et Syndicat FPIP
Dossier “Police-citoyens : En quête de confiance” :
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