Francis Fourcou, producteur et réalisateur de films avec sa société toulousaine Ecran Sud, a tenu à s’exprimer sur la fermeture de TLT qui laisse la ville sans télévision locale. Pour rappel, TLT a été liquidée le 3 juillet dernier par le Tribunal de commerce de Toulouse, après presque 30 ans d’existence. Francis Fourcou écrit à Jean-Jaurès, qui a été élu à la ville de Toulouse en charge de l’instruction publique.
Mon cher Jean,
Te voila exilé sur la montagne Sainte Geneviève. Tu ne peux voir combien ta ville, ta chère ville de Toulouse a changé. Toi, qui en fut le conseiller délégué aux affaires scolaires, toi à qui Toulouse doit le renouveau de son Université, tu serais heureux de l’épanouissement de cet enseignement supérieur pour lequel tu as tant œuvré ! Aujourd’hui plus de 120.000 étudiants parcourent les rues de la cité lui donnant cette vie et cette animation qu’on nous envie. Oui, Toulouse est devenue une ville du savoir et des sciences. L’émancipation par la connaissance, cette idée tu l’as partagée avec beaucoup !
Et, c’est là que le bât blesse, que l’étoile toulousaine pâlit, que Toulouse perd le Nord !
Oui, mon cher Jean, tu ne le croiras pas, mais Toulouse n’a pas de télé ! La Télévision, tu ne l’as pas connue, mais imagine le cinématographe devenu parlant et arrivant dans chaque maison, dispensant savoir et connaissance, partage et citoyenneté… Car, imagine que de ton temps, la Dépêche de Toulouse n’ait pas existé, que tu n’aies pas pu y écrire tes chroniques ! Ah, Toulouse, capitale d’une Région comparable à la Catalogne ou la Belgique, ….. sans journaux, sans théâtre, sans cinématographe… Sans télé !
Cette Ville, longtemps la plus grande ville espagnole hors d’Espagne, cette ville des Europes, des Méditerranées, des langues qui se mélangent avec leurs accents, cette ville de la nouvelle Europe en paix que tu aurais voulu connaître … elle est aujourd’hui coupée de la modernité, d’un des éléments de la Culture, de la connaissance, Toulouse est Sans Télé.
Certains diront tant mieux, hors d’ici boîte à rien, ruine de l’âme, tire-bouchon à cerveaux ! Peut-être, peut-être. Mais si le pire y est quelquefois, le meilleur peut en sortir aussi : la connaissance, la citoyenneté, le partage, la vie, la culture, les artistes, les écrivains, les cinéastes … Oui car, Toulouse a tout cela.
Et bien, tout cela est in-vi-si-ble ! Je te vois scandalisé ! Je te vois incrédule, comment est-ce possible ? Et bien, c’est très simple – C’est l’ignorance la source de cette misère !
L’ignorance de tout est la source de tout ce mal. Alors, Mon cher Jean, si tu pouvais me faire un petit signe, toi, le citoyen d’Honneur de la Ville, toi à qui on vient enfin de donner le nom à une université, toi, le citoyen du monde, si enraciné, si fort de son Humanité … Peut-être les lignes bougeraient, peut-être demain, nous pourrions imaginer, rêver, penser une télévision locale et citoyenne, au service des citoyens. Une télévision de projets, d’ambition nationale, un canal du savoir dans la ville du quai des savoirs … Un canal ouvert vers la création musicale, un canal des Greniers du théâtre, un canal conservatoire des cinématographies… Un canal des mots dans la ville du Marathon, de la cave des poésies, du Rio Loco, du Forom des langues, de ces populations venues de toute l’Europe, vivre, aimer, grandir ici… Un canal des images et des sons dans la ville de la deuxième cinémathèque de France, des écoles d’audiovisuel, du Château d’eau des images… Un canal école dans la ville du Savoir… Un canal des talents, du sport, de l’économie sociale et solidaire, des solidarités associatives…
Ha, si tout cela arrivait, on te le devrait aussi un peu.
Merci, Jean. Aide nous à rêver encore un peu dans ce monde qui se déchire tant.
Francis Fourcou
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