Le laboratoire départemental 31 Eva analyse, entre autres, l’eau de notre robinet. Nous avons suivi l’une de ses interventions, depuis le prélèvement sur le terrain jusqu’aux résultats finaux. Difficile pour les impuretés de passer entre les mailles du filet.
Ce matin, sitôt franchi le seuil de la mairie de Launaguet, Lénaïc Linger file aux toilettes. C’est le lavabo qui l’intéresse. Vêtu d’une blouse bleu foncé et muni d’un badge nominatif, il vient effectuer un contrôle sanitaire obligatoire (CSO) et inopiné pour l’Agence régionale de santé (ARS), afin d’évaluer la qualité de l’eau de la ville.
Intervenant pour le compte du laboratoire d’analyse départemental, il prend ses mesures à des endroits bien précis : « Les points de prélèvements se trouvent en général dans des services publics, des écoles, des piscines municipales ou, comme aujourd’hui, dans une mairie. Plus rarement chez des particuliers », indique-t-il. La fréquence des contrôles dépend du nombre d’habitants et de la consommation globale. Rien qu’à Toulouse, il y en a 500 par mois, dont un en amont des stations d’épuration et quatre à leur sortie.
Le technicien suit un strict protocole, formulé par un organisme de normalisation. Il commence par dévisser le brise-jet du robinet, parce que celui-ci peut retenir des impuretés. Il laisse couler l’eau deux minutes, pour purger les canalisations. Il rince trois fois et remplit un flacon en plastique, qui servira d’échantillon pour mesurer la température, le pH, la conductivité (qui indique la quantité de sels dissouts) et la turbidité de l’eau (sa transparence). Une autre éprouvette est destinée à la détection de métaux, qui se fera au laboratoire. C’est ensuite le test du taux de chlore, un élément dont le pouvoir oxydant vient à bout des microorganismes.
Il doit toujours être présent à une concentration d’au moins 0,05 mg/l : « C’est le bon dosage pour protéger le réseau, sans que cela soit trop désagréable pour les usagers. Parfois, il en manque dans des bras morts, à l’extrémité de l’unité principale, et nous le signalons aussitôt », informe Lénaïc Linger, en refermant ses tubes de réactifs. Le prélèvement bactériologique fait alors l’objet de toute son attention. Afin d’éviter une contamination, il passe une flamme de chalumeau sur le robinet et se frictionne les mains avec du gel hydroalcoolique, puis procède à une nouvelle purge et saisit un troisième flacon : « Quand on ouvre celui-ci, il ne faut ni parler ni tousser, et le bouchon doit systématiquement être dirigé vers le bas. » Une fois ce dernier scellé, il ne lui reste plus qu’à rentrer toutes les données recueillies dans une application de sa tablette électronique et à prendre congé du personnel de la mairie de Launaguet.
Les échantillons, transportés dans un réfrigérateur à plus ou moins 5°C, arrivent non loin de là, au laboratoire départemental 31 EVA, un acteur majeur de la santé publique en Occitanie. Plus de la moitié des 150 employés sont affectés à l’analyse des eaux usées ou de consommation, de loisirs ou issues du milieu hospitalier : « Préleveurs, physiciens, chimistes, microbiologistes, bactériologistes, hydrobiologistes… Cela fait appel à un tas de métiers. Ici, on trouve tout ce qui est caché », annonce Michelle Selve, la directrice.
« Ici, on trouve tout ce qui est caché »
Passé la pièce de flaconnage, où une partie des échantillons, soigneusement étiquetés, sont stockés dans une chambre froide, elle accède au département environnement. On entend le bruit des nombreux automates qui plongent inlassablement leurs seringues ou leurs sondes dans une multitude de petites fioles. Plusieurs salles se succèdent, chacune dédiée à un type d’analyse : « Nous nous prémunissons des risques de contamination en compartimentant, des eaux les plus propres vers les plus sales. Rien n’est mélangé », assure Michelle Selve. Pour garantir la stérilité des tests bactériologiques, on utilise des postes de sécurité microbiologiques. Justement, un manipulateur est en train de filtrer de l’eau prélevée le matin même à la mairie de Launaguet à travers des membranes, qu’il dépose sur des milieux de culture avant de les placer dans des étuves, à 37, 30 ou 20 degrés.
« Il n’y a pas grand risque à boire l’eau du robinet »
Elles vont rester là de un à trois jours, en fonction des types de germes recherchés : « Si nous en détectons la présence, nous n’attendons pas d’avoir tous les résultats. Nous le signalons immédiatement à l’ARS, qui en informe les producteurs d’eau et décide avec eux ce qu’il faut faire. » En cas de non-conformité, l’agence peut interdire l’usage, condamner une partie du réseau et obliger les exploitants à effectuer les travaux nécessaires, avant de nouveaux contrôles. « Preuve qu’il n’y pas grand risque à boire l’eau du robinet ! », confirme la directrice.
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