Cette professeure de français est privée de classe depuis septembre dernier. Un médecin de l’Académie l’a déclarée inapte à travailler, probablement à cause de sa surdité. Déterminée, la Toulousaine a plaidé sa cause auprès du rectorat. Et finalement obtenu le droit d’enseigner avec l’aide d’un assistant. De quoi ouvrir la voie à d’autres professeurs atteints de surdité.
SÉSAME. Près de neuf mois de bataille et d’attente. C’est ce que vient de traverser Janick Leclair. Depuis septembre, cette professeure stagiaire de français de 38 ans n’a plus le droit de faire classe à ses élèves de seconde du lycée de Saint-Gaudens. Jusqu’à ce dénouement la semaine dernière : le rectorat lui a annoncé qu’il l’autorisait à enseigner et qu’il se lançait dans le recrutement d’un assistant.
TÉMÉRAIRE. La détermination de Janick Leclair a payé. Avec le soutien de ses professeurs d’université, elle a demandé au rectorat d’examiner son dossier. «Il s’est montré bienveillant», souligne-t-elle. Face à l’avis du médecin de l’inspection académique, deux experts médicaux indépendants ont été mandatés. «Ils ont finalement conclu que la loi n’exige aucun seuil auditif minimal pour être apte».
PIONNIÈRE. Lorsqu’un assistant aura été recruté, Janick Leclair fera partie de la poignée d’enseignants sourds exerçant en France. «Nous sommes moins d’une dizaine. L’Académie de Toulouse, elle, n’avait jamais été confrontée à cas». Le taux d’illettrisme chez les sourds étant particulièrement élevé, ils atteignent en effet rarement le stade des études supérieures.
REFUGE. Jannick Leclair, elle, a appris à lire et à écrire à l’âge de 5 ans. Juste avant d’être frappée par une méningite qui lui fait perdre l’ouïe. Disposant d’un implant auditif, elle a suivi toute sa scolarité avec des entendants et obtient finalement son Capes de lettres modernes. Dans son salon, les bibliothèques témoignent de sa passion pour les livres. « Ils m’ont permis de comprendre le monde. C’était mon échappatoire contre la solitude et l’ennui ».
SYMBOLE. Par son expérience, l’enseignante veut changer les regards. « Que je transmette le français, c’est une image très forte. Notre société ne considèrera les personnes handicapées que si elles sont visibles et à des postes clés ». Elle souhaite aussi créer des vocations, «J’aimerais encourager les sourds et les élèves à ne pas s’autocensurer ». Reste pour cela à obtenir sa titularisation « alors mon combat sera vraiment gagné » lance-t-elle.
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