Défilé de la fête de travail et du maréchal Pétain, le 1er mai 1941, à Toulouse. Un cliché de la photographe toulousaine Germaine Chaumel qui fût la première femme photojournaliste de France. ©Germaine Chaumel
Il suffit de se promener cinq minutes dans un lieu un tant soit peu touristique pour réaliser la place que l’image a prise dans nos vies. Les appareils photo sont partout, toujours à portée de main et tout le monde ou presque est équipé. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le métier de photographe est régulièrement cité dans les sondages parmi les préférés des Français. Mais entre ce panorama idéalisé et le quotidien des photographes chargés de nous informer, le gouffre est abyssal. Photojournaliste : une profession en crise que nous abordons dans ce dossier avec une enseignante-chercheuse spécialiste du sujet ou dans les pas d’un reporter photographe toulousain haut en couleur. Cap aussi sur Carcassonne où se forment les futurs photojournalistes au sein du diplôme universitaire Photographie, documentaire et écritures numériques. Histoire de réaliser que le photojournalisme, tant dévalorisé y compris et en partie par la presse elle-même, est un vrai métier.
La photo se porte bien, merci pour elle. Mais les photographes de presse, eux, comment vont-ils ? C’est la question que s’est posée la Société civile des auteurs multimédia (Scam) dans une étude publiée l’an dernier. Intitulée “Photojournalisme : une profession sacrifiée”, elle établit un constat plutôt sombre. L’âge d’or du photojournalisme dans lequel les prestigieuses agences (Sygma, Gamma…) tenaient le haut du pavé paraît bien loin. La révolution numérique a fait exploser ce modèle économique et exposé les photojournalistes à une mutation radicale : flux permanent d’images gratuites sur le Net, concurrence des amateurs, développement des banques d’images, non-respect du droit d’auteur…
Un chiffre illustre le paradoxe de la situation : sur les 36 355 cartes de presse attribuées par la commission en 2014, seulement 1 222 l’ont été à des photojournalistes. Une proportion dérisoire (3,4%) par rapport à la valeur ajoutée de la photographie dans la presse. Le nombre de photojournalistes titulaires de la carte de presse a diminué de 24% depuis 2002. Une baisse en partie due au fait que pour compléter leurs revenus, les photojournalistes sont devenus multicartes (mode, institutionnel, mariage, commande publique…) et accumulent les statuts différents.
Alors que la consommation d’image n’a jamais été aussi forte, on assiste à une captation de cette valeur par des opérateurs web qui génèrent du flux et réduisent les coûts. Pour pallier cette défaillance du marché, des magazines spécialisés, des mooks (des publications à mi-chemin entre livre et magazine) ou des blogs ont vu le jour ces dernières années. Les photojournalistes, eux, se réinventent en s’orientant vers le webdoc, en courant derrière les prix et les bourses ou en ayant recours à l’autofinancement. Mais face à l’ubérisation du marché de la photo, certains acteurs réclament une intervention publique. Un observatoire et un code de bonnes pratiques ont bien été mis en place, sans grand succès. Désormais, deux idées émergent : taxer les entreprises d’Internet qui profitent de ce que génère la photographie et imposer un barème minimum du prix des photos.
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