Le productivisme est longtemps resté le maître mot dans les entreprises. Mais, peu à peu, les experts constatent que le respect du rythme physiologique des salariés améliore leur efficacité. Bruno Comby, qui prône la réintroduction de la sieste dans nos emplois du temps, est l’un d’entre eux.
« Le sommeil et le respect du rythme physiologique sont encore plus importants que le besoin de manger ou de boire », estime Bruno Comby, directeur scientifique de l’institut éponyme, spécialisé dans la promotion de la santé publique. Il milite même pour le retour de la sieste en entreprise.
Elle réduit les troubles du sommeil et le stress, qui sont des facteurs identifiés par les salariés comme perturbateurs de leurs tâches professionnelles. Le mouvement slow, grand promoteur de la sieste, dans lequel s’inscrit Bruno Comby, ajoute qu’ elle procure un mieux-vivre en général et une efficacité intensifiée au travail en particulier : « Tout simplement parce que ce temps de repos permet d’améliorer la concentration, de développer la mémoire, d’accroître les réflexes, et donc d’augmenter la productivité d’un employé. » La Nasa, l’agence spatiale américaine, a même réalisé une étude démontrant un gain de 35% de la créativité et de la productivité d’un salarié ayant fait la sieste.
Selon ses calculs, Bruno Comby estime qu’une sieste d’une minute permet une remise en forme d’un quart d’heure. « L’idéal est de s’assoupir pendant 20 à 30 minutes en début d’après-midi pour s’assurer d’une efficacité optimale jusqu’à la fin de la journée », précise-t-il. Cependant, sur le lieu de travail, il conseille plutôt la sieste flash, celle qui dure moins de cinq minutes. Car dormir au sein d’une entreprise’est pas toujours évident, cette pratique étant considérée comme honteuse dans notre société occidentale. « Non, la sieste n’est pas l’apanage des paresseux ! » lance le spécialiste en la matière.
Selon lui, il s’agit-là d’un stéréotype, héritage judéo-chrétien, où le plaisir est à bannir d’une manière générale : « Quand on a de l’argent, il faut le cacher ; la bienséance veut que les gestes amoureux ne se fassent pas en public… et la sieste est mal perçue par les employeurs. » Particulièrement en Europe du Sud, dont les habitants culpabilisent de la faire au travail, tandis qu’en Europe du Nord, elle est synonyme de productivité accrue. Mais sans commune mesure avec les sociétés asiatiques qui l’ont érigé en véritable tradition, le droit au repos figurant même dans la constitution chinoise, article 49. Le sommeil est respecté et la pratique de la sieste y est socialement encouragée… même sur le lieu de travail, car elle est censée décupler les capacités cérébrales.
Tout repose ainsi sur la conception du temps, différente d’une région à une autre. « En Occident, nous croyons le perdre en faisant la sieste. Mais en réalité, nous en gagnons : un sommeil fractionné dans la journée permet de dormir moins longtemps la nuit et de travailler plus efficacement le jour », conclut Bruno Comby.
Bio :
Directeur scientifique de l’institut qui porte son nom, ce polytechnicien est l’auteur du livre ”Éloge de la sieste”, paru aux éditions TNR.
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