EMANCIPATION. Les mœurs sexuelles des Français ont évolué au fil des ans, passant d’une obligation de procréation à une sexualité assumée. Le sport en chambre est devenu un critère de virilité pour les uns ou une manière de s’épanouir pour les autres. À chacun de se positionner…
« Auparavant, il s’agissait de se vider les c…, désormais il ne suffit plus d’éjaculer pour être satisfait ! » Le constat est cru, mais il a l’avantage d’être clair. Daniel Welzer-Lang, sociologue, spécialiste du genre et des sexualités, enseignant à l’université Jean Jaurès, évoque un changement des pratiques sexuelles. Pendant plusieurs siècles, les rapports intimes n’étaient qu’un moyen de procréer. Aujourd’hui, le sexe est associé au plaisir, de soi et des autres. Selon lui, ce sont les libertés allouées aux femmes qui marquent ce basculement. « Tout a commencé en 1945, lorsqu’elles ont obtenu le droit de vote. Mais le changement le plus marquant est sans aucun doute le droit à la contraception en 1967 et à l’avortement en 1975 », explique-t-il. Là, les femmes se sont réappropriées leur corps, et en ont disposé à leur gré. « De même, les luttes des homosexuels, de la fin du XIXe siècle aux années 1980, ont permis une libéralisation des pratiques », poursuit le sociologue. Les lieux de libertinage se sont alors multipliés : « Dans la Ville rose, La Péniche a été le premier endroit anticonformiste où les Toulousains ont pratiqué le libertinage et l’échangisme. » Désormais, la norme hétérosexuelle laisse place aux “expériences”. À Toulouse, de nouveaux lieux apparaissent : on dénombre de plus en plus de cafés polyamoureux ou de structures où l’on peut discuter de sa sexualité, à l’image du Cabinet des curiosités (voir page 9). Même, à la fac du Mirail, un master d’éducation à la sexualité humaine a été créé.
Mais cette évolution des mœurs a pris racine sur fond de domination masculine. « De tout temps, les hommes ont disposé de “bordels” mais les femmes n’ont jamais eu de lieux dédiés à leurs plaisirs. Ce n’est qu’en 1968, qu’elles ont osé d’exprimer leurs envies. Avant cette période, on pensait que s’il y avait pénétration les femmes jouissaient forcément ! » confirme Daniel Welzer-Lang.
C’est ceux qui en parlent le plus, qui en font le moins
Internet a considérablement participé à la libéralisation sexuelle : « Aujourd’hui, nous parlons de consommation car le web a permis de s’adonner à des pratiques différentes mais surtout, a facilité les rencontres pour des “plans cul” éphémères ou réguliers », précise le sociologue. Pour les jeunes, le sexe s’apparente au plaisir, toutefois les études démontrent que l’âge du premier rapport sexuel n’a lui pas évolué depuis le début du XXe siècle, il est toujours de 16-17 ans. Seulement, il ne se pratique plus de la même façon et la manière de l’appréhender n’est plus la même. La diversité est devenue le maître mot.
En revanche, selon Daniel Welzer-Lang, « les gens mentent lorsqu’ils parlent de leur vie intime. » Pour lui, cela s’explique par une lourde pression sociale. D’abord parce qu’un homme n’ayant pas eu de rapports sexuels depuis longtemps paraîtra moins viril aux yeux des autres. Ensuite, parce qu’il est encore difficile d’expliquer que l’on pratique le sexe de manière libertine, « comment dire que l’on aime participer à des gang-bang ? » Généralement, les femmes ont tendance à minimiser le nombre de leurs partenaires quand les hommes le surestiment. « Les stéréotypes ont encore la vie dure », constate le sociologue, « une femme multipliant les conquêtes passera pour une “salope” et un homme pour un Don Juan ! » Les pratiques évoluent donc plus rapidement que les représentations.
Nos pratiques sexuelles au rayon X
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