CONSTRUCTION – Le droit du travail, ce chantier permanent. Sans cesse tiraillé entre les besoins des salariés et ceux des patrons. Quand les uns demandent respect, salaire décent, et meilleures conditions de travail, les autres veulent efficacité, qualité et souplesse. Face à des intérêts parfois contradictoires, le conflit n’est jamais loin. Avant d’arriver au clash, des solutions existent pour désamorcer les crises. Cette semaine, à l’approche du 1er mai, le JT a enfilé son bleu de travail et est allé voir syndicats, médiateurs et entreprises libérées. Ceux qui, sur le terrain, favorisent le dialogue en entreprise et cimentent les relations patrons-salariés.
Franck Alix /JTAvec un taux de 8%, la France affiche le nombre de salariés syndiqués le plus faible d’Europe. Pourtant, chaque année, les organisations négocient un millier d’accords de branche et 35 000 accords d’entreprise. Ainsi, bien que les Français semblent s’en détourner,ils bénéficient quotidiennement des négociations collectives menées par les partenaires sociaux. Même, « en dehors de leur propre personne et de l’inspection du travail qui veille à l’application de la loi, les syndicats restent le seul outil dont disposent les salariés pour assurer le respect de leurs droits », rappelle Maître Emmanuelle de La Morena, avocate toulousaine, spécialiste en droit social. Et c’est par le dialogue social qu’il est aujourd’hui garanti, au travers de conventions collectives et autres accords interprofessionnels. Cependant, on observe des bouleversements en la matière.
D’abord, parce qu’il y a un basculement des forces syndicales. Si depuis des décennies la CGT demeurait l’organisation la plus représentative, c’est désormais la CFDT, moins réticente à la signature d’accords, qui prend les devants. Selon la Direction générale du travail, cette dernière devance la CGT de 1,52 % dans le privé au niveau national. « Nous n’avons pas encore les chiffres départementaux, mais il semble qu’en Haute-Garonne, notre syndicat enregistre également une augmentation de ses effectifs », constate Thierry Lataste, secrétaire général adjoint de la CFDT31. Son organisation appréhende le dialogue social comme « un outil de négociations collectives, elles-mêmes moyens de transformation sociale. » Autrement dit, « nous nous mettons à table dans l’intention de trouver un consensus qui nous permettra de signer des accords avec le patronat », précise son représentant local. Une majorité de salariés semblent donc abonder en ce sens, estimant que « mieux vaut obtenir un minimum que rien du tout », confie Thierry Lastate.
Ensuite, parce que la loi El Khomri a récemment rebattu les cartes. « Si jusque-là le code du travail est la norme et que les accords de branches primaient sur les accords d’entreprises, la loi Travail est venue inverser cette hiérarchie. Ceci pour élargir le dialogue social en faisant en sorte que les partenaires sociaux négocient au cas par cas, au sein même de chaque société », explique maître de La Morena. Une bonne mesure selon Gilles Nakache, président de la CPME31 (syndicat patronal des petites et moyennes entreprises), qui plébiscite « l’adoption d’accords approuvés par référendum au sein même des entreprises, sous contrôle de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte). » Pour lui, pas de meilleure représentation que la relation directe entre patrons et salariés dans les petites sociétés : « Dépassons le côté politique pour revenir à un dialogue plus sain », pense-t-il. Les syndicats y voient au contraire un risque pour les salariés de se retrouver seuls face à un patron maîtrisant les rouages du dialogue social.
Néanmoins, pour garantir un encadrement strict, des Commissions paritaires interprofessionnelles ont été mises en place (loi Rebsamen) pour assurer une représentation syndicale aux salariés n’y ayant pas accès jusqu’à présent (entreprises de moins de 10 salariés, employeur-particulier…) S’il est trop tôt pour percevoir les retombées de ces évolutions, il est cependant inévitable que les lignes du dialogue social soient amenées à bouger en cette période électorale. Mais en quel terme ?
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