ICI. En 2020, pourra-t-on tous se nourrir dans un rayon de 60 kilomètres autour de chez soi, comme l’a promis la ville d’Albi à ses habitants ? Le chemin semble encore long, mais, c’est indéniable, le locavorisme gagne du terrain. Et interpelle : 2000 personnes au moins sont attendues à Toulouse pour le Locavores fest, ce samedi 20 mai. Puisque manger local est bon pour les papilles, meilleur pour l’environnement et pas forcément plus cher, le JT vous aide à remplir votre frigo. Comme un bon petit locavore.
Sur le papier, le locavorisme ne compte aucun ennemi. Les avantages – meilleure qualité des produits, impact positif sur l’environnement et la santé – sont trop nombreux pour que l’on doute de la démarche. Le mouvement prend incontestablement de l’ampleur et dans la région, le cas d’Albi a encore plus attiré les projecteurs sur cette ambition collective.
En janvier 2016, la préfecture du Tarn formulait en effet en vœu qui a fait grand bruit : atteindre l’autosuffisance alimentaire en 2020. Forcément avec une telle annonce, la ville est depuis scrutée de près. Or pour beaucoup d’observateurs, les avancées sont trop peu prononcées pour atteindre l’objectif. Pour l’instant seul un site de 73 hectares, consacré au maraîchage a fait l’objet d’une acquisition foncière par la ville. Trop peu, comparé aux 250 nécessaires à l’autosuffisance dans ce domaine. Tous type de produits confondus, l’association Terre de liens, elle, estime qu’il faudrait au total 18 000 hectares pour nourrir les 51 000 habitants d’Albi.
Alors, manque de réelle volonté ou mission impossible ? « Avant de répondre, il faut d’abord dresser le constat hérité du mouvement de spécialisation agricole de ces 50 dernières années qui a entraîné un manque cruel de diversité des cultures autour des villes. Un obstacle majeur à l’autosuffisance tout comme l’étalement urbain qui concerne encore plus les villes de taille moyenne », explique Christine Aubry, chercheuse à l’INRA. Pour cette spécialiste de l’agriculture urbaine, les 73 hectares achetés par Albi sont déjà une excellente nouvelle : « cette volonté proactive de préserver des terres agricoles est tout à fait nouvelle, même si elle est difficilement applicable à plus grande échelle. De toute façon, aucune métropole n’a jamais été autosuffisante et l’être à 100% n’est pas forcément souhaitable, ne serait-ce qu’en cas de catastrophe climatique. L’important est de tendre vers une reconquête ».
Il faut donc bien distinguer autosuffisance alimentaire, objectif teinté d’utopie, et locavorisme, véritable mouvement de fond qui incite les urbains à s’interroger sur les conditions des agriculteurs. Et pour Christine Aubry, si l’on est sur le bon chemin, reste à lever des obstacles d’envergure : « Le premier est d’ordre logistique. Pour un producteur, se déplacer en ville est une perte de temps considérable qui impacte sa rémunération. De même, le prix des produits issus de circuits courts reste trop élevé pour les populations à faibles revenus. C’est un enjeu majeur qui nécessiterait de repenser entièrement les critères d’attributions des aides européennes et donc une réelle volonté politique ».
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