Le 2 avril, le site d’information Médiacités révélait de graves dysfonctionnements remontés par le personnel du CHU de Toulouse. Pour l’établissement, ce système d’alerte est la preuve d’une démarche de qualité. Mais le malaise du personnel hospitalier partout en France est bien le symptôme d’un hôpital en détresse. Comment y remédier ?
Plus de 26 000 fiches d’incident enregistrées par le personnel du CHU de Toulouse ont été récemment mises en lumière par Médiacités. Une fuite qui pose de nombreuses questions sur la situation des hôpitaux. Dans un contexte d’économies drastiques sur le budget de l’hôpital public réalisées par le ministère de la Santé – 7 milliards d’euros en dix ans – ces documents révèlent des dysfonctionnements techniques et un manque de personnel chronique qui peuvent s’avérer inquiétants pour les patients. Ainsi peut-on lire sur l’une de ces fiches d’incident que le personnel est « fatigué de ce manque de moyens qui met en danger la vie des patients ». Une diffusion de documents de travail que la communication du CHU de Toulouse juge « inutilement anxiogène pour les patients et leurs proches ».
En effet, pour l’hôpital, qui indique que ces signalements « correspondent à quatre années de recensement », « ces fiches traduisent l’engagement des équipes hospitalières dans la démarche de qualité déployée depuis plus de vingt ans au CHU de Toulouse ». Une charte, intégrée au règlement intérieur du CHU, oblige tout agent à « alerter immédiatement » via un logiciel mis en place en 2017 et accessible à l’ensemble du personnel. Le CHU assure ainsi que « 80 % des fiches de déclaration de 2017 sont clôturées ». Alors que l’une d’entre elles, en 2016, signalait par exemple une porte de sas des urgences défaillante depuis trois ans, le CHU répond qu’il y a eu depuis cette date, « 26 demandes d’intervention prises en compte et traitées » pour des portes « très sollicitées et souvent dégradées ».
Dans un communiqué, la Fédération hospitalière de France Occitanie (FHF) « soutient à 100% les établissements dans leur démarche de transparence pour l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins ». Pour Alexandre Mokede, responsable des questions sanitaires à la FHF, un établissement où il y a beaucoup de fiches d’incidents est, « paradoxalement, un établissement où la parole est libérée. Idéalement, ce genre de dysfonctionnement ne devrait pas arriver mais, s’ils ont lieu, il vaut mieux que l’information remonte. » Mais le spécialiste va plus loin. Les pouvoirs publics doivent se rendre compte « qu’il y a un problème de moyens. Nous appelons à une relance de l’investissement hospitalier. Il est nécessaire de dégager des marges de manœuvre et d’accorder des dettes aux hôpitaux afin qu’ils puissent investir. » Alexandre Mokede rappelle également le dévouement des professionnels de santé et les efforts considérables consentis par les médecins et les soignants. À ses yeux, la qualité de service dans les hôpitaux requiert là aussi « plus de moyens financiers pour leur permettre de mieux prendre en charge les patients ». Sur ce point, le CHU de Toulouse assure que « la sécurité des soins et la qualité des prises en charge prévalent sur tout arbitrage budgétaire » alors que l’établissement est engagé dans un rééquilibrage financier d’ici à la fin de l’année.
Paul Périé
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