L’école Fourio à Launac, près de Toulouse, est l’une des rares en France à être spécifiquement dédiée aux enfants atteints de troubles dys. Du CP au CM2, les élèves profitent pleinement de cette alternative qui leur offre la possibilité d’apprendre à leur rythme, dans un environnement adapté.
Village de 1 500 habitants à une trentaine de kilomètres au Nord-Ouest de Toulouse, Launac possède la particularité d’avoir deux écoles primaires. L’une publique, au cœur du bourg, l’autre privée, 100 mètres plus loin, à la sortie de la commune. Créée en 2009 par l’association Système Dys, l’école Fourio accueille des enfants atteints de troubles dys. Seulement une dizaine d’établissements de ce genre existent en France. Mais à l’heure de la pause matinale, le brouhaha est le même partout. Dans le parc arboré de l’école Fourio qui fait office de cour de récréation, l’universelle partie de foot est stoppée par Noé, désigné pour sonner la cloche.
La quarantaine d’élèves se met en rang le long de la magnifique bâtisse. En entrant, ils troquent leurs chaussures contre des chaussons et se dirigent vers l’une des quatre classes, toutes identifiées par couleur et gérées pas des enseignants formés aux troubles dys. « Quand ils arrivent ici après avoir été diagnostiqués par des professionnels, les enfants passent un test pédagogique pour déterminer leur niveau et dans quel groupe ils commenceront l’année », précise Caroline Delattre, fondatrice et directrice de l’établissement. L’enseignante précède ses 10 élèves dans la classe bleue.
Chacun prend place derrière un pupitre individuel inclinable.Cette semaine, le matin, c’est… « Mathématiques ! » répondent en chœur les enfants. Au programme : une leçon sur les droites. À première vue, rien n’indique les troubles dont souffrent ces écoliers. Comme dans toute classe, il y a celui qui lève systématiquement le doigt, désespérant qu’on lui donne parole. Au fond, près de la fenêtre, il y a aussi celui qui se balance sur sa chaise, à priori plus concentré à faire rire ses camarades qu’à écouter. Sur son cahier, Mathéo enchaîne les exercices à toute vitesse et en redemande à chaque fois. Gabin, lui, traîne ses pantoufles jusqu’au tableau à la demande de la maîtresse. Malgré quelques approximations, ses réponses attestent d’une attention plus poussée qu’il n’y paraît.
« Un enfant dys fonctionne beaucoup par images »
La séquence se conclut par une chorégraphie. En rythme, la classe mime des parenthèses en arrondissant les bras, puis des ciseaux, afin de récapituler les différences entre droites, segments, et demi-droites. « Nous utilisons une méthode plurisensorielle, car un enfant dys fonctionne beaucoup par images. Le but est de rendre l’enseignement le plus concret possible », explique Caroline Delattre. Après la géométrie, place aux nombres. Les enfants chantent la suite des dizaines jusqu’à mille avant de se relayer au tableau pour se concentrer sur la famille des 70 qui, comme celle des 90, pose particulièrement problème aux dys.
Avec des effectifs réduits, l’école Fourio peut adapter le rythme de travail aux besoins de chaque enfant. Elle dispose aussi d’un matériel spécifique : ordinateurs pour les dyspraxiques, guides-doigt, objets à manipuler pour comprendre des notions abstraites comme les divisions… Les cours, eux, sont systématiquement illustrés avec des pictogrammes et disponibles en format mp3.
C’est en hommage à ses parents et à leur combat pour que leurs trois filles atteintes de troubles dys s’en sortent que Caroline Delattre a créé l’association Système Dys, qui propose également des stages et des cours de soutien jusqu’au bac. Devenue statisticienne tout en étant dyscalculique, l’enseignante a voulu offrir aux dys un environnement adapté. « Ces enfants sont tout aussi intelligents que les autres, ils n’ont juste pas la même logique », assure-telle.
« Ces enfants sont tout aussi intelligents que les autres, ils n’ont juste pas la même logique »
Ayant délibérément choisi le statut d’école privée hors contrat offrant ainsi plus de liberté pédagogique, l’école affiche un tarif de 350 euros par mois. Le programme est le même que celui de l’Éducation nationale et, pour rentrer en sixième, les élèves passent un examen de vérification des connaissances qu’ils obtiennent en grande majorité. « Un enfant dys peut tout à fait réussir sa scolarité dans les écoles classiques mais cela dépend de beaucoup de critères. Il faut sans cesse réexpliquer aux nouveaux professeurs, aux nouveaux auxiliaires de vie scolaire. Cela demande énormément d’énergie », développe Caroline Delattre.
En classe, la session matinale se termine par l’écriture des devoirs. Circulant librement, plusieurs élèves proposent spontanément leur aide à ceux qui ont plus de difficultés pour les noter sur leurs agendas. La maîtresse passe dans les rangs pour une dernière vérification. « Avant d’arriver ici, certains élèves avaient manifesté une vraie phobie de l’école. Cela peut parfois être très long mais ils finissent généralement par reprendre du plaisir à apprendre. Nous sommes une passerelle. »
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