En Haute-Garonne, un des départements les plus impactés par l’éventuelle introduction de la proportionnelle aux élections législatives, le sujet divise parmi les députés.
Alors que le projet de loi sur le report des élections régionales et départementales est actuellement étudié à l’Assemblée nationale, le MoDem pourrait profiter de l’occasion pour déposer un amendement instaurant la proportionnelle aux législatives. Depuis plusieurs semaines, le président du parti centriste François Bayrou a en tout cas relancé le débat, pressant Emmanuel Macron de respecter sa promesse électorale. Comme plusieurs de ses prédécesseurs, le président de la République s’était en effet engagé à introduire une dose de proportionnelle aux élections législatives.
Avec 8 députés sur 10 issus de la majorité présidentielle (ils étaient 9 en 2017 avant l’exclusion du groupe LREM de Sébastien Nadot), le département de la Haute-Garonne serait l’un des plus chamboulés par la fin du scrutin majoritaire strict. Sur la base des résultats des élections législatives de 2017, le site d’information politique Contexte a simulé l’effet qu’aurait produit l’introduction de la proportionnelle selon les différents scénarios envisagés.
En appliquant un système calqué sur celui des élections sénatoriales (scrutin majoritaire dans les départements élisant un ou deux députés, scrutin de liste proportionnel à un tour pour les autres), il n’y aurait eu, par exemple, que 5 député LREM (ou alliés) en Haute-Garonne, au lieu de 9. Rien n’aurait changé pour le parti socialiste qui aurait gardé son seul siège. Non représentés actuellement dans le département, Les Républicains et le Rassemblement National auraient, eux, chacun remporté un siège, tandis que la France Insoumise en aurait obtenu deux. Un autre scénario, évoqué par le député Modem Jean-Louis Bourlanges, aboutirait peu ou prou aux mêmes résultats. Il s’agirait d’un scrutin de liste à deux tours, avec une prime majoritaire à la liste arrivée en tête, comme pour les municipales. L’élection se déroulerait dans des circonscriptions réunissant entre un et quatre départements.
Au niveau national comme au niveau local, le sujet divise. Y compris au sein de la majorité présidentielle. Si du côté de La République en Marche, la mise en place de la proportionnelle ne semble pas être une priorité, Jean-Luc Lagleize, député de Haute-Garonne et membre du Modem, en est un fervent défenseur. « C’est un thème que nous portons depuis des années. Il y a une désaffection des Français vis-à-vis des scrutins qui se traduit par une forte abstention. Il faut un système plus juste, qui représente mieux les différents courants politiques et donc les électeurs », plaide le parlementaire.
Et ce, quitte à ce que la majorité, dont il fait partie, perde des députés en Haute-Garonne. « Il y a actuellement une majorité écrasante mais est-ce que cela empêche des situations de blocage sur des dossiers majeurs ? Ce système n’est plus représentatif », poursuit l’élu. Pour ce dernier, il faut donc introduire de la proportionnelle le plus tôt possible, dès les élections législatives de 2022. Quant au mode d’application, il plaide pour « le scénario le plus simple à expliquer, un scrutin par liste dans chaque département, avec un seuil de 5% pour être représenté ».
Une hypothèse qui reviendrait donc à supprimer les circonscriptions actuelles. Et à laquelle s’oppose catégoriquement le seul député socialiste du département, Joël Aviragnet. « Un député porte la voix de son territoire et doit faire prendre en compte ses réalités, qui ne sont pas les mêmes en milieu urbain ou rural, ce qui est mon cas. Si l’on met en place un système de listes par département, on coupe l’élu de sa circonscription, on lui enlève le cœur de sa fonction. Cela ne ferait qu’éloigner l’élu de la population », assure-t-il.
S’il approuve l’idée de la proportionnelle sur un plan théorique, Joël Aviragnet craint donc ses effets pervers dans la pratique, comme l’abandon du monde rural. Une alternative acceptable, pour lui, serait de redécouper les circonscriptions en regroupant celles qui se trouvent dans les zones urbaines. « La mienne est composée de plus de 300 villages tandis que d’autres, en centre ville de Toulouse, sont constitués simplement de quelques quartiers. Il y a matière à rééquilibrer les choses mais il ne faut pas couper le lien entre circonscription et mandat, ce serait grave », avance Joël Aviragnet.
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