Aujourd’hui préparatrice mentale auprès des effectifs du TFC, Nodjialem Myaro est également présidente de la Ligue féminine de handball (LFH). Anciennement joueuse professionnelle, elle a mené une carrière internationale dans les années 2000 aux côtés de l’équipe de France, qui l’a conduit jusqu’au sommet des championnats du monde.
À 45 ans, Nodjialem Myaro cumule de nombreuses casquettes: Elle intervient auprès de l’équipe professionnelle masculine du Toulouse Football Club (TFC) depuis la saison dernière, dirige aussi la Ligue féminine de handball, et exerce le métier de psychologue.
Originaire du Tchad, Nodjialem Myaro et sa famille se sont installés dans le quartier de la Reynerie, à Toulouse, lorsqu’elle avait deux ans. Sa passion pour le handball s’est manifestée dès l’enfance, ce qui l’a poussée à intégrer l’effectif du Toulouse Cheminots Marengo Sports (aujourd’hui Toulouse Féminin Handball) à l’âge de 14 ans. « Je n’avais pas spécialement en tête de devenir professionnelle à cette époque. Je voulais simplement jouer avec mes coéquipières et prendre du plaisir à le faire », confie-t-elle. Mais le destin en a décidé autrement.
Ses qualités techniques et physiques mènent l’adolescente à côtoyer les bancs de l’équipe de France Espoirs durant des stages. « Je ne pouvais pas faire partie des compétitions officielles avec l’équipe junior car je ne possédais pas encore de papiers français. Ce qui a créé une certaine frustration en moi », explique la jeune femme. Mais ce sentiment s’est envolé dès 1996, année de sa majorité, de sa naturalisation et de sa première sélection en équipe de France. Un bonheur pour la jeune femme qui venait aussi de signer, poussée par le sélectionneur national et entraîneur messin Olivier Krumbholz, avec l’ASPTT de Metz.
“La médaille d’argent au championnat du monde de handball de 1999 a une saveur particulière”
Quelques mois après avoir rejoint l’équipe de France, Nodjialem Myaro et ses coéquipières remportent les Jeux méditerranéens. Une première récompense parmi les nombreuses autres qui ont suivi. Mais celle que la joueuse gardera toujours en tête reste « la médaille d’argent au championnat du monde de 1999. Elle a une saveur particulière parce que c’était ma première médaille mondiale. De plus, personne ne s’y attendait. Nous avons simplement gagné les matchs les uns après les autres et nous nous sommes retrouvées sur le podium », se souvient-elle. Quatre ans plus tard, l’équipe de France monte encore d’une marche et remporte le championnat du monde. « Celle-là, nous nous sommes vraiment battues pour aller la chercher », admet la jeune femme.
Mais cette belle époque appartient désormais au passé. Nodjialem Myaro a mis fin à sa carrière sportive en 2013 « pour se concentrer sur sa vie personnelle » et n’a pas touché de ballon de handball depuis des années. « Je n’ai jamais ressenti le manque des compétitions. Arrêter ma carrière était une décision mûrement réfléchie qui m’a permis de ne pas avoir de regret par la suite », affirme-t-elle.
À la suite du décès de Patricia Saurina, alors présidente de la Ligue féminine de handball (LFH), l’ex-joueuse s’est vu proposer la tête de la fédération. « Ça a été une grande surprise étant donné que je n’en avais jamais formulé la demande. D’autant que j’avais plutôt décidé de prendre un peu de temps pour moi. Mais j’ai beaucoup réfléchi, je me suis demandé si je pouvais relever ce challenge et je me suis lancée », avoue celle qui occupe ce poste depuis maintenant neuf ans.
“Plus un sport est mis en lumière, plus il est attractif”
Depuis le début de sa carrière en tant que joueuse, et désormais en tant que présidente de la Ligue, Nodjialem Myaro défend fermement le sport féminin. « Même s’il diminue au fil des années, il existe encore un trop grand écart de visibilité entre les sports masculins et féminins. Les sportives ont besoin d’un sérieux coup de pouce de la part de tous les acteurs du monde du sport pour être mises en lumière. Car plus un sport est mis en avant, plus il est attractif et attire de nouvelles adhérentes. Personnellement, j’ai très envie de leur transmettre l’envie de jouer au handball », ajoute-t-elle.
Ses actions et son engagement l’ont menée, il y a un an, à être nommée “chevalier de l’ordre national du mérite” par le ministère de l’Education Nationale, de la Jeunesse et des Sports. « Il faut d’ailleurs que j’organise la cérémonie pour recevoir la médaille. Nous devions faire un événement commun avec Olivier Krumbholz, qui est également décoré. Mais avec les Jeux Olympiques et la Covid-19, nous n’avons pas pu », sourit-elle. Toutefois, elle aurait préféré recevoir cette décoration aux côtés de son équipe, « en 2003, après le championnat du Monde », poursuit-elle, à l’image de l’équipe de France masculine de handball.
Depuis le début de sa carrière sportive, la handballeuse a jonglé avec ses deux carrières professionnelles : le handball et la psychologie dont elle a fait son métier. « J’ai toujours voulu travailler dans les relations humaines. À la base, je voulais devenir avocate, mais c’était trop complexe. Alors je me suis tournée vers la psychologie pour aider les gens et j’ai trouvé ma voie. De plus, la faculté de psychologie et de santé clinique à l’université de Metz m’a permis de suivre mes études parallèlement à mes entraînements. Les journées étaient chargées, mais j’ai eu la chance de pouvoir allier mes deux passions », avoue-t-elle.
Nodjialem Myaro a commencé à exercer en tant que psychologue dès 2005, alors qu’elle évoluait au Havre. C’est dans un centre communal d’action sociale (CCAS) pour aider les femmes à se réinsérer dans la société après leur sortie de prison, qu’elle vit sa première expérience. Elle a ensuite conservé son activité professionnelle au fil de ses sélections en clubs : à la Réunion où elle travaillait sur l’obésité infantile, ou encore à Nice auprès de jeunes enfants en difficulté. Parallèlement, elle assurait le suivi psychologique des athlètes en rééducation au Creps de Boulouris, dans le Var.
Aujourd’hui de retour à Toulouse, elle poursuit sa carrière de psychologue en libéral. Mais l’univers du sport n’est jamais bien loin de ses activités. En effet, elle assure également la préparation mentale des joueurs professionnels du Toulouse Football Club depuis la saison dernière. Sa mission est d’accompagner les joueurs, comme les membres du staff, sur le plan psychologique. Elle travaille à améliorer la cohésion de l’équipe, mais effectue également un travail individuel avec des séances propres à chaque joueur.
« La préparation physique d’un athlète : c’est la base. On lui demande d’avoir un corps athlétique et de déployer ses qualités techniques au haut niveau. La préparation mentale est complémentaire. Elle crée un équilibre qui permet au sportif d’exprimer la totalité de son potentiel durant les compétitions », explique l’ex-internationale de handball.
“La préparation mentale nous a manqué pendant les Jeux Olympiques”
Lorsqu’elle était joueuse professionnelle, les dispositifs mis en place pour la préparation mentale des sportifs étaient loin d’être similaires à ce qui existe aujourd’hui. « Nous avions quelques interventions de psychologues. Mais aucun préparateur mental propre à l’équipe. C’est d’ailleurs ce qui nous a manqué durant les Jeux Olympiques », regrette-t-elle en évoquant Sydney, en 2000, où les Françaises ont terminé sixièmes, ou encore Athènes, en 2004, où l’équipe est arrivée au pied du podium.
« Les Jeux Olympiques sont des compétitions particulières, symboliques et très médiatisées. Tous les sportifs rêvent de les gagner, ce qui rajoute une pression supplémentaire. De plus, il faut rester focus sur la compétition dans un environnement en totale effervescence. Tout cela en essayant de profiter un minimum de l’événement. C’est psychologiquement très difficile. Alors je ne sais pas si l’accompagnement psychologique nous aurait aidé à ramener une médaille, mais en tous cas, cela nous aurait permis de ressortir moins impactées psychologiquement par la défaite et le stress de la compétition ».
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