Régis Godec, le chef de file des Ecologistes, se présente pour devenir la tête de liste d’une union des forces de gauche (excepté La France Insoumise) en vue des Municipales 2026 à Toulouse. Opposé à trois autres candidats dans cette course (Maxime Le Texier, Isabelle Hardy et François Briançon), il revient sur les négociations qui animent la gauche, les ambitions de son parti et ses aspirations personnelles.
Régis Godec, les militants écologistes se sont prononcés, le 18 septembre dernier, et ont décidé de s’allier à Archipel Citoyen plutôt qu’à la France Insoumise. Êtes-vous satisfait de ce choix ?
Nous avons dû faire le constat, pendant le premier semestre, que la liste commune au premier tour ne serait pas possible. D’abord du fait des positionnements des partenaires : mettre LFI, le Parti socialiste et le Parti communiste sur la même liste semble illusoire aujourd’hui. Le niveau de tension est trop élevé. Ce n’est pas tant pour des raisons liées au projet mais plutôt à cause des échéances nationales, car les Municipales 2026 seront dans l’orbite des Présidentielles. Ainsi, nous nous sommes rapprochés d’Archipel Citoyen, avec qui nous avions pour point commun de faire de l’élection locale un scrutin propre, hors des affres nationales. De plus, nous nous sommes mis d’accord sur le projet politique, la gouvernance partagée, la création d’un collectif pluriel avec des identités politiques différentes, et un processus commun de désignation de tête de liste. Avec LFI, les discussions ont tourné court puisque François Piquemal a posé pour préalable à une union qu’il soit tête de liste, ce qui va à l’encontre de notre démarche.
D’abord, nous mettons en doute la capacité de François Piquemal à arriver en tête au second tour. Il faut rallier, il faut élargir, mais la France Insoumise est dans une logique totalement clivante dans la perspective des Présidentielles. Et ces dernières ne sont pas dans l’agenda de la gauche toulousaine. Après avoir clivé au premier tour, comment pourrait-il prétendre à un rassemblement au second ? Les militants écologistes nous ont suivi sur ce raisonnement, ce dont je me félicite.
Aujourd’hui, vous êtes donc les seuls, parmi les huit formations de gauche à discuter, à avoir acté une alliance, les autres composantes préférant attendre. Quel est votre sentiment ? Comment réagissez-vous face à cet immobilisme ?
C’est très dommageable à la dynamique de gauche. Les Ecologistes considèrent que, maintenant, l’urgence est de s’adresser aux Toulousains et pas de se parler entre nous. De notre côté, auprès d’Archipel, et de Nouvelle Donne, nous avons commencé à leur présenter nos idées en organisant des réunions publiques sur des thèmes différents. Et il aurait été préférable que nous soyons tous présents lors de ces événements, tous les huit. J’ai ainsi le sentiment que nous perdons du temps. Peut-être que tout le monde n’est pas encore certain d’accepter un processus de désignation collective de la tête de liste !
Pour nous, écologistes, les choses sont claires : nous nous soumettrons à la méthode de désignation collective et en accepterons les conséquences. C’est-à-dire que si je ne suis pas désigné, les Ecologistes toulousains se rangeront derrière celui qui aura convaincu les militants. Mais, le temps tourne ! Avec Archipel, nous nous sommes mis d’accord : il faudra qu’à la mi-novembre, nous soyons en capacité de lancer la campagne, et donc d’avoir une tête de liste. On ne peut pas attendre décembre. Si ce n’est pas le cas, les Ecologistes et Archipel présenteront une liste en leurs noms, avec en tête de liste Régis Godec ou Maxime Le Texier !
« Une tête de liste écologiste serait la mieux positionnée pour faire le meilleur score au premier tour »
Cet attentisme semble vous agacer…
Il est précieux de parler d’une seule voix dès le premier tour. Mais si nous ne parvenons pas à faire des arbitrages entre nous, ce sera aux Toulousains de le faire. Et je sens le poids des appareils nationaux peser sur nos échanges, c’est mortifère ! Nous sommes attendus, unis ! Il faut avancer !
En parlant de poids, quel est le votre dans les discussions ? Vous êtes beaucoup courtisé par les différents partis de gauche…
D’abord, cela nous permet de noter une évolution des mentalités. En 2008, les Ecologistes étaient cantonnés aux espaces verts, aux animaux dans la ville… des dimensions purement environnementalistes. Mais depuis, l’écologie est transversale et intègre toutes les considérations et tous les projets. Nos messages alarmistes sur la question du réchauffement climatique, de l’eau, de la pollution, ont été entendus ce qui nous confère un certain poids politique. C’est pour cela que nous sommes tant courtisés. Notamment pour diriger la Métropole de Toulouse, ce qui nous place au centre du jeu.
D’autant plus que si nous nous retrouvons dans une configuration d’une liste la France Insoumise contre une liste de rassemblement de la gauche, nous avons le sentiment qu’une tête de liste écologiste serait la mieux positionnée pour faire le meilleur score au premier tour et préparer les conditions d’un second tour.
Quels seraient les principaux atouts d’une tête liste écologiste ?
Dans l’état actuel des choses, il sera difficile à LFI de venir au soutien au second tour d’une liste qui serait conduite par un socialiste. Si c’est un candidat écologiste qui est tête de liste, les choses seront sans doute plus faciles et leur électorat viendra plus facilement vers nous. Ce qui nous met en situation de dépasser le seuil des 50%, en imaginant qu’il y ait deux listes au second tour.
De plus, nous avons démontré dans plusieurs grandes villes de France depuis 2020, depuis 2014 pour certaines, à l’image de Montreuil, de Grenoble, de Bordeaux, Lyon, Strasbourg, Tours ou Poitiers, que nous avions la compétence et la capacité de gérer de grandes villes et métropoles.
Nous sommes également capables de construire des compromis politiques pour préserver la qualité de vie de notre agglomération, mais aussi son dynamisme, notamment économique. Par exemple, nous sommes pour la mise en place de l’encadrement des loyers, et notre politique du logement est audacieuse, mais nous ne souhaitons pas faire la guerre aux promoteurs.
Nous sommes donc sérieux, responsables, compétents et crédibles.
« Je suis connecté à la vie quotidienne des Toulousains »
Vous êtes donc le candidat écologiste à la candidature de l’union de la gauche. Quels sont vos atouts personnels ?
D’abord, j’incarne l’équilibre entre le renouvellement et l’expérience. J’étais dans l’équipe 2008-2014, aux côtés de Pierre Cohen. Je connais donc les instances de la Ville et de la Métropole. Je connais le positionnement par rapport aux services, par rapport aux équilibres politiques des élus. Et j’ai des éléments à mon bilan qui sont aussi reconnus, notamment l’écoquartier de la Cartoucherie. Je peux mettre tout ceci en avant, j’ai l’expérience de la gestion d’une collectivité.
Une vie politique dont je me suis toutefois éloigné quelque temps. Cela m’a permis de prendre du recul. Et de pouvoir affirmer que je suis connecté à la vie quotidienne des Toulousains. Je suis bibliothécaire à la bibliothèque départementale de Labège, je suis donc confronté aux mêmes difficultés que mes concitoyens : les transports en commun, les embouteillages… C’est la réalité des habitants de la Ville rose, et c’est la mienne, tous les jours ! Je peux donc comprendre et mesurer pleinement leurs préoccupations. J’apporterai donc un certain renouvellement.
Pour finir, on me prête la qualité de savoir produire de l’intelligence collective. C’est-à-dire d’avoir des aptitudes de leadership, mais pas un leadership à l’ancienne où le maire donne la ligne politique et les autres l’applique. J’ai plutôt la capacité à faire émerger des projets, à créer de l’émulation, et à l’incarner au travers de la fonction de tête de liste, ou de maire.
Je pense avoir le bon profil pour donner de la crédibilité à notre programme d’union. D’ailleurs, les partenaires le reconnaissent puisqu’ils me proposant d’être président de la Métropole… C’est bien qu’ils considèrent que j’en suis capable !
Justement, les formations de gauche avec qui vous êtes en discussion pour une union, semblent penser que la place des Ecologistes est à la Métropole. Qu’en pensez-vous ?
La difficulté est que les élections à Toulouse Métropole sont en réalité un autre scrutin. Et que, dans cette assemblée, le poids des Ecologistes n’est pas le même dans les autres villes de l’agglomération que dans celle de Toulouse. Nous serions donc très très loin d’avoir une majorité d’élus au conseil métropolitain. Ce qui rend compliqué, évidemment, l’exercice de la présidence. Il faudrait un contrat politique extrêmement fort avec les maires des autres communes. Ce qui reste à construire. Et, à ce jour, nous n’avons pas eu de propositions d’échanges avec les maires des autres communes pour savoir quel serait le projet. Il n’est pas certain que tous ceux de gauche partagent nos propositions sur l’évolution du PLUI-H, sur le RER métropolitain, sur les grands projets d’infrastructures routières, la Jonction Est, le Boulevard urbain, la gestion de l’eau… Je pourrais assumer les fonctions de président de la Métropole, mais pour le faire, il faudrait que le contrat politique soit solide, très solide, avec les autres villes. Car, ces dernières ne sont pas à dominante écologiste, elles sont plutôt à dominante socialiste. C’est donc au Parti socialiste, soit d’assumer cette responsabilité de présidence de la Métropole, soit de donner les garanties et de démontrer que le projet qui serait porté par un écologiste serait soutenu par les maires des autres villes. Pour donner un exemple, celui du zéro artificialisation net (ZAN). Les Ecologistes ne sont pas pour sacrifier des espaces, que l’on appelle des ENAF, et donc retoucher à des éléments du PLUI. Pour autant, d’autres maires dans le périurbain, peuvent être intéressés pour construire une zone de logement, une zone d’activité, ou autre. Si j’assume la fonction de président, je ne reviendrai pas sur ces éléments-là. Serions-nous alors en désaccord sur le projet politique ? Ce serait grave ! Mais avant de parler de la Métropole, il faut gagner Toulouse…
« La présidence de la Métropole n’appartient à personne »
Si vous êtes désigné tête de liste de l’union de gauche, et que vous gagnez les Municipales, selon votre souhait de gouvernance partagée, vous ne pourriez de toute façon pas être président de la Métropole…
Tout à fait ! Donc rien n’est acté. Sans compter que la présidence de la Métropole n’appartient à personne, donc personne ne peut la promettre. Elle appartient… enfin, elle devrait appartenir… à l’ensemble des conseillers métropolitains. On pourrait imaginer que ceux de Toulouse s’entendent sur le fait que la présidence soit assumée par le représentant d’une autre commune. Ou qu’il s’agisse d’un membre de l’équipe municipale de Toulouse, qui ne soit pas le maire. Mais, c’est toujours très compliqué de spéculer sur le “troisième tour” tant que l’on n’a pas gagné le premier. Et pour ce dernier, je pense qu’un candidat écologiste est le mieux placé pour remporter la Ville.
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