Le Festival de rue de Ramonville, rendez-vous incontournable des arts de la rue en région toulousaine, traverse une période critique, comme de nombreux événements et associations. En effet, en 2025, l’austérité budgétaire des collectivités territoriales frappe de plein fouet cette manifestation emblématique. Malgré son attractivité croissante et une fréquentation de 40 000 personnes en 2024, le festival est menacé par des coupes financières massives. Son programmateur, Pierre Boisson, revient sur une situation devenue « très délicate ».
Face au contexte économique et budgétaire de 2025, le Festival de rue de Ramonville est contraint à un jeu d’équilibriste. S’adapter sans renier son ADN, maintenir une qualité artistique avec des moyens en baisse, et continuer d’accueillir un large public sans basculer dans la précarité : telle est l’équation. En effet, avec les différentes coupes budgétaires qu’il a subi pour sa 38e édition, prévue du vendredi 12 au dimanche 14 septembre prochain, l’événement pourrait bien changer de format à l’avenir.
« 2025 est une année très difficile pour les acteurs culturels », pose d’emblée Pierre Boisson, le programmateur de l’événement. Le Festival de rue de Ramonville, unique en son genre dans la région toulousaine, n’échappe pas aux restrictions budgétaires imposées par les collectivités.
La situation est d’autant plus critique que la commune de Ramonville-Saint-Agne, avec ses 15 000 habitants, ne fait pas partie de Toulouse Métropole, mais dépend de la communauté d’agglomération du Sicoval. Pour les organisateurs, cette dissociation structurelle crée un « hiatus » entre la taille de l’événement et les capacités financières de ses partenaires territoriaux. Ils avaient alors commencé à tirer la sonnette d’alarme à l’issue de la précédente édition du festival, en 2024. Car face à un afflux de spectateurs toujours croissant, les équipes doivent faire face à une hausse des dépenses.
Puis, le contexte économique national s’est ajouté aux craintes budgétaires, déjà existantes. Selon le programmateur du festival, plusieurs financeurs ont considérablement réduit leur soutien :
Au total, le festival perd environ 60 000 euros, sur un budget global légèrement supérieur à 400 000 euros. « Pour nous, c’est énorme », résume Pierre Boisson.
Cette baisse des moyens impacte sévèrement le cœur du festival. La programmation a été la première à subir des coupes : « Nous avons enlevé un quart de la programmation officielle, en passant de 22 à 16 compagnies invitées », détaille le programmateur.
Certaines propositions artistiques ont également été supprimées. Exit les gros formats : spectacles avec de nombreux comédiens, scénographies importantes ou dispositifs techniques complexes. De même, l’un des trois espaces de convivialité, lieux mêlant concerts, food trucks et buvettes, ne sera pas mis en place cette année.
De plus, si la programmation du dimanche est finalement confirmée, elle aura bien failli être annulée. « Nous réduisons la voilure alors que nous nous attendons à toujours plus de monde. Nous avons du mal à anticiper ce que l’avenir nous réserve », déplore Pierre Boisson.
Accueillir 40 000 spectateurs sur trois jours, au cœur de Ramonville, nécessite une logistique dense. Sécurité, gestion des flux, infrastructures temporaires : tout est à la charge d’une association « modeste » en co-organisation avec une collectivité impactée par les coupes budgétaires de l’État, comme le rappelle Pierre Boisson.
La solution se trouverait-elle dans la limitation de l’accès via une jauge ou un contrôle d’entrée ? « C’est antinomique avec notre modèle », affirme le programmateur. En effet, le festival repose sur un accès libre, gratuit, ouvert, fidèle aux valeurs des arts de la rue. Fermer la ville serait non seulement logistiquement irréaliste mais aussi contradictoire avec la philosophie du projet : « Ce serait empêcher la rencontre, la déambulation, la surprise », insiste-t-il.
Toutefois, des solutions doivent être envisagées pour permettre la survie du festival dans son format actuel. Ainsi, pour compenser la perte de subventions, les organisateurs ont accentué les efforts sur les recettes propres : ventes à la buvette, restauration, contribution volontaire des spectateurs, ou encore quelques spectacles en billetterie. Ce « fonctionnement mixte » reste cependant fragile, notamment à cause d’un facteur non négligeable : la météo.
« Plus nous développons les recettes propres, plus nous devenons tributaires du temps qu’il fait », nuance le représentant du Festival de rue de Ramonville. Une édition pluvieuse ferait effectivement chuter drastiquement les recettes bars ou billetteries, alors que les cachets des artistes resteraient dus. Cela représente donc un déséquilibre à haut risque pour les organisateurs.
Malgré tout, quelques acteurs territoriaux ont consenti un effort : le Sicoval a augmenté sa subvention de 5 000 euros, et Ramonville, en plus d’une hausse de l’enveloppe budgétaire, met à disposition davantage de moyens techniques. C’est pourquoi, la 38e édition du Festival de rue de Ramonville poursuit sur sa lancée : « Nous nous sommes dit que nous allions tenter de maintenir un festival normal pour 2025. Nous verrons après coup si nous avons eu raison ou si cela met trop en difficulté l’association », ajoute Pierre Boisson.
L’avenir dépendra en grande partie de l’accueil du public et des conditions météorologiques. En cas de déficit, un appel à soutien post-festival n’est pas exclu. Les organisateurs en ont donc conscience : sans un soutien plus affirmé des pouvoirs publics, l’édition 2025 pourrait bien être la dernière sous sa forme actuelle.
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