Originaire de Colomiers, Anne Fotso a largement contribué à la réussite de la cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques de Paris 2024. Elle était l’assistante du chorégraphe renommé Alexander Ekman et la dance captain qui a dirigé les 150 danseurs de l’événement. Portrait d’une femme de talent qui, à force de travail et d’abnégation, compte désormais parmi les meilleures danseuses contemporaines du moment.
Lunettes noires, costard cravate et chemise blanche, elle est debout sur un piano à queue, au milieu d’une centaine de danseurs et performeurs. Un instant suspendu qu’elle n’oubliera jamais, et pour cause. Nous étions le 28 août 2024, place de la Concorde à Paris, et Anne Fotso dansait alors pour la cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques de Paris 2024. Mieux, elle en était la dance captain et a assisté le chorégraphe Alexander Ekman dans la conception de ce spectacle grandiose. « Une véritable consécration » pour elle, qui danse depuis son plus jeune âge.
Originaire de Colomiers, c’est dans sa ville qu’Anne Fotso débute la danse à tout juste 5 ans. Inscrite dans un cours de modern-jazz, elle s’ouvre rapidement à d’autres genres, tentant de trouver son style. Elle enchaîne alors les stages de hip-hop, de danse africaine, de classique… Et c’est finalement vers la danse contemporaine qu’elle se tourne définitivement. Une discipline dans laquelle elle s’épanouit totalement : « C’est ce qui me procure le plus d’émotions. Le peu de codification de cet art permet d’explorer, d’être plus libre, de créer. Il existe d’ailleurs autant de styles que de danseurs contemporains. » Le sien mêle la technique, la grâce et le sport. « Je pratique une danse assez physique. J’aime cette dimension de performance, d’endurance et de force ! » Un goût prononcé pour l’effort dans lequel elle trouve son équilibre.
Ainsi, à force de pratique, et « grâce à une super prof’ qui a su me transmettre son amour pour la danse », est née une véritable passion, qui lui permet de s’exprimer. « Pour faire passer des émotions, je suis beaucoup plus à l’aise en dansant qu’à l’oral », confesse Anne Fotso. Elle se lance alors à corps perdu et redouble de travail pour, pourquoi pas, en faire son métier. Mais à 20 ans, une maladie, lui provoquant de vives douleurs au dos, la contraint à abandonner cette idée.
Même si elle continue à danser en amateur, elle doit alors revoir ses plans de carrière et choisir une nouvelle voie. Avec un père avocat et une mère dans l’inspection académique, cette dernière est toute tracée : ce sera le droit. « J’étais immature et je me suis contentée de suivre », commente-t-elle. Son Master 2 de droit des affaires internationales en poche, obtenu à l’université de Toulouse, elle se destine à être juriste dans le monde du luxe. Un univers où les opportunités sont parisiennes. En 2014, elle quitte donc la région toulousaine pour rallier la capitale et honorer son premier contrat, chez Hermès.
Parallèlement, elle découvre à Paris un système de cours de danse à la demande, flexibles, payables à la séance et s’étalant de 8h à 23h : « C’était idéal pour moi ! Cela me permettait d’y aller quand je voulais, et de participer à des sessions de différents styles », se rappelle-t-elle. Une latitude dont elle profite pour reprendre la danse de manière intensive. A raison de trois heures par jour, elle travaille d’arrache-pied et atteint un niveau tel qu’elle se fait remarquer par ses professeurs, également chorégraphes, qui lui proposent de plus en plus de projets professionnels. « J’ai débuté par un clip, puis une publicité, un spectacle… », énumère-t-elle. Elle commence à poser des congés pour honorer ses contrats artistiques. Et de fil en aiguille, l’espoir de pouvoir faire de sa passion un métier resurgit.
Les opportunités s’enchaînent et Anne Fotso décide enfin de sauter le pas. « C’était juste après le premier confinement, en 2020 », se souvient-elle. Elle démissionne de son poste de juriste et se lance dans cette nouvelle aventure. Un choix qui, dans un premier temps, inquiète sa famille pour qui il est difficilement concevable de quitter un emploi stable pour celui d’intermittent du spectacle. Appréhension qui a rapidement fait place au soutien, au regard de l’épanouissement de la danseuse, qui ne ménage pas son temps ni ses efforts.
Peu de temps pour les loisirs, une vie sociale ou de famille, la danse est prioritaire, centrale, fondamentale : « Mon compagnon sait qu’il s’agit d’une passion dévorante et le respecte. En revanche, cela n’est pas toujours évident. Je n’ai pas beaucoup de jours off ni de soirées, pas d’horaires fixes, je voyage souvent… » Quant aux enfants, ils n’étaient pas, jusque là, à l’ordre du jour : « Mon corps est mon outil de travail, alors… », lance-t-elle songeuse. Mais à 34 ans, elle pense faire évoluer sa carrière : « Je vais me diriger vers la chorégraphie », annonce-t-elle, ouvrant ainsi le champ des possibles… Une perspective largement appuyée par son expérience en tant qu’assistante du chorégraphe Alexander Ekman.
Sa rencontre avec cet artiste de renommée mondiale aura marqué un tournant dans la vie d’Anne Fotso. Bien avant l’aventure des Jeux Olympiques, il cherchait des danseurs pour participer à un laboratoire de recherche chorégraphique. La jeune danseuse postule, est retenue, et travaille 15 jours avec Alexander Ekman. « On s’est tout de suite bien entendus, tant sur le plan artistique que sur le plan humain », explique-t-elle. Complicité telle qu’il lui demande de l’assister dans son prochain projet : la mise en scène et la direction artistique de la cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques de Paris 2024. Proposition que la Columérine ne peut pas refuser.
Aux côtés d’Alexander Ekman, Anne Fotso a fait passer les auditions des 150 danseurs qui ont officié lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques de Paris 2024, elle s’est assurée de la bonne application de la vision artistique et chorégraphique de la cérémonie en étant dance captain et, il ne pouvait en être autrement, elle a dansé devant plus de 65 000 spectateurs et des millions de téléspectateurs. « Je pense avoir été digne de la confiance qui m’a été accordée », se félicite celle qui, encore quelques secondes avant le début du show, « était tête dans le guidon pour s’assurer que tout était prêt ! » Ce n’est qu’à son entrée sur scène qu’elle prend conscience de ce qu’elle vit : « Waouh ! Je suis à la cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques ! »
15 jours après, l’adrénaline et l’excitation sont retombées et Anne Fotso prend du recul : « Ça valait tous les efforts, les plus de 500 heures de répétitions, les sacrifices. Je suis très fière du travail accompli… Mais je suis vidée, fatiguée ! » dit-elle en souriant. L’heure est donc à la récupération… mais pas longtemps. La danseuse est déjà sur un nouveau projet avec la chorégraphe Manon Bouquet.
Commentaires