Des enfants en danger sur liste d’attente, des travailleurs sociaux en sous-effectif, des lieux d’accueil qui débordent, une prise en charge défectueuse… Les salariés de la Maison départementale des solidarités d’Aucamville sont tous en grève pour dénoncer la défaillance de l’Aide sociale à l’enfance et leurs conditions de travail. D’autres pourraient rallier le mouvement…
Depuis ce mardi 5 novembre, l’intégralité des salariés du service Aide sociale à l’enfance de la Maison départementale des solidarités d’Aucamville est en grève. Ils dénoncent « le manque de moyens, humains et financiers, qui ne leur permet plus de protéger les enfants en danger ». Une situation qui touche l’ensemble de la Haute-Garonne, et pour laquelle les travailleurs sociaux alertent le Conseil départemental, compétent en matière de protection de l’enfance, depuis plusieurs années. Dans le Nord toulousain, « les difficultés sont encore plus importantes depuis le mois de juillet dernier : de plus en plus d’enfants nous sont confiés, mais nous ne disposons pas d’assez de places pour les accueillir ; nous ne sommes pas non plus assez nombreux pour les prendre en charge ; et pour couronner le tout, le juge des enfants de notre secteur est en arrêt de travail depuis cet été… » déplore Laura Casimir, référente ASE (Aide sociale à l’enfance) à la MDS d’Aucamville.
La situation est donc particulièrement alarmante. En effet, les mesures administratives et judiciaires s’y multiplient. En cinq ans, « nous sommes passés de 160 à 210 enfants pris en charge par la MDS », précise une secrétaire. D’après Laura Casimir, ce phénomène résulte, entre autres, de deux facteurs : « Le premier étant les conséquences de la pandémie de Covid-19 où le mal-être et la précarité ont explosé de manière générale. Le second est propre à notre territoire de compétence car, à Saint-Jory, de nombreux logements sociaux ont été construits, augmentant ainsi la part de population fragile, sans prévoir les accompagnements appropriés », explique-t-elle.
Ainsi, à la MDS d’Aucamville, 210 enfants sont actuellement suivis, par huit référents ASE (chargés de leur trouver une famille d’accueil ou une structure adaptée, de leur assurer des soins et une scolarité, et d’organiser les droits de visite des parents…), une technicienne d’intervention sociale et familiale (TISF), deux psychologues, et trois secrétaires. « Chaque référent s’occupe de 25 enfants, c’est énorme ! » témoigne Laura Casimir. Mais certains sont encore sur liste d’attente : « 28 enfants patientent actuellement, dans leur environnement dangereux. Nous ne disposons plus de solutions pour les extraire de leur foyer défaillant ! » regrette-t-elle. Toutes les familles d’accueil ont atteint, voire déjà dépassé, leur nombre maximal d’agréments, « certaines accueillant jusqu’à 8 enfants en même temps », constate la référente. Et les structures spécialisées sont pleines : « Des bébés sont posés, dans leur cosi, dans les couloirs du service d’urgence de l’aide sociale à l’enfance (CDEF) ». Selon les salariés de la MDS, il manquerait ainsi une trentaine de places, mais aussi un poste de référent ASE, un psychologue et une technicienne d’intervention sociale et familiale.
Des conditions « qui ne permettent plus d’assurer la mise à l’abri des enfants en danger ». Selon la travailleuse sociale, son service n’effectue plus le suivi des placements à domicile, suivant lequel un enfant est maintenu chez ses parents sous condition d’une intervention des travailleurs sociaux deux à trois fois par semaine. « Cette prise en charge est sous-traitée à l’association Le Chêne Vert. Et nous venons d’inscrire une petite fille sur leur “liste d’attente”. Elle est 50e… » déplore Laura Casimir. Un constat qui va bien au-delà d’un simple retard administratif, « les enfants qui attendent une place sont réellement en danger, parfois de mort », alerte-t-elle, faisant référence à une jeune fille ayant fait plusieurs tentatives de suicide en attendant son placement, ou encore à ce petit garçon de 8 ans, porté disparu avant d’avoir pu être pris en charge par l’ASE.
Les salariés du service Aide sociale à l’enfance de la MDS d’Aucamville, en grève, demandent donc la création de postes supplémentaires et l’ouverture de places pour l’accueil des enfants. Une pétition est d’ailleurs en ligne pour appuyer leurs revendications. Elles ont également été présentées, ce mardi 5 novembre, à une délégation du Conseil départemental de Haute-Garonne, composée notamment de Jean-Michel Fabre, vice-président en charge de l’Action sociale de proximité et Annie Vieu, vice-présidente en charge de la Protection de l’enfance. « Ils ont entendu, mais ne peuvent rien faire ! Il n’y aura pas de création de postes. Et pour libérer des places d’accueil, il a été évoqué la solution de ne plus prendre en charge les majeurs (l’ASE accompagne les enfants et jeunes de 0 à 21 ans, NDLR). Ce que nous ne pouvons entendre ! » relaye Laura Casimir.
« Le Conseil départemental, à l’instar de l’ensemble des Départements de France, est confronté à une situation budgétaire inédite, au regard des mesures annoncées dans le cadre de la Loi des Finances 2025. Ces deux dernières années, le Conseil départemental a perdu 253 millions d’euros de recettes, tandis que les besoins de la collectivité sont en hausse », précise la collectivité. Sébastien Vincini, président du Départemental et les élus, se disent cependant « déterminés à faire entendre leur voix au niveau national pour que des solutions concrètes soient établies, afin de retrouver la viabilité financière qui permettra d’assurer les missions essentielles du Conseil départemental dont l’action sociale reste l’ADN ».
Dans l’expectative, les salariés de la MDS restent en grève et pourraient être rejoints par ceux de 27 autres Maisons départementales des solidarités de Haute-Garonne. Une décision qui sera prise lors d’une réunion de l’intersyndicale, le 26 novembre prochain.
Commentaires
Lauze le 13/12/2024 à 20:28
J espère que il vont régler se problème car c est urgent