Alors que l’actualité a été marquée par des installations illégales de gens du voyage, les intercommunalités doivent répondre à plusieurs obligations concernant leur accueil ; où en sont celles de la région de Toulouse à ce sujet ?
L’occupation illégale de terrains par des gens du voyage a marqué l’actualité de ces derniers mois en Haute-Garonne. Cela s’est notamment produit à Ramonville-Saint-Agne où 700 caravanes se sont installés dans le parc des Cinquante le 1er septembre dernier. Un rassemblement organisé par l’association évangéliste tzigane “Vie et lumière”. Celle-ci « avait fait part de longue date aux services de l’État de sa volonté d’organiser un rassemblement en Occitanie » faute de pouvoir se réunir en Île-de-France à cause des Jeux olympiques de Paris 2024, fait savoir la préfecture de la Haute-Garonne. Mais les services de l’État dans le département, qui recherchaient « auprès des collectivités territoriales et des autorités militaires un terrain d’une capacité suffisante (10 à 12 hectares), notamment en Haute-Garonne », n’avaient pas réussi à trouver le lieu adéquat. « Nous n’avions pas de quoi recevoir, dans des conditions convenables, 700 caravanes, soit environ 2 000 personnes », rapporte Pablo Arce, 8e membre associé du Bureau politique du logement et politique d’accueil des gens du voyage et adjoint au maire de Ramonville-Saint-Agne.
Alors, les caravanes ont investi le parc des Cinquante, d’une surface de 17 hectares, pour une durée de deux semaines. Et n’ont pas été délogées. « En raison de la brièveté du temps d’installation (15 jours), une opération d’évacuation serait compromise, d’autant plus dans une période où les forces de l’ordre locales sont fortement mobilisées à l’extérieur du département (par les Jeux paralympiques, NDLR) », expliquait la préfecture. Ce qu’a dénoncé la Ville de Ramonville-Saint-Agne qui avait tenu à rappeler que la communauté d’agglomérations du Sicoval, dont elle fait partie, est « fortement engagée sur la question de l’accueil des Citoyens français itinérants ». En effet, elle est l’un des seuls Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de Haute-Garonne à être en conformité avec le schéma départemental d’accueil des gens du voyage (SDAHGV). Ce dernier, comme le précise la préfecture, « vise à établir la liberté d’aller et venir et l’aspiration des gens du voyage à pouvoir stationner dans des conditions décentes, tout en permettant d’éviter des installations illicites ». Et ce, en précisant le nombre, la localisation et la capacité des équipements d’accueil des gens du voyage à créer.
Avec celui-ci, les communes et intercommunalités ont donc l’obligation de se doter d’aires d’accueil, prévues pour le séjour des gens du voyage « pendant une période qui peut durer plus de trois mois », mais également d’aires de grands passages, « ayant vocation à accueillir, temporairement, des groupes importants pouvant représenter jusqu’à 200 caravanes voyageant ensemble vers des lieux de grands rassemblements ». « Du mois de mai au mois de septembre, des groupes de la communauté des gens du voyage se réunissent et passent dans toutes les régions pour rejoindre un lieu de rassemblement, soit à vocation cultuelle, soit à vocation familiale. Ces rassemblements sont programmés à l’avance, encadrés par un ou plusieurs responsables de la communauté, en général, des pasteurs évangéliques », détaille Pablo Arce. Ce qui a donc été le cas à Ramonville-Saint-Agne en ce début du mois de septembre.
Enfin, le schéma impose la mise à disposition de terrains familiaux locatifs « répondant aux besoins d’ancrage ». « En clair, il est loué aux familles des terrains dotés d’une structure en dur où on retrouve toutes les commodités, c’est-à-dire une cuisine, une salle de bain et une pièce à vivre, et de places pour mettre les caravanes qui restent le lieu d’habitation principal. Mais elles disposent d’une adresse, comme si elles étaient dans un appartement », explique l’élu. L’objectif avec cette mesure : « Libérer des places dans les aires d’accueil saturées ». « On fait face à un phénomène de sédentarisation de certains gens du voyage au sein de celles-ci. Ce qui empêche les autres d’aller et venir dans les aires d’accueil », rapporte Pablo Arce. Un phénomène accrue par le manque d’équipements. Effectivement, en Haute-Garonne, seulement 50% des objectifs du schéma d’accueil des gens du voyage 2020-2025 sont atteints et uniquement 3 EPCI du département sont en conformité avec les obligations de celui-ci.
Ce qui signifie que 16 ne le sont pas. « On ne peut que regretter le fait que les prescriptions du schéma départemental d’accueil des gens du voyage 2020-2025 en Haute-Garonne ne soient toujours pas assumées à ce jour », déplore la préfecture. D’autant que si une intercommunalité n’est pas conforme, les services de l’État ne peuvent pas ordonner directement une évacuation pour campement illicite d’un terrain. En effet, une procédure juridictionnelle doit être lancée et c’est au « juge des référés de rendre une ordonnance d’expulsion », soulignent-ils avant de préciser que trois aires de grands passages doivent être créées « d’ici à 2025 au plus tard, sur les territoires de Toulouse Métropole, du Muretain Agglomération et du Pays Sud Toulousain ». En attendant, le Sicoval s’en retrouve impacté. « Le fait qu’il manque des équipements sur d’autres territoires entraîne une saturation et une sédentarisation sur nos aires, faute de places ailleurs », déplore Pablo Arce avant d’ajouter : « Le Sicoval essuie l’incurie des autres ».
Si la communauté d’agglomération du Sud-Est de Toulouse est parvenue à être en conformité avec le schéma départemental d’accueil des gens du voyage, c’est parce qu’elle a notamment bénéficié des équipements créés par les communes qui la composent, comme Ramonville et Labège qui répondaient déjà aux obligations du SDAHGV. Effectivement, depuis le 1er janvier 2017, la gestion des aires des gens du voyage est passée des mains des communes à celles des communautés de communes et d’agglomérations. « Quand cette compétence a été transférée vers l’intercommunalité, les équipements et les aires ont été reversés au Sicoval. Celui-ci s’est donc retrouvé naturellement équipé pour accueillir les gens du voyage », indique Pablo Arce. Pour les autres intercommunalités, c’est moins simple. Ainsi, Toulouse Métropole, qui veut créer une aire d’accueil de grand passage pour les gens du voyage au Nord de l’agglomération, se retrouve confronté à une forte opposition des élus et habitants, compromettant le projet…
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