[En Immersion] Au lycée de la Nouvelle Chance

Audrey Sommazi

[En Immersion] Au lycée de la Nouvelle Chance

[En Immersion] Au lycée de la Nouvelle Chance

Audrey Sommazi
Photos : Franck Alix / JT
2 février 2017

Des cours en petit groupe, des relations professeurs-élèves privilégiées et une absence de sanctions. Autant de conditions de travail mises en place par le lycée de la nouvelle chance à Toulouse pour permettre à des décrocheurs de reprendre le chemin de la terminale.  Le Journal Toulousain s’est glissé dans les couloirs de ce lieu unique dans la région.

13h30 ce jeudi. La cloche retentit...

Marie, Éva, Léa, Paul et Victor, élèves en terminale au lycée de la nouvelle chance à Toulouse (Raymond Naves), grimpent les étages dans la bonne humeur, sans trainer les pieds, jusqu’à leur salle de classe. Avec un grand sourire chaleureux, Sylvie Cousinié, professeur de physique-chimie, démarre la leçon consacrée aux protons. Patiente, elle ponctue chacune de ses phrases par : «Est-ce que ça va ?» ou «Avez-vous des questions ?» Elle dicte son cours de chimie avec des mots simples avant d’enchainer avec des exercices pratiques. Sans les quitter des yeux, elle descend de son estrade pour passer entre les tables. Elle jette un œil à leur copie et les corrige individuellement, sans lever le ton.

Quatre étages plus bas, Marie apprend le japonais avec son professeur. Côte à côte, ils sont debout au tableau. L’enjeu est de taille : l’épreuve Langue vivante 2 est coefficient 4 au Bac L. Or, selon son professeur, la jeune femme de 20 ans n’a pas le niveau requis. Alors il adapte ses cours. «Nous travaillons l’écrit en accéléré pour qu’elle puisse comprendre l’énoncé, nous devons faire simple et efficace. L’oral, ce sera pour plus tard», explique Kévin Razalimandimby, son professeur.

Selon l’Éducation nationale, ils seraient entre 120 000 et 150 000 par an à quitter les bancs du lycée sans diplômes. «Je n’aimais pas les cours car nous étions trop nombreux. Depuis la seconde, je n’avais plus de motivation et je n’arrivais pas à me lever», raconte Paul, 19 ans qui a arrêté le lycée en décembre dernier. «Quelques mois plus tard, j’ai été contacté par une association qui lutte contre le décrochage scolaire. Elle m’a dit que j’avais des capacités et que je devais me présenter au lycée de la nouvelle chance.» Marie, elle, cumulait petits boulots et lycée. Résultat : trop absente, elle échoue deux fois à l’examen.

La première classe de terminale a effectué sa rentrée en septembre dernier dans l’enceinte du lycée Raymond Naves. Entourée par une équipe de vingt-deux enseignants, elle compte 28 élèves pour une capacité de 32 par classe. Ils suivent des cours de terminale dans quatre filières (S, L, ES et Sciences et technologies du management et de la gestion), en petits groupes, de trois à douze personnes.

 

Une ambiance plus conviviale

«Les rapports avec les professeurs sont moins stricts et c’est motivant. On rigole avec eux. Des fois, on se trompe et on les tutoie», souligne Paul. Les effectifs plus réduits permettent au corps enseignant de travailler au plus près des difficultés des élèves. «Je suis beaucoup plus proche d’eux qu’avec des lycéens d’un établissement traditionnel. Je les aide en prenant la température : je regarde les termes et les consignes sur lesquels ils butent. Ce qui m’oblige à revoir ma pédagogie et à m’adapter. C’est ma vocation et c’est très enrichissant», explique Sylvie Cousinié. Mathieu Robelin, professeur de sciences économiques et sociales, lui, «trouve du sens» dans ce dispositif. «On s’occupe de leur transmettre des connaissances, on suit leur parcours, on apprend à les connaitre».

«Ici, nous n’avons pas les mêmes enjeux que dans un établissement sélectif qui convient aux bons élèves, socialement avantagés. Le système comble la faille en ouvrant ce lycée, dont l’objectif est de remettre ces élèves dans une scolarisation et une sociabilisation», explique Cécile Flodrops, coordinatrice du lycée.

Malgré ces conditions de travail incitant les élèves à venir en cours, certains “raccrocheurs” restent fâchés avec les horaires. La solution n’est cependant pas la sanction. «Au contraire, les élèves sont traités avec bienveillance. Il n’existe pas d’heures de retenue ni d’avertissements. Mais on les remotive, on garde le contact pour n’exclure personne. En cas d’absence, je leur envoie un SMS et tous les professeurs acceptent les retards», précise Cécile Flodrops. De plus, pour suivre leur parcours scolaire, les élèves sont guidés par un professeur “tuteur” qui organise individuellement des rendez-vous.

Innovant et unique dans l’ex-région Midi-Pyrénées, mis en place par l’académie de Toulouse et financé par le Fonds social européen (FSE), ce dispositif accueillera, selon la directrice, de nouveaux élèves de terminale la rentrée prochaine, ainsi qu’une classe de première.

 

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