L’excellence ne suffit plus. Entre matières recyclées, revalorisation des rebuts et tri des déchets, les griffes les plus prestigieuses soignent leur empreinte écologique.
C’est sur les podiums que l’industrie du luxe a emprunté la voie du upcycling (ou surcyclage) : l’art d’accroître la valeur d’un produit ou d’un matériau qui aurait dû finir au rebut, en lui offrant une seconde et noble vie.
Le subversif et très secret couturier belge Martin Margiella est le premier à glisser de la récup’ dans les tiroirs des grandes maisons, aux côtés des éternelles mousselines, organza et autres soies luxueuses. Pour présenter sa sulfureuse collection printemps-été 1990, il fait défiler ses mannequins dans un misérable squat parisien. Les robes, mal ajustées, sont confectionnées à partir de vieux sacs plastiques et les hauts, grossièrement taillés dans des cabas Franprix, sont assemblés avec du simple scotch noir… Le monde de la mode vient de subir un séisme et la figure du couturier-glaneur de sortir de terre.
Dans son sillage, pratiquement tous les couturiers vont, au moins ponctuellement, s’essayer à l’exercice du surcyclage. Christian Lacroix, Stefano Pilati avec ses collections capsules “New Vintage” au sein de la maison Yves Saint Laurent, ou le duo néerlandais Viktor & Rolf… Les créateurs décousent, taillent et retissent à partir de leurs stocks inutilisés ou de vêtements collectés. Mais ces collections, exclusives et numérotées, gardent un caractère iconoclaste. C’est l’emblématique Stella Mc Cartney qui imposera véritablement le principe d’une mode durable en refusant, dès ses débuts, de travailler le cuir et la fourrure ainsi qu’en privilégiant l’usage de matières bio ou recyclées.
Il faut attendre les années 2000 pour que les grandes maisons systématisent leur engagement environnemental. En 2010, Hermès lance Petit h, une gamme complète d’accessoires de luxe fabriqués à partir de matériaux haut de gamme, mais déclassés. De son côté, Gucci incite ses clients à retourner leurs emballages à un centre de tri et les parfumeurs comme Guerlain, Kenzo ou Dior proposent maintenant des versions rechargeables de leurs plus fines fragrances. Mais si les collections écoresponsables sont encore très rares, les amateurs de luxe zéro déchet pourront se tourner vers les jeunes créateurs qui, en véritables alchimistes du dé à coudre, sont passés maîtres dans l’art de transformer la moindre chute de rideau en une petite robe d’été inimitable.
Photo 1 et 2 : DR
Nicolas Belaubre
Nicolas Belaubre a fait ses premiers pas de journaliste comme critique de spectacle vivant avant d’écrire, pendant huit ans, dans la rubrique culture du magazine institutionnel ‘’à Toulouse’’. En 2016, il fait le choix de quitter la communication pour se tourner vers la presse. Après avoir été pigiste pour divers titres, il intègre l’équipe du Journal Toulousain, alors hebdomadaire de solution.
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