Cures de sevrage, traitements médicamenteux ou encore suivis psychologiques, voilà comment sont traditionnellement soignées les addictions. Mais des alternatives existent pour accompagner le patient à sortir de ces maux. Le sport fait partie de ces solutions qui permettent de lutter contre l’accoutumance à l’alcool, la drogue ou le tabac, comme le démontre l’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA), basée en région PACA, avec son programme “Sport Odyssée”.
« Restaurer par le sport ce que l’addiction a abîmé. » Voilà comment le responsable de “Sport Odyssée” définit le projet en une phrase. Vincent Laroche, psychologue et chef de service au Centre de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) Odyssée à Nice, mène cette initiative, lancée en novembre 2016, en partenariat avec l’Agence régionale de santé (ARS). « L’objectif est de maintenir une relation avec les autres personnes, mais aussi de réapprendre à se connaître soi-même », indique le docteur.
Développé et réalisé à Nice, “Sport Odyssée” propose des activités sportives hebdomadaires et adaptées par groupe de dix patients. Si l’addiction détruit évidemment les personnes physiquement, elle les enferme également dans un cercle d’isolement et déchire le lien social. Tout l’enjeu du projet se trouve donc dans la reconstruction, tant dans sa dimension physique que psychologique. « Nous organisons des animations diversifiées, adaptées, mais surtout collectives », explique Vincent Laroche.
« De la réathlétisation d’abord pour regagner une condition physique souvent défaillante. Du yoga dans le but d’agir sur le système nerveux neurovégétatif. Et du kayak pour faire sortir le patient de son cadre quotidien grâce à l’environnement aquatique, mais aussi de travailler la motricité. L’exercice s’effectue dans des kayaks doubles pour développer la coopération dans un même temps. »
Ces activités sont en accord avec le projet thérapeutique de chaque patient. Des discussions sont menées en amont pour savoir si l’atelier aura un intérêt bénéfique pour lui. « Les inscriptions étant trimestrielles, les participants décident donc de poursuivre ou d’arrêter, tous les trois mois. Mais la plupart du temps, ils continuent. Cela veut dire que le programme leur plaît, c’est l’essentiel. En appui de ces séances, nous leur proposons un suivi, pour recueillir leur ressenti post-activité », détaille le psychologue.
Au terme des sessions, les patients, les coachs et les responsables dressent un bilan à l’aide d’un questionnaire de satisfaction. Selon Vincent Laroche, « le constat qui revient le plus souvent est celui du retour de la confiance, du développement de la capacité relationnelle et de l’affirmation de soi. Des qualités qui disparaissent avec l’addiction ». « Sport Odyssée s’avère bénéfique sur le plan physique, mais le programme aide également les participants à accepter les cadres, à structurer leurs emplois du temps, à respecter des consignes », ajoute le spécialiste. Une dimension non négligeable alors que l’addiction leur a fait perdre leurs repères.
Lionel, qui souffre de dépendance au cannabis, confie son ressenti au sujet de ”Sport Odyssée” : « Je suis suivi par un psychiatre et c’est lui qui m’a conseillé d’intégrer ce programme. Grâce à cette initiative, je suis maintenant sorti de mon addiction. C’est sympa, on est en groupe, on fait de la course, du yoga, des balades en vélo, et aussi du kayak. » Un dispositif qui a radicalement changé sa vie. « Avant, je fumais tout le temps, je ne pratiquais aucune activité physique. Aujourd’hui, je ne fume plus et je fais du sport de manière autonome. Je sens la différence, je dors beaucoup mieux, je me sociabilise, cela a été très positif pour moi », sourit-il. Comme Lionel, « la plupart des patients souhaitent poursuivre l’initiative », affirme Vincent Laroche. « Ils se réengagent sur plusieurs années dans notre programme. Quand ils sont prêts, nous organisons des rencontres avec des clubs sportifs pour qu’ils puissent s’y inscrire et s’épanouir en totale autonomie. » Cette dernière fait ici figure de petite victoire.
Comme souvent, il est important de sensibiliser, de prévenir avant de guérir. C’est pourquoi le CSAPA a pour projet d’organiser une journée dédiée à la lutte contre l’addiction. L’occasion de mettre en avant le programme ‘’Sport Odyssée’’. « Nous devions faire cela cette année, mais avec le confinement, tout est tombé à l’eau. La journée est donc reportée en juin 2021. Elle sera consacrée majoritairement à la sensibilisation avec une conférence dans laquelle des spécialistes interviendront. Nous proposerons également une activité kayak », conclut Vincent Laroche. En marge de cette action, des groupes de parole sont organisés pour que les patients puissent échanger et partager leurs expériences.
En attendant, des initiatives visant à faire du sport un vecteur d’insertion sociale fleurissent dans toute la France. Et ce auprès de publics très variés. Qu’il s’agisse de football en marchant pour que les personnes âgées puissent garder un lien social, de karaté pour que les femmes victimes de violence se réapproprient leur corps, ou d’athlétisme pour aider les autistes à maîtriser leurs angoisses. Un petit échantillon des nombreux projets que le JT met en exergue dans ce dossier du mois d’octobre.
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