Pour les jeunes couples sans enfants, le confinement est semble-t-il une aubaine, sexuellement parlant. Pour les autres, cette période particulière reste difficile à appréhender. Le mal-être, le stress et le déséquilibre psychologique inhérents au confinement annihileraient la libido et dégraderaient donc les rapports intimes au sein du couple. Alors comment le préserver en ces temps de crise sanitaire ? Conseils d’une sexologue et thérapeute de couple.
« 44% des Français n’ont pas eu de rapports sexuels au cours du mois d’avril. » C’est ce que révélait un sondage Ifop, publié en mai dernier, au sortir du premier confinement. Bien sûr, il s’agit d’une large proportion de célibataires et de personnes ayant été confinées seules. Mais l’étude précise également que 21% des couples se trouvaient dans ce cas, soit deux fois plus qu’avant le confinement. « Et le second est encore pire », constate Muriel Grosjean, sexologue et thérapeute de couple à Toulouse.
Dans son cabinet, les demandes de rendez-vous se multiplient. Et pour elle, il est clair que les confinements auront eu un impact sur la sexualité des Français. « Lorsque l’on ne dispose plus de moments à soi, que l’on télétravaille ou que l’on est en chômage partiel. Lorsque l’on ne peut plus voir ses amis ou s’adonner à ses activités favorites… On ne se manque plus de ne pas s’être vus dans la journée. Les sujets de conversation se font plus rares. Alors, se cristallisent les tensions du couple », explique Muriel Grosjean.
À tout cela, s’ajoutent l’augmentation de la charge mentale sur les conjoints et l’angoisse de ne pas pouvoir se projeter. Difficile, dans ces conditions, de se libérer l’esprit pour penser plaisirs charnels. D’ailleurs, l’appétit sexuel a été plus rudement inhibé chez les femmes. « Les hommes ont eu tendance à recourir au sexe pour décompresser. Tandis que les femmes, au contraire, ont besoin d’être sereines et l’esprit tranquille pour y penser », précise la sexologue. Un constat habituel, mais qui s’est décuplé durant le confinement. Un cercle vicieux qu’il convient de briser pour ne pas faire partie des 11% de couples qui souhaitent prendre leurs distances, selon le sondage Ifop.
Pour cela, Muriel Grosjean livre ses conseils. D’abord, « il faut pratiquer ce que l’on appelle le renforcement positif », lance-t-elle. Il s’agit de relever ce que le conjoint fait de bien et d’arrêter de souligner le négatif. Autrement dit, s’il décide d’aller faire des courses, il vaudra mieux le remercier du “sacrifice” plutôt que de lui reprocher d’avoir oublié un produit. « Se complimenter, se remercier, se parler gentiment. Cela peut paraître banal mais avec la routine, d’autant plus en confinement, ce sont des gestes auxquels on ne prête plus attention. Pourtant, cela reste important », argumente la sexologue, précisant que la situation n’est facile pour personne.
Il faut ensuite s’aménager de vrais instants de partage… Sans les enfants. « Des dîners aux chandelles, des soirées massage ou le visionnage d’un film », conseille la thérapeute. Ce sera le moment d’échanger sur les ressentis de chacun, de communiquer ses envies et de faire des projets. « Qu’il s’agisse d’objectifs à court terme comme de s’occuper du jardin, ou de repeindre une pièce. Ou d’initiatives au sortir de la crise sanitaire comme des voyages ou des envies immobilières. Il est primordial de garder des projets communs », insiste-t-elle.
Pour finir, « veillez à ne pas vous négliger », enjoint Muriel Grosjean. Car en cette période anxiogène, la séduction et la tendresse sont plus importantes que le sexe. « Dans l’intimité, privilégiez les caresses, les bisous. Prenez le temps d’être attentif à l’autre. »
Le secret serait donc de voir en ces confinements successifs, des périodes positives, propices aux remises en question. « Il faut s’en servir pour s’interroger sincèrement, ne plus avoir recours au déni. Que l’introspection aboutisse à un renforcement du couple ou à une séparation, cette crise sanitaire peut permettre de faire le point », affirme la sexologue.
Et pour ceux qui avaient penser résoudre leur mal-être dû au confinement par le sexe… C’est peine perdue pour Muriel Grosjean. Autrement dit, le plaisir charnel ne permet pas de limiter les conséquences psychologiques des confinements. Le sexe ne peut pas combler un manque plus profond. Même s’il participe à améliorer le quotidien, à pimenter une relation, « on ne doit pas s’en servir pour aller bien. Cela ne fonctionnerait pas. En revanche, si l’on parvient à se sentir mieux, à régler les problèmes qui nous tourmentent, les plaisirs du sexe n’en seront que décuplés… »
Commentaires