Au lieu-dit Le Pas du Fauga, au pied des Pyrénées haut-garonnaises, Ivan Bragatto et sa femme Anaïs Gallo-Bragatto bâtissent, seuls, la maison de leurs rêves. Bioclimatique, avec un système de phytoépuration autonome et privilégiant des matériaux locaux et biosourcés… Un projet qui fait rimer écologie et économie.
© terraflorAu creux d’un vallon du piémont pyrénéen, à la lisière du parc national régional ariégeois, Ivan Bragatto et sa femme Anaïs Gallo-Bragatto se sont lancés dans un défi hors-norme. Bâtir, en autoconstruction, une maison bioclimatique d’une cinquantaine de mètres carrés. « Un gros projet pour quelqu’un qui n’a jamais tenu une visseuse de sa vie », s’amuse Ivan Bragatto. Depuis quelques mois, ce biologiste de formation multiplie les casquettes d’artisans du bâtiment. Charpentier, plombier, électricien… Ici, tout est fait-maison.
« Échapper à une logique de surconsommation et réduire notre empreinte environnementale »
Entièrement assemblée en bois d’essences locales, une structure haute de plusieurs mètres dresse son imposante silhouette à l’entrée du terrain. Recouvert d’immenses bâches blanches pour la protéger des intempéries, le futur lieu de vie du couple laisse déjà entrevoir sa forme définitive. « Nous aurons deux chambres et une grande pièce avec cuisine et salle à manger », décrit le jeune homme. Au premier abord, rien ne semble distinguer ce chantier de celui d’une maison conventionnelle, si ce n’est les panneaux solaires qui alimentent les machines-outils. Pourtant, certains indices révèlent une conception particulière.
Pas de trace de ciment ni de bétonnière en vue. Ivan Bragatto a décidé d’utiliser essentiellement des matériaux locaux et biosourcés comme le bois, la paille ou des laines végétales. « S’installer dans une maison bioclimatique s’intègre dans un choix global de mode de vie simple et plus proche de la nature. Cela permet d’échapper à une logique de surconsommation et de réduire notre empreinte environnementale. C’est économique à court terme, dans la construction, mais aussi sur la durée, à l’usage », assure-t-il.
« La première étape a été de trouver un terrain adapté », se souvient Ivan Bragatto. Exposé au Sud et bien ensoleillé, évidemment, mais également avec une légère pente. Une préférence, a priori, contre-intuitive. « Un sol plat est moins propice à l’installation d’un système de phytoépuration. Comme nous ne bénéficions pas de la gravité, il faut utiliser une pompe de relevage pour apporter l’eau », explique-t-il. Une alternative écologique familière à cet ancien chercheur qui a passé plusieurs années de sa vie à étudier la malaria. « Il s’agit d’un traitement par les bactéries simple, efficace et qui demande très peu d’entretien. »
Une fois l’emplacement arrêté, Ivan Bragatto a modélisé sa future maison sur un logiciel qui lui a permis de réaliser une simulation de l’incidence solaire et, ainsi, de déterminer la disposition idéale des ouvertures ou la longueur des débordements des toits. « Construire un bâtiment basse consommation (BBC) n’engendre pas de démarches incroyablement complexes. Mais il faut tout penser à l’avance. On peut faire du bioclimatique avec des matériaux conventionnels et une passoire énergétique avec de la paille », avertit l’apprenti architecte. Chaque décision a fait l’objet d’une longue réflexion avant sa mise en œuvre. D’autant que le jeune homme est absolument autodidacte.
« Il existe toujours différentes manières de faire la même chose »
« Tout m’intéresse. La résistance des matériaux, les méthodes d’assemblage, la plomberie, l’isolation, la ventilation… », assure Ivan Bragatto, qui n’a pas eu peur de se plonger dans des ouvrages de théorie fondamentale. Déphasage thermique et moment fléchissant n’ont plus de secrets pour cet ancien universitaire. Un approfondissement qui demande beaucoup de temps mais qui ne remplace pas l’expérience de terrain : « Quand on est autoconstructeur néophyte, il est très dur de prendre les décisions car il existe toujours différentes manières de faire la même chose. » Alors, parfois à tâtons, le couple invente et réinvente son futur domicile.
Pour l’isolation, ils ont opté pour une maison sur pilotis, bâtie sur une plateforme en parquet et fourrée de matériaux biosourcés. Confrontés à un terrain très argileux, ils ont été contraints d’enterrer des poteaux à près de neuf mètres de profondeur. Les murs, eux, sont réalisés avec la technique des cellules sous tension : une des principales méthodes de construction en paille, inventée par un Hollandais, qui consiste à comprimer chaque botte au sein d’une ossature de bois. « Avec les risques de pluie, il m’a fallu une couverture avant de monter les murs », avertit Ivan Bragatto. Un défi de taille qui l’a obligé à surélever la charpente à mesure que progressaient les travaux.
« Une cuisinière à bois servira ponctuellement de chauffage »
Mais le jeu en vaut la chandelle puisque le couple n’a pas prévu d’installer de système de chauffage dédié. Un choix qui peut s’avérer surprenant dans une région où les températures affichent régulièrement des valeurs négatives en hiver. « Nous aurons une cuisinière à bois qui servira ponctuellement de radiateur et produira l’eau chaude sanitaire », rassure le jeune homme à l’optimisme et la motivation sans faille. Bientôt hors d’eau, la maison devrait-être habitable dans le courant de l’année.
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