Depuis 1991, l’association Rire médecin vient apaiser les souffrances des enfants hospitalisés. Ses 100 comédiens-clowns animent aujourd’hui 47 services pédiatriques de 15 hôpitaux en France. Entretien avec la directrice générale, Clotilde Mallard.
Pourquoi mieux vaut-il rire à l’hôpital ?
Parce que, quelle que soit sa durée, une hospitalisation demeure une grande source d’angoisse, de stress et de sentiment de solitude. Plus encore chez les moins de 15 ans, dont les statistiques nous disent que la moitié effectuera au moins un séjour à l’hôpital.
En riant, ils oublient qu’ils sont malades et retrouvent leur statut d’enfant. Parfois, cela peut atténuer la sensation de douleur… Par exemple, pendant des soins ou des examens particulièrement difficiles, comme une ponction lombaire ou un myélogramme (examen de la moelle osseuse, ndlr). Les parents, eux, ont la joie de redécouvrir le sourire de leur fille ou de leur fils, malgré son affection. Et les membres du personnel médical vous diront qu’on soigne toujours mieux un enfant heureux. Les comédiens-clowns nouent des liens très forts avec ces derniers et leur apportent une forme de légèreté et de poésie, un temps de respiration précieux, surtout dans les services où la vie des petits patients est en jeu.
Comment ces clowns s’y prennent-ils ?
Il ne s’agit en aucun cas d’organiser un spectacle dans un couloir, mais au contraire de faire du sur-mesure. Deux fois par semaine, les comédiens-clowns passent de chambre en chambre, après avoir échangé avec l’équipe médicale, qui, sous le sceau du secret, leur a indiqué la pathologie de chaque patient et son degré de douleur. Ils interviennent ainsi en duo, tout au long de l’année et toujours dans le même service. Cette régularité, réclamée par les cadres de l’établissement, est très importante, car elle donne des repères lors d’une hospitalisation de longue durée.
Ensuite, la tradition clownesque est à l’œuvre. Les comédiens se saisissent de l’atmosphère de la chambre, s’appuient sur la présence éventuelle des parents ou des grands-parents, attrapent un objet pour créer une situation cocasse. Ils invitent l’enfant à participer à un jeu, à un moment musical, à faire des bulles ou lui montrent des tours de magie… Chaque duo a ses spécificités.
Ont-ils un statut professionnel à part entière ?
Oui, intervenir auprès d’enfants malades ne s’improvise pas. Les 100 comédiens-clowns qu’emploie l’association sont rémunérés en tant qu’intermittents du spectacle et sont tous passés par notre institut de formation certifiante, qui est référencé dans les catalogues des hôpitaux. Nous continuons ensuite de les former, tous les mois, alternativement dans les domaines médical et artistique. Ils sont présents dans les services, très lourds, de pédiatrie neuronale, d’oncologie ou de réanimation d’une quinzaine d’établissements français. Également auprès des petits brûlés de l’hôpital Trousseau à Paris. Et, depuis décembre dernier, au sein de l’unité d’accueil des jeunes victimes maltraitées du CHR d’Orléans – une première pour nous, car il s’agit-là d’accompagner l’équipe médico-judiciaire pour favoriser l’expression de la parole.
Nous ne nous engageons avec un établissement que si nous sommes sûrs qu’il s’agira d’une relation au long cours. Ainsi, depuis 1991, l’association n’a jamais mis un terme à une collaboration. Et elle fait rire 80 000 enfants chaque année.
Diplômée de l’ESCP Europe, elle est la directrice générale du Rire médecin depuis l’an dernier, après avoir géré pendant six ans l’association Vaincre la mucoviscidose.
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