BOUCLES. Produire de la nourriture à partir de déchets organiques, c’est le pari lancé par l’entreprise lauragaise Cler-Verts. Avec Organic’Vallée, elle a créé un laboratoire d’économie circulaire unique en France.
Par Nicolas Mathé
Le Lauragais n’est pas la Californie, mais il a désormais lui aussi sa vallée, peut-être destinée à la même renommée que celle du Silicone. Sauf qu’à Belesta-en-Lauragais, on fait plutôt dans l’organique. Organic’ Vallée, c’est le nom donné au projet d’envergure impulsé par la société de traitement et de valorisation des déchets Cler-Verts : la première zone française d’agroactivités entièrement dédiée à la gestion durable de la matière organique. Enfant du pays et « autodidacte du déchet », comme il se définit lui-même, Jean-Luc Da Lozzo a cofondé l’entreprise Cler-Verts en 2003. « Le projet Organic’Vallée s’est imposé naturellement au fur et à mesure des expériences liées aux activités de l’entreprise. On s’est notamment rendu compte que certaines matières arrivant chez nous pouvaient avoir une bien meilleure utilisation que le recyclage », explique-t-il. Des flux entrants qui nécessitent des débouchés, d’autres sortants pouvant générer de nouvelles activités… L’idée d’un grand pôle de coopération regroupant une multitude d’activités agricoles émerge peu à peu. Un terrain de 55 hectares est acheté en novembre 2014 et un juin 2015, une SCIC est créée permettant aux différents acteurs du territoire (particuliers, collectivités, entreprises) de participer concrètement à son développement économique.
« Une bien meilleure utilisation que le recyclage »
À terme, le site devrait réunir des maraîchers et éleveurs bio, une huilerie, une meunerie, une légumerie et un four à pain dédiés à la restauration collective ainsi qu’une micro-brasserie ou encore une usine de séchage de luzerne. Ne resterait plus qu’à créer des synergies entre tout ce beau monde. Ainsi, les porcs seraient nourris avec les restes de pain collecté par Cler-Verts dans les boulangeries, des champignons pousseraient sur du marc de café provenant des distributeurs automatiques de la région et le compost produit sur place servirait au sol des serres et des champs. Bref, les déchets des uns font l’énergie des autres. « C’est une pensée globale. Il s’agit non seulement de créer des boucles entre les activités, mais aussi à l’échelle du territoire afin d’utiliser ses ressources au mieux. Nous récupérons les déchets de la ville, pour ensuite l’alimenter via le travail des agriculteurs », ajoute Jean-Luc Da Lozzo. Afin de pérenniser l’usage du foncier, les porteurs de projet seront locataires de leur espace et paieront la SCIC en fonction de leur chiffre d’affaires. Courant 2016, une levée de fond sera lancée avec l’objectif de recapitaliser le projet à hauteur de 1,5 million d’euros. Et dans 5 ans, si toutes les activités prévues s’installent, la société coopérative devrait générer 100 emplois et atteindre un chiffre d’affaires de 7 millions d’euros.
Encouragé par le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll, Organic’ Vallée pourrait servir d’exemple. Selon Jean-Luc Da Lozzo, le schéma serait reconductible dans 80 endroits en France. « Si l’on peut servir de modèle, tant mieux, mais nous n’avons fait que remettre du bon sens dans la réflexion, car nous avons un rapport au quotidien avec la terre. Quand on commence à s’interroger sur ce que l’on pourrait faire des matières au lieu de les détruire, c’est sans fin », s’exclame l’autodidacte de l’économie circulaire.
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