Leurs vagues sont fascinantes et leurs fientes corrosives. Au-dessus des cimetières, des squares ou au bord de la Garonne, des nuées d’étourneaux envahissent le ciel toulousain. Le phénomène aurait tendance à s’amplifier…
© Le Journal ToulousainC’est la hantise de l’ornithophobique. Se retrouver sous une nuée de milliers d’étourneaux, dans un fracas de piaillements. Cimetières, rives de la Garonne, parcs et jardins… De novembre à février, difficile pour les Toulousains d’échapper à ces vols collectifs dans les lieux arborés : « C’est comme un tapis volant qui, en se repliant sur lui même, donne à voir des motifs assez fantastiques. Plus spectaculaire encore à Rome, ce phénomène se duplique dans la plupart des grandes métropoles du Sud de l’Europe », témoigne Guy Theraulaz, directeur du Centre de recherches sur la cognition animale du CNRS, à l’Université Toulouse-III-Paul-Sabatier. Le spécialiste explique que, si la nuée change brusquement de direction, c’est parce qu’un individu, situé à son bord, en a décidé ainsi face à un obstacle ou à un prédateur.
Durant sa migration du Nord-Est du Vieux continent vers l’Italie et l’Espagne, le volatile s’attarde dans nos villes, attiré par la chaleur grimpante. Il y pose d’autant plus volontiers ses valises que les prédateurs sont moins nombreux qu’à la campagne. Si on loue ses qualités d’insectivore, l’étourneau n’en reste pas moins classé parmi les animaux nuisibles. « Capable avec ses camarades de saccager une exploitation maraîchère en quelques minutes, il se nourrit aussi de cerises, d’olives ou de raisin », précise Guy Theraulaz. Avec une espérance de vie de 15 ans, la bête se porte à merveille. En Europe, sa population est estimée de 200 000 à 500 000 couples et le nombre grandit.
Ce sont ses fientes corrosives qui causent le plus de soucis aux citadins, car elles s’attaquent, sans distinction, aux monuments, trottoirs, mobilier urbain, cheveux et carrosseries. En pleine saison, les services de nettoyage de la mairie de Toulouse se remettent ainsi quotidiennement à l’ouvrage. Odeur pestilentielle et glissade garanties.
Pour effaroucher les étourneaux, rien de tel qu’une fusée crépitante tirée au petit matin, quand ils dorment dans les platanes, ou au crépuscule, avant qu’ils y trouvent un nid pour la nuit. La technique, qui peut effrayer les habitants, est peu usitée.
Une autre consiste à diffuser par haut-parleur le cri du geai, un de leurs pires ennemis. Mais la mairie admet que tout cela ne fait que déplacer le problème sans le résoudre. Il faudra bien s’adapter aux habitudes de ces populations, parce qu’elles ne s’adapteront pas aux nôtres. Désormais entrés en période de reproduction, les étourneaux devraient se tenir tranquilles au moins jusqu’à l’automne prochain.
Philippe Salvador
Philippe Salvador a été reporter radio pendant quinze ans, à Toulouse et à Paris, pour Sud Radio, Radio France, RTL, RMC et BFM Business. Après avoir été correspondant de BFMTV à Marseille, il est revenu à Toulouse pour cofonder le magazine Boudu.
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