Pour cette rentrée à l’école des musiques vivaces Music’Halle, établissement emblématique de la ville qui ne cesse de nourrir la scène locale en nouveaux talents, plus de 500 élèves répondent à l’appel. Improvisation, atelier orchestre… Ici, la formation vise surtout à favoriser la synergie entre les musiciens pour permettre aux groupes de demain d’éclore.
Pas de doute. Malgré la présence d’enfants en bonnets de bain au rez-de-chaussée, au deuxième étage de l’espace Job des Sept-Deniers, on est bien dans une école de musique. Aux murs, des affiches d’artistes et, sur les casiers de la salle des professeurs, « les noms de tous les musiciens de Toulouse », s’amuse Philippe Metz, le directeur de Music’Halle.
Philippe Metz pousse l’une des portes des onze salles de classe, bien insonorisées et remplies d’instruments. On ne s’en rend pas compte, mais la création d’une école de musique dans une ancienne usine a relevé du défi, tant sur le plan politique qu’architectural.
Si Music’Halle existe depuis 1986, année où l’école a été fondée pour assurer la formation aux musiques actuelles, c’est en 2011, après presque 10 ans de combat pour empêcher la destruction de ce bâtiment emblématique, qu’elle a pu s’installer dans les locaux de l’espace Job. « Pour les travaux, il fallait absolument prendre en compte l’aspect insonorisation », lance Philippe Metz, en indiquant l’architecture spécifique du lieu. Chaque salle de cours à sa particularité : travail vocal avec de gros ballons de Pilate, musique arabe avec ses instruments venus du Maghreb…
Dans une pièce lumineuse, Mirabelle, étudiante ayant terminé sa 3e année du cycle professionnel, joue du saxophone, accompagnée au piano par son professeur, le saxophoniste David Haudrechy. « Nous faisons un face-à-face pédagogique », explique-t-elle.
« Des cours à la carte selon les besoins et envies »
Chez Music’Halle, il faut ranger au vestiaire le vocabulaire traditionnel de l’apprentissage. Ici, on suit des cours d’improvisation, de travail scénique, on s’essaie à l’écriture slam… « Dans la formation professionnelle, il y a des cours fixes et des cours à la carte selon les besoins et envies de chacun », explique Philippe Metz. Chorale afro-cubaine ou atelier des violoncellistes, chaque sensibilité peut trouver son bonheur. Avec toujours un même mot d’ordre : privilégier la pratique et les ateliers collectifs. « Dans mon cours de formation musicale, nous travaillons l’oreille, le rythme… Mais nous allons systématiquement de la pratique vers la théorie », explique le professeur Fred Carbonnery.
Passage obligé pour les étudiants, l’atelier orchestre : « Ils sont rassemblés par groupe de sept ou huit, et travaillent une fois par semaine sur un répertoire avec au minimum deux représentations dans l’année », poursuit Philippe Metz. Des concerts d’élèves sont organisés à l’espace Job, mais aussi à l’extérieur comme en a fait l’expérience Mélissandre, étudiante toulousaine en troisième année. « Je viens de jouer au festival de Ramonville avec un sextet de samba aux influences hip-hop, créé à Music’Halle », raconte cette chanteuse.
C’est d’ailleurs l’une des choses qui a le plus marqué la jeune femme dans sa formation : « Il y a bien sûr les cours de technique, indispensables, mais surtout, j’ai pu apprendre à communiquer avec d’autres musiciens, à trouver ma place dans le groupe. » Enfin, chez Music’Halle, on prépare aussi les futurs artistes aux aspects moins évidents de leur métier : l’environnement social et juridique, la présence sur le Net, les contrats…
Grâce à toutes ces facettes, de nombreux groupes aujourd’hui reconnus sont sortis de la formation professionnelle. Il y a bien sûr Pulcinella (en concert le jeudi 26 septembre au Métronum), Anakronik Electro Orkestra ou encore le très doué Matéo Langlois. Au fond du couloir, dans le studio d’enregistrement où officie Serge Faubert, on repère des pochettes d’un album de Kid Wise. « Ils ont enregistré ici », se souvient le technicien son. « Les élèves peuvent aussi bénéficier de cet équipement… tout comme des artistes connus tels BigFlo & Oli qui viennent régulièrement. »
« Cet écosystème permet à un incroyable vivier de faire carrière »
Grâce à son réseau, aux 50 professeurs-musiciens professionnels et à ses relations avec les institutions locales comme le Métronum ou Jazz in Marciac, l’école apporte aux étudiants tout un écosystème vertueux qui permet aux jeunes talents d’éclore. Pour Philippe Metz, devenir musicien ne tombe pas du ciel. « Les élèves passent un diplôme reconnu, le Mima. Il y a 30 ans, tout le monde pensait qu’un diplôme de musicien était loufoque ! Aujourd’hui, c’est entré dans les mœurs. Nous recevons 70 candidatures par an pour une quinzaine de places… Tout cet écosystème permet à un incroyable vivier d’artistes de faire carrière ». Ici, on ne naît pas musicien, on le devient.
Maylis Jean-Preau
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