BÉTON. La forêt des Landes, un projet de stockage de déchets, une libellule protégée… C’est le décor de ” Un homme doit mourir “, le nouveau roman noir de Pascal Dessaint. À l’occasion de sa sortie en librairie, nous avons rencontré le maître toulousain du polar. Toujours aussi passionné de bons mots et de drôles d’oiseaux.
Maylis Jean-Préau
© Franck AlixPeu importe si le ciel est gris et le soleil absent. Pascal Dessaint aime être dehors. Même pour une interview, il préfère la cour de la librairie Ombres Blanches aux canapés du coin café. Il faut dire que le romancier originaire de Dunkerque n’a pas vraiment peur de se mouiller. « Pour ne pas s’ennuyer étant gosse », il a fait de la nature et des sciences naturelles son passe-temps.
Cette passion irrigue avec brio son 24e livre, ” Un homme doit mourir “.L’intrigue se déroule dans le Sud-Ouest, entre le littoral et la forêt des Landes. Les voix de deux narrateurs se croisent. Boris, un jeune naturaliste « bossant pour des salopards » et Alexis, « trafiquant d’arbres »hébergé dans la villa d’un ami qui a arasé la dune pour avoir une meilleure vue. Dans cette région,un groupe industriel tente d’installer une unité de stockage de produits dangereux. Mais la présence d’une libellule rare risque de compliquer ses projets. D’autant plus qu’une ZAD (zone à défendre) prend forme.
Ce roman s’inscrit dans la veine “verte”, entreprise en 2007 par Pascal Dessaint. « Malgré une prise de conscience de notre impact sur la nature, nous n’arrivons pas à enrayer sa destruction en changeant nos modes de vie excessifs. Il y a de quoi être inquiet », glisse-t-il. Concerné mais jamais donneur de leçon, le romancier a mis ces tragédies industrielles et environnementales au cœur de ses polars. Il a abordé le drame d’AZF dans ” Loin des humains ” et le scandale de Metaleurop dans ” Les derniers jours d’un homme “. Cette fois, Pascal Dessaint s’est inspiré des luttes des zadistes à Notre-Dame des Landes et à Sivens, dans le Tarn, où il s’est rendu à plusieurs reprises pour militer.
Après Toulouse, à laquelle il a consacré ses premiers romans depuis 1992, puis le Nord de la France, le décor des Landes s’est imposé à Pascal Dessaint. « J’avais été invité par des bibliothécaires à Capbreton et j’ai eu envie de jeter le trouble dans cette “Côte d’Azur des Toulousains” », explique-t-il. Son intrigue est nourrie d’anecdotes locales, recueillies par hasard, telle cette effrayante histoire de déchets radioactifs immergés dans le canyon marin de Capbreton, à proximité d’un spot de surf…
Dans un style fougueux et familier, teinté d’humour, l’auteur s’attache aux émotions de ses personnages. Au fil du récit, le décor idyllique se froisse, des branches craquent et la tension monte. « J’avais envie de voir comment un projet industriel pouvait pousser des gens qui n’ont pas l’habitude de s’engager à se mobiliser, ce qui se passe quand ilsse retrouvent sur le terrain »,poursuit-il. Au beau milieu de la conversation, en entendant le cri d’un goéland, Pascal Dessaint se tourne vers le ciel. « C’est le nouveau prédateur de Toulouse », explique-t-il avant d’évoquer son prochain roman, « qui paraîtra en 2018 ou 2019 ». On l’aura compris. Pascal Dessaint n’a pas fini de s’intéresser aux prédateurs en tous genres. Et contrairement aux personnagessans scrupule qu’il décrit dans son livre, il n’est pas un homme pressé mais aime vivre au rythme de la nature.
” Un homme doit mourir ” , éditions Rivages, rencontre avec Pascal Dessaint, le 14 octobre à 17h30, Librairie Ombres Blanches. www.pascaldessaint.fr
La trace du Héron
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