Tels les puissants pharaons Toutânkhamon, Amenhotep Ier ou la lignée des Ramsès, quelques notables toulousains se sont, par le passé, payés le privilège d’une sépulture qui épargne leurs corps de la corruption. Dans la Ville rose, pas d’embaumeurs mais des caveaux propices à une momification « naturelle ».
Y a-t-il eu des momies à Toulouse ? Mis à part « In-Imen », la momie égyptienne exposée au musée Georges Labit, il n’est pas aisé de retrouver la trace des mystérieuses dépouilles toulousaines. Celles-ci auraient pourtant été conservées, pendant plusieurs siècles, dans divers édifices religieux. Notamment le couvent des Jacobins ou l’église des Cordeliers, aujourd’hui disparue. Si quelques textes mentionnent leur existence, les preuves factuelles ne courent pas les rues. Il faut donc se fier à des témoignages antérieurs à la Révolution française.
Dans un mémoire sur le sujet écrit en 1784, le Baron de Puymaurin décrit la crypte creusée près de l’église des Cordeliers et son macabre contenu. « Des débris de squelettes étaient entassés confusément dans un coin (…). Ce qu’il y avait de plus effrayant dans ces corps, c’était la préservation parfaite de la face : on y reconnaissait les traits de la physionomie, et jusqu’à l’expression qu’y avait laissée la dernière convulsion. » Une conservation exceptionnelle due a des conditions particulières d’hygrométrie et de température. Aux Jacobins, les défunts étaient « inhumés dans des tombes en brique et pierre de taille, maçonnées à ”chaux et sable”, de sorte que l’air n’avait aucun accès dans ses sépultures », détaille Jacques Fréxinos, membre de l’association des Toulousains de Toulouse, dans un article rédigé pour la revue “Auta”.
Ce spectacle funeste attirait, déjà à l’époque, de nombreux curieux. Le père Labat, procureur général des missions dominicaines aux Antilles, de passage à Toulouse, s’émouvait ainsi, le 24 mars 1706, de la vision de dépouilles « si peu défigurées que ceux qui les avaient connus vivants les reconnaissaient encore et me les nommaient ». Le sacristain relate également comment la position de ces restes centenaires était modifiée par le taux d’humidité de l’air ambiant, impulsant une imperceptible danse macabre.
Autant de scènes qui alimentèrent les légendes. On raconte notamment l’histoire d’un jeune homme ayant voulu prouver sa bravoure en descendant, seul, et en pleine la nuit, planter un clou dans l’endroit le plus reculé du caveau, au milieu des momies. Après plusieurs heures, le corps du malheureux fanfaron fut retrouvé raide mort, le visage figé dans un rictus d’effroi.
Certainement troublé par la situation, celui-ci avait malencontreusement attrapé un pan de son manteau en fichant la pointe. Le jeune hâbleur, tiré par la manche, s’est cru saisi par un squelette revenu à la vie et serait mort d’une syncope. Si certaines de ces histoires nous sont parvenues, en revanche, toutes les momies toulousaines auraient été détruites lors de la Révolution française.
Nicolas Belaubre
Nicolas Belaubre a fait ses premiers pas de journaliste comme critique de spectacle vivant avant d’écrire, pendant huit ans, dans la rubrique culture du magazine institutionnel ‘’à Toulouse’’. En 2016, il fait le choix de quitter la communication pour se tourner vers la presse. Après avoir été pigiste pour divers titres, il intègre l’équipe du Journal Toulousain, alors hebdomadaire de solution.
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