Claude Bartolone, président de l’Assemblée nationale, l’évoquait au lendemain des attentats de Paris. Un gouvernement d’union nationale, rassemblant sur le même projet politique des partis de bords différents, serait-il une solution au redressement du pays ? La question s’est reposée après les élections régionales, où le FN a été particulièrement haut. Mais sur le sujet, les avis sont partagés…
Jean-Christophe Sellin, conseiller régional du Parti de Gauche
« Un gouvernement d’union nationale serait-il la solution au redressement du pays ? Cette idée porte en elle le prétexte, la confusion et l’illégitimité de ceux qui la proposent.
Fallait-il des attentats sanglants et des résultats des élections régionales inquiétants pour la République (montée du FN, abstention d’un citoyen sur deux), pour se rendre compte qu’il y a un problème de chômage de masse, d’urgence sociale et de politique d’intérêt général à mener ?!
En réalité, l’installation de l’état d’urgence et son acceptation par l’ensemble des forces politiques parlementaires rendent possible ce prétexte d’union nationale…
De plus et depuis longtemps, Hollande et Valls ont un grand rêve : liquider le mouvement socialiste et construire un grand parti démocrate à l’italienne sur les ruines d’une gauche discréditée. Oui, il y a une gauche et une droite dans notre pays depuis la Grande Révolution française de 1789 avec le débat sur les politiques d’intérêt général et de solidarité, l’égalité des droits, la souveraineté populaire face aux notions d’individualisme, d’accaparement individuel, de compétition.
Au PS, chez les centristes de l’UDI et du Modem de Monsieur Lagleize (ni de gauche, ni de gauche), on nous propose un gouvernement des meilleurs (aristocraite en grec). Ils sont d’accord sur l’essentiel : mener une politique de droite. Quand Messieurs Raffarin et Valls proposent un plan commun de redressement pour l’emploi, on est inquiets, car les « meilleurs » en question sont responsables de 420.000 chômeurs supplémentaires. Ils sont donc illégitimes.
L’ordre du jour c’est un gouvernement de salut public, pour une assemblée constituante et une 6e république pour que le peuple soit souverain, un gouvernement de la redistribution des richesses, de nouveaux services et secteurs publics, de la transition écologique, avec une possibilité de créer des millions d’emplois. »
Jean-Luc Lagleize, Président du Modem 31, Adjoint au Maire de Toulouse, en charge de l’urbanisme
« L’union nationale ! Voici la solution pour sortir le pays de la crise, redonner le moral aux Français et reléguer le FN aux oubliettes. Une vraie bonne idée ou un marché de dupes ?
Si l’union nationale parait une voie séduisante pour redresser le pays, c’est également un risque phénoménal pour notre démocratie : en cas d’échec, ou de manque de résultat significatif, les extrêmes apparaitront comme le seul recours ! Attention donc aux lendemains qui déchantent.
Mais cette union est-elle seulement possible aujourd’hui ? Non : les deux camps sont fracturés entre ceux qui veulent dépasser les clivages et ceux qui privilégient l’affrontement. Alors, comment la faire ? Comment la conduire au succès ?
Chaque formation politique doit disposer d’une représentation dans les institutions. Il est anormal que plus de 7 millions d’électeurs voient leur vote bafoué, avec un sentiment de frustration qui va les pousser à encore plus de révolte. Il faut limiter le cumul des mandats, en permettant aux élus de retrouver une vie civile digne, sans chercher éperdument la réélection. Les électeurs auront ainsi la perspective qu’ils peuvent, eux aussi, s’impliquer dans la vie publique.
Les problèmes doivent être abordés sans tabou ni démagogie : oui, notre code du Travail est inadapté aux toutes petites entreprises. Elles ne peuvent pas se permettre d’embaucher alors qu’elles en auraient l’opportunité. Oui, les abus aux services sociaux finissent par faire oublier aux Français à quel point nous avons besoin de solidarité. Oui, la sécurité est une valeur républicaine et tout doit être fait pour que notre démocratie se protège. Oui, l’immigration est une chance pour demain, même si cela doit passer par des efforts à court terme. Et nos concitoyens sont parfaitement aptes à tout comprendre si l’on se donne la peine de leur expliquer.
“On peut et on doit gouverner la France autrement, parce que toute autre attitude conduira à un échec consternant” disait cette semaine François Bayrou. Cette nouvelle gouvernance passe par la remise à plat de notre système politique arrivé à bout de souffle. Sinon, l’union nationale sera un marché de dupes. »
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