Incompréhension. Alors que l’Université fédérale de Toulouse vient de voter son contrat quinquennal de site, sa présidente Marie-France Barthet apprend que le renouvellement de l’Idex lui a été refusé. Elle revient sur les conséquences d’une telle nouvelle.
Marie-France Barthet, en janvier 2013, l’Université fédérale de Toulouse avait obtenu le label Idex (initiatives d’excellence) pour une durée de trois ans. Quel était le montant de l’enveloppe et de quelle manière a-t-elle été utilisée ?
L’Idex représente 25 millions d’euros par an, dont 10 millions ont été affectés aux projets Idefi (Initiatives d’excellence en formations innovantes) et Labex (Laboratoires d’excellence) qui perdureront indépendamment de l’Idex. Ainsi, la vraie perte s’élève à 15 millions d’euros par an. Quant à l’utilisation des financements, nous l’avons réparti sur des chaires d’attractivité afin de faire venir de grands chercheurs internationaux, sur l’école des docteurs pour les former et favoriser leur insertion professionnelle, sur l’accueil des étudiants, sur l’intégration des étudiants et chercheurs étrangers, sur des actions à l’international pour développer des antennes de l’Université de Toulouse… ainsi que sur des projets de recherches et sur des équipements mutualisés. Autrement dit, nous avons utilisé cette enveloppe pour de l’investissement et très peu pour du fonctionnement. L’objectif étant la mise en place de nouveaux projets augmentant l’attractivité du site.
Pourquoi pensez-vous que l’Idex vous a été retiré ?
Nous sommes très étonnés de cette décision. Pour moi, il s’agit clairement d’une sanction mais pas tant sur la gestion qui n’a pas été déjugée que sur notre mode de gouvernance. La loi Fioraso de 2013 incite au regroupement sur les sites universitaires, sous trois formes possibles : la fusion, la fédération et l’association. À Toulouse, nous avons opté pour la seconde option et nous sommes organisés en Université fédérale. Nous pensions donc suivre les directives et que notre choix était légitime. Or, nous nous sommes rendu compte que le jury international n’a labellisé que les établissements qui avaient fusionné. Si nous avions été au courant dès le départ, qu’il ne fallait surtout pas appliquer la loi française, nous aurions agi en conséquence. Nous ne voulions pas fusionner pour ne pas nous couper des écoles d’ingénieurs qui ne sont pas admises dans cette option. Nous ne savions pas que le fait de vouloir intégrer ces établissements à notre projet nous couterait si cher…
« Il s’agit d’une sanction de notre mode de gouvernance »
Existe-t-il un recours possible ?
Dans le communiqué du Premier ministre, il est fait mention de mesures d’accompagnement pour nous permettre de rebondir et éventuellement présenter un nouveau projet dans deux ans. Nous sommes en train d’étudier ces possibilités et souhaitons savoir ce que signifie “rebondir” et où cela nous mènerait. Nous ne baisserons pas les bras, nous continuerons à travailler tous ensemble car c’est ainsi que nous serons le plus efficaces et nous allons voir… Nous n’avons pas encore assez de détails mais nous y verrons plus clair d’ici 15 jours.
Quelles sont les conséquences économiques de ce non-renouvellement de l’Idex pour l’Université fédérale et pour tous les établissements liés au projet ?
Excepté si les mesures d’accompagnement nous permettent de maintenir des choses, nous perdons 15 millions d’euros par an qui était répartis entre l’Université fédérale au sens strict (30%), et ses membres (70%). Ainsi, tous les projets de recherche, les chaires d’attractivité… mis en place grâce à cet apport sont remis en cause si nous ne trouvons pas de financements. Nous pouvons continuer jusqu’au 31 décembre 2016, mais pour 2017, nous devrons trouver une alternative. Heureusement, le fonctionnement ne sera que très peu impacté, nous avions été prudents. L’arrêt de l’Idex n’engendre absolument pas l’arrêt de l’Université fédérale.
De quels leviers disposez-vous aujourd’hui pour remédier à cette perte financière ?
Nous négocierons d’abord avec l’État les fameuses mesures d’accompagnement une fois que nous en connaîtrons le contenu. Ensuite, nous répondrons à d’autres appels à projets. Ceci pour chercher de nouvelles sources de financements publics. Toutefois, nous ne fermons pas la porte de l’investissement privé puisque nous avons voté la création d’une fondation, le 25 mars, grâce à laquelle nous aurons quelques apports.
Cela a été voté en même temps que le contrat quinquennal de site. Ce dernier est-il remis en question par la perte de l’Idex ?
Ce contrat, signé avec l’État, vise à conforter l’organisation en Université fédérale… C’est dire la contradiction du jury ! On nous laisse finaliser les actions, pour finalement nous dire qu’il ne fallait pas le faire. Mais qui dirige ce pays ? Est-ce un gouvernement ou un jury international ? Une réunion est programmée avec le ministère pour éclaircir tout cela, nous verrons alors si cette décision incompréhensible aura un impact sur le contrat quinquennal de site.
De plus, votre mandat se termine en juin, et vous ne vous représentez pas à votre propre succession. Regrettez-vous de ne pouvoir suivre ce projet ?
Ma décision n’est pas liée à tout cela, je souhaite simplement me consacrer à mon nouveau mandat de conseillère régionale. Mais si j’avais su qu’il y allait avoir un problème, je pense que je me serais représentée car je ne suis pas du genre à fuir le navire quand il prend l’eau ! Mais mon successeur gardera le cap ! C’est un pari sur l’avenir.
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